Du « Vaucluse » au « Poitou ». Une navigation délicate de l’ombre vers le clair obscur
Général Michel MASSON
Je dédie cet article au G.C.A. (décédé) Jacques Saleün, l’un de mes prédécesseurs à la tête de « La Vaucluse[1] », qui nous a quittés en 2004. Il fut plus tard le penseur du COS actuel, sans partis pris ni visions de fiers à bras[2]
Le 11 janvier 2013, la France réalisait en Somalie une intervention de vive force pour libérer Denis Allex, agent de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE), prisonnier du groupe terroriste somalien al-Chabab depuis 2009. Le groupe d’assaut, mené par le Service Action (SA) de la DGSE, était appuyé par des éléments relevant du Commandement des Opérations Spéciales (COS), et un renfort de moyens (conventionnels) stationnés en permanence dans l’océan Indien, sans compter une aide de l’US Navy. Cette opération lourde, interarmées et interalliée, se solda, comme chacun sait, par un échec : non seulement l’otage y laissa la vie, mais avec lui deux autres militaires Français.
Outre les troupes au sol, la composante aérienne se composait d’hélicoptères H225-M « Caracal » du Groupe Aérien Mixte 056 « Vaucluse » (GAM 056), l’unité aérienne mise pour emploi par l’armée de l’air à la DGSE, mais également d’hélicoptères du COS dont deux EC 665 « Tigre »[3].
Entraînement hélicoptère en montagne du GAM 056 (1989). Le Puma au premier plan est « camouflé » dans une livrée qui rappelle celle du GLAM. Intentionnel pour moins attirer l’attention (pas des « spotters » en tous cas ! On trouve des photos d’aéronefs du GAM sur tous les sites spécialisés). L’auteur est au premier plan
Le GAM 056, qui relève organiquement de l’armée de l’air, est couvert par le secret du fait de son employeur ; il nous a été toutefois évoqué avec éloquence par l’un de ses commandants, Ludovic Louriou, dans le trimestriel « Le Piège » n°234[4]. On retiendra que cet officier a également servi au sein de l’escadron de transport tactique 3/61 « Poitou », ce qui n’est pas neutre pour la suite de notre propos. On peut approfondir cet article en récupérant deux opus[5] de la revue Le fana de l’aviation d’avril et mai 2004 – plutôt bien construits sur le sujet, mais datés – ainsi que le n°3 de Raids Aviation[6] (septembre-octobre 2012 ; daté lui aussi).
J’ai pour ma part raconté la génèse des opérations aériennes clandestines et du GAM dans un autre article du même « Piège » (n°223[7]). Je concluais alors par deux phrases (un peu longues : n’est pas Proust qui veut…) sur le distinguo à faire – pas forcément très clair – entre opérations clandestines et spéciales. Il faut avouer que si l’on s’en tient à notre histoire politique et militaire nationale, dans l’immédiat après-deuxième-guerre-mondiale, une des caractéristiques des conflits dans lesquels nos forces furent engagées (guerres coloniales et postcoloniales, Suez, Algérie…), a vu un mélange plus ou moins savant de ces deux notions : une mixité des modes opératoires, plus ou moins combinés, qui trouvent leur origine dans le fait que le service action du SDECE (Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage, ancien nom de la DGSE avant 1982), dès qu’il fut créé par héritage des services et unités issus de la guerre, puisait en tant que de besoin dans les forces militaires conventionnelles.
Plus près de nous, un ancien patron du COS (2011-2013) puis directeur du renseignement militaire (DRM, 2013-2017) s’est mis en tête de réveiller ce serpent de mer, qui tel le monstre du Loch Ness, ne manque jamais de faire parler de lui quand les media l’ont oublié : le GCA (2S) Christophe Gomart, dans son ouvrage rédigé avec le journaliste Jean Guisnel, Soldat de l’ombre[8]. Mais de quelle « ombre » s’agit-il ? Car le livre – en même temps plaidoyer pro domo et geste glorifiant les forces spéciales (FS) – dénonce le mélange des genres, en particulier celui qui a présidé à la conception et la conduite de l’intervention de sauvetage en Somalie évoquée plus haut. Il jette ici et là des pierres dans le jardin de la DGSE, avant de lancer cette fois un gros pavé dans la mare en appelant une révision de la notion de clandestinité et une autre répartition des moyens et capacités entre le COS et le SA de la DGSE. Au profit du premier, bien entendu.
Ce livre a été très fortement charpenté (pour le moins… !) – si l’on excepte les témoignages et souvenirs personnels, ainsi que la narration des OPEX vécues par l’auteur – avec un rapport parlementaire paru en mai 2014 sous la plume des sénateurs Daniel Reiner, Jacques Gautier et Gérard Larcher, relatif au renforcement des forces spéciales françaises[9].
Que dit ce rapport (et donc le livre) ?
Conformément aux décisions prises alors au titre du Livre blanc de 2013 et de la loi de programmation militaire 2014-2019, il était indispensable de faire des efforts en faveur de cette composante de nos armées (en bref, + 1000 hommes). Les rapporteurs soulignaient surtout les insuffisances des décisions prises alors : les manques, les inadéquations entre les effets attendus et les capacités détenues, l’utopie de satisfaire aux objectifs annoncés. Entre autres moyens pour y remédier (nous renvoyons nos chers lecteurs au rapport lui-même pour les autres) – pour coller à notre propos – le pouvoir politique était enjoint à se poser la question du format du service action de la DGSE. Sans « déshabiller Pierre pour habiller Paul » (formule magique quelque peu hypocrite, dans la mesure où chacun comprend bien que c’est par là qu’il faudrait passer), mais en réfléchissant « de façon dépassionnée à la meilleure façon de conduire l’action clandestine » (sic).
Argument de choc dans cette proposition : l’ère du numérique sera fatale à la clandestinité, d’une part, et la maigreur des ressources oblige d’ores et déjà à faire des choix, d’autre part (le tout repris in extenso dans le livre de Ch. Gomart). Car si l’on veut bien regarder au-delà du rapport, sans boule de cristal quant à l’avenir du clandestin, c’est bien le partage de la maigre ressource qui pose problème. Il en va donc ainsi des moyens aériens dédiés aux deux composantes : COS/FS et SA/DGSE.
Avant tout un peu de sémantique
Qu’est-ce que l’opération spéciale ? On peut la définir, par défaut, par la devise du COS : « agir autrement ». C’est-à-dire rechercher l’avantage décisif qui va faire basculer le cours de la bataille, en utilisant à fond le renseignement, en agissant par la soudaineté de l’action, la ruse et l’imagination : « fulgurance, discrétion, faible empreinte », secret dans la préparation, discrétion dans l’exécution… ce que Christophe Gomart globalise par « sidération » de l’adversaire. Cela suppose des forces légères, d’une « faible empreinte » sur le terrain, très réactives, performantes car supérieurement entraînées et équipées de matériels de technologie avancée.
Qu’est-ce que l’opération clandestine ? Elle peut revêtir de nombreuses formes. Disons que cette notion regroupe toutes les actions que l’on ne puisse rattacher à l’Etat commanditaire, c’est-à-dire non revendiquées et non traçables (par exemple, une attaque cyber est une action clandestine : le « cyber-pirate » expérimenté ne laisse ni empreintes ni signature). Ses modalités doivent donc masquer totalement l’identité réelle du commanditaire et des acteurs. Le secret total est la « potion magique » qui doit garantir l’action clandestine.
Rendez-vous (ici au profit du SA) en plein désert : clandestin, conventionnel ou « spécial » ?
Et pour nous aviateurs, qu’en est-il des moyens affectés dans les deux cas ?
Les opérations spéciales tout d’abord. J’écarterai de mon propos la composante « hélicoptères » que l’armée de l’air met à la disposition du COS – l’escadron 1/67 « Pyrénées » (Cazaux) – dans la mesure où cette unité pleinement intégrée au COS, équipée de H225-M « Caracal », partage l’action spéciale avec sa mission principale « air » de recherche et sauvetage au combat (ReSCo), qui relève plutôt du « conventionnel ». Ainsi que le régiment hélicoptères (4e RHFS) que l’armée de Terre met à la disposition du COS. Nous laisserons à un spécialiste des « voilures tournantes » le soin de développer une autre fois un argumentaire plus ciblé. Le sujet le mérite, mais porte moins à ergotage.
Après la fondation du COS par Pierre Joxe en 1992 sur les enseignements de la Guerre du Golfe, le besoin d’une capacité d’aérotransport adaptée à la souplesse et la variété des modes opératoires – « hétérodoxes », le mot est de L. Louriou – des forces spéciales se fit rapidement jour. Chance : le tout premier chef d’état-major de ce nouveau commandement était alors un aviateur, « transporteur tactique » pur jus. Le regretté Jacques Saleün, qui commanda le GAM 056 de 1981 à 1983, fut l’âme et le penseur de ce tout nouvel outil de l’adaptation de nos forces à la manœuvre moderne, dès sa fondation. Il est à ce jour le seul aviateur à avoir commandé le COS.
Peut-être en raison de sa devise – « A l’aise partout » – le choix de l’unité se porta sur l’escadron de transport 3/61 « Poitou », basé à Orléans-Bricy. Son histoire se fond avec celle du transport aérien militaire français, porté sur les fonts baptismaux juste après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Créé à Lyon-Bron le 10 mai 45, le « Poitou » rejoignit un peu plus tard la 61e escadre de transport nouvellement formée, pour devenir groupe 3/61. L’unité participa ensuite à tous les engagements du transport aérien militaire (TAM) dans nos OPEX, rompue à toutes les tactiques et modes opératoires qui ont fait depuis l’image de marque du TAM. Pour l’anecdote, un C-160 du « Poitou » fut l’avion leader (F18 – FRAMM) de la formation (composée par ailleurs de C-130 « Hercules » Zaïrois) qui largua le 2e REP sur Kolwezi, le 19 mai 1978 (Opération « Bonite »). Nous engageons nos lecteurs qui veulent en savoir plus sur l’épopée de cet escadron – somme toute comparable à celle des unités sœurs – à se plonger dans la très achevée Saga du Transport Aérien Militaire d’Alain Bévillard[10] qui rend compte des très riches heures de cette composante de notre armée de l’air ces cinquante dernières années.
Que dire en général et en particulier du « Poitou » ? En général d’abord, qu’il se distingue depuis sa création par les compétences, le haut niveau opérationnel et la grande valeur militaire de ses personnels ? C’est fondé, mais tous les autres escadrons tactiques du TAM y ont droit également. Il faut donc approfondir ce propos pour le particulier, en ouvrant un autre volet, le récit de son intégration au sein des Forces Spéciales[11].
Dès 1993 le « Poitou » fut choisi pour accueillir une escadrille dédiée qui initialisa la part qu’allait prendre le TAM à l’action spéciale (EOS : Escadrille Opérations Spéciales): l’EOS participa d’emblée avec le COS à l’intervention « Turquoise » au Rwanda en 1994. En 95, cette escadrille quitta le « Poitou » pour devenir « Division » (DOS) au sein du Centre d’Instruction des Equipages du Transport alors basé à Toulouse-Francazal (CIET 00.340). Mais en 2006, elle retrouva le « Poitou » à Orléans-Bricy (les aviateurs aiment les déménagements !) qui fut à nouveau choisi par l’armée de l’air comme escadron « avion » dédié aux opérations spéciales. A partir de là, le 3/61 fut de tous les engagements des FS. Il est encore (plus pour longtemps, malheureusement) équipé du légendaire et irremplaçable C-160, mais aussi du C-130 H et, depuis 2010, de deux De Havilland légers, DHC-6 « Twin Otter ». Comme au GAM 056, celui-ci se démarquant toutefois par l’existence en son sein d’une composante « hélicoptères » depuis l’expérience de la Guerre d’Indochine.
En somme, premier grand constat : même vivier pour les équipages (transport aérien militaire), même progression professionnelle, mêmes moyens aériens.
Venons-en aux opérations clandestines de la DGSE. C’est nous l’avons dit le GAM 056 « Vaucluse » qui en est le vecteur aérien principal (mais pas unique) ; nous ne renverrons pas dans ce cas au travail de bénédictin d’Alain Bévillard[12], cette unité ayant à l’époque refusé de collaborer à son ouvrage[13]. Et ainsi que nous l’avons déjà mentionné, son activité opérationnelle est couverte par le secret exigé par son employeur.
Iconographie du GAM 056 : les moyens aériens mis en œuvre
Pour comprendre la proximité d’esprit et de travail des deux escadrons, dans son très bon ouvrage Commandos du ciel. Les pilotes de l’impossible. Escadron 3/61 Poitou[14], le journaliste spécialisé Jean-Marc Tanguy nous narre le chemin parcouru et la transformation de cette unité depuis son entrée dans l’univers de l’action spéciale. L’acquisition progressive de matériels performants, devenus spécialisés au fil des engagements en opérations, la numérisation galopante des équipements adaptés aux conditions d’emploi, l’amélioration et le développement des techniques de mise à terre (aéroportage et aérolargage) spécifiques, rappellent à votre serviteur le parcours engagé à la fin des années 80 par « la maison adverse », la « Vaucluse », près de 10 années auparavant. La généralisation de l’utilisation des dispositifs d’intensification de la lumière (jumelles de vision nocturne : JVN), du GPS, la transformation-adaptation de l’éclairage des cabines (avions et hélicoptères) liée à l’utilisation systématisée de ces équipements, l’emploi de l’optronique, tout cela peut avoir – à première vue, pour ce qui me concerne – dans cet ouvrage un air de « déjà vu ». La « Vaucluse » fut pionnière en la matière mais ces avancées ne pouvaient être divulguées, impératifs de discrétion imposées par le SA obligeant. Grâce à la réactivité d’une DGSE toujours à l’écoute de ceux qui cherchent les meilleurs moyens pour faciliter la mission, devant l’inertie de l’armée de l’air (en fait une certaine méfiance et un grain de condescendance de la part du CEAM de Mont-de-Marsan), le GAM dut « bricoler » et parfois se rapprocher du Service Technique de l’Armée de Terre (un comble pour une unité air), plus réactif, plus curieux de ces innovations dont il voyait l’intérêt pour ses propres usage et avantage. Bricolage donc, car pas question de présenter ces initiatives à la Mission pour le développement de l’innovation participative (MIP) du ministère de la défense – confidentialité oblige – ni s’astreindre à la pesante procédure de la Commission Centrale de Modification des Matériels Aériens de l’Armée de l’Air (C2M2A3). L’action n’attend pas et le secret s’impose.
Si l’on veut maintenant se pencher sur les techniques spécifiques, là aussi le « Poitou » redécouvrait des méthodes rodées et peaufinées par le GAM depuis des décennies, c’est-à-dire depuis la fin du second conflit mondial. Votre serviteur a retrouvé, dans la narration de l’équipage du Transall du « Poitou » qui fit l’ouverture du terrain de Mazâr-e Charîf le 6 décembre 2001 (frontière nord de l’Afghanistan avec l’Ouzbékistan) relatée dans l’ouvrage d’Alain Bévillard cité supra[15], des mécanisations, des sensations, des émotions tant de fois vécues au sein de la Vaucluse. Preuve s’il en est de la proximité cultures opérationnelles, des techniques, d’un entraînement exigeant et d’une certaine maîtrise de la tension psychologique partagée des deux côtés.
Second grand constat : grande proximité des expertises, des matériels spécifiques et des modes opératoires.
La « mascotte » (fictive ; elle n’existe qu’en dessin) du GAM 056
Que conclure ?
La problématique s’exprime en fait à deux niveaux : au plan politique et au plan des moyens.
Au plan politique : la temporalité décisionnelle de l’action est à la base fondamentalement différente. L’emploi d’une « manière forte » clandestine par l’autorité étatique n’est que l’ultima ratio (si je puis dire) d’un processus préparatoire et décisionnel qui peut être long, toujours compliqué. « La clandestinité est un iceberg dont la mission sur le terrain ne représente que la partie émergée[16] ». Ce n’est qu’en toute dernière extrémité que l’autorité suprême aura recours à ce moyen. D’où des préparations de mission délicates et ciselées, bien souvent soldées par un « no go », en langage d’aviateur. Ce qui, à la longue, peut devenir démotivant.
Par contre, les forces spéciales occupent de plus en plus le devant de la scène : leur succès ne se démentit pas. Du fait de leurs caractéristiques spectaculaires, elles plaisent aux media. De par leur faible empreinte et leur réactivité, elles plaisent aux politiques. Au plan stratégique, dans les forces occidentales, leur emploi se justifie de plus en plus dans les stratégies de type « entrée en premier ». De ce fait, leur équipement se complexifie et doit forcément leur permettre de s’intégrer au socle capacitant interarmées et interallié, de par l’importance prise par le renseignement de théâtre, opératif et tactique (car c’est une mission principale du COS), parallèlement à l’action. Ainsi le « Poitou » n’a eu de cesse d’améliorer le C4ISR[17] sur ses aéronefs, avec même la possibilité de les transformer en « bombardiers d’opportunité[18] ». Pour cet escadron, le défi n’est plus tant la discrétion que de ne pas être un facteur de retard dans l’accélération de plus en plus marquée de la boucle « OODA[19] ». L’illustration en fut fournie lors des premiers jours de l’opération « Serval » au Mali.
Au plan des moyens : dans les deux cas (clandestin et spécial), prépondérance en France d’une utilisation de moyens militaires, donc identifiables et traçables. Grande proximité dans le parc aérien (aux adaptations particulières à la mission près), et grande similarité également dans les techniques spécifiques employées. Le tout servi par une totale identité de compétence, de niveau opérationnel, de savoir-faire et de motivation des personnels. Alors, comme a dit Lénine, « que faire ? »
Au plan politique : la France s’est faite à coups d’épée, écrit Charles de Gaule dans La France et son armée[20]. Immuablement, depuis Brennus, les coups de glaive doivent être médités : c’est le choix politique. Alors ils peuvent soit être « sournois » et sous cape, c’est la clandestinité. Ou audacieux et fulgurants, c’est l’action spéciale. Enfin, planifiés, méthodiques et doctrinaux, c’est le « conventionnel ». Ce ne sont pas là que des modes opératoires, mais avant tout des choix politiques. En France, les autorités, on l’a dit, aiment les forces spéciales, mais pas la clandestinité, qu’ils ne comprennent pas, qui les effraie, car elle les oblige à assumer des responsabilités qui les dépassent parfois, et qu’ils ne sont pas forcément prêts à assumer (le syndrome du Rainbow Warrior). Ce sont aussi deux mondes au demeurant antinomiques, sauf lorsque le premier a besoin du second (la préparation de théâtre par exemple).
Au plan des moyens : les solutions pratiques existent. Elles ont déjà été analysées : regroupement des deux unités dans une même enceinte (la « marguerite 6 » à Evreux est vaste) avec une séparation des bâtiments hôtes (respect du cloisonnement de l’information). Passerelles entre les équipages qui pourraient détenir une double accréditation. Les matériels seraient maintenus en commun. La difficulté majeure serait l’éloignement du « Poitou » du commando parachutiste de l’air n°10 (CPA 10), autre composante des « Forces spéciales air », stationné à Orléans-Bricy. Est-ce rédhibitoire ? Le GAM 056 (Evreux) est déjà, lui, loin de Cercottes (Loiret) et des autres centres spécialisés du SA. Ou, vice-versa, à savoir regroupement de tout ce beau linge à Orléans ? De quoi faire phosphorer les états-majors.
En tout état de cause, il appartient d’abord à l’autorité politique de faire des choix : la clandestinité a-t-elle un avenir ou pas ?
[1] Pourquoi j’utilise ici le féminin ? Parce qu’à son origine, cette unité aérienne, créée le 1er mai 45, prit par I.M. le nom d’Escadrille de Liaisons Aériennes 1/56 ; en 1967, avec son transfert à Evreux, l’unité a été rebaptisée « Groupe ». Pourquoi ce nom de baptême Vaucluse ? Parce que c’est dans cette région que l’unité effectua ses missions les plus délicates dès sa création, avant, pendant et après le débarquement en Provence, qui lui ont valu en août 46 la Croix de Guerre avec étoile d’argent et citation à l’ordre de la D.A.
[2] Cet article a été initialement publié dans Le Piège, Revue des anciens élèves de l’Ecole de l’Air – n°244, avril 2021, p.48 : “De la Vaucluse au Poitou”.
[3] Du 4e Régiment d’Hélicoptères des Forces Spéciales (RHFS), composante aéromobile des opérations spéciales
[4] Le Piège est la revue trimestrielle de liaison de l’association des anciens élèves de l’Ecole de l’air ; n°234 (4e trimestre 2018, p.38) : « GAM 56, les passeurs du clair de lune », Ludovic Louriou
[5] N°413, avril 2004 & n°414, mai 2004 ; Paul Villatoux
[6] Raids Aviation n°3 – septembre-octobre 2012, article de J.M. Tanguy
[7] Le Piège n° 223 (1er trimestre 2016, p. 20) : « Missions spéciales ou adieu cul des vaches, adieu clairs de lune », Michel Masson
[8] Tallandier, 2020
[9] Rapport d’information des sénateurs Daniel REINER, Jacques GAUTIER et Gérard LARCHER sur « Le renforcement des forces spéciales françaises » du 13 mai 2014 (N°525 ; session ordinaire 2013-2014), disponible sur le site du Sénat : https://www.senat.fr/rap/r13-525/r13-5250.html
[10] L’Esprit du Livre Editions, 2007 (tome 1) et 2008 (tome 2)
[11] Le lecteur pourra pour ce faire se reporter à la Saga du TAM d’Alain Bévillard – op. laud. – mais aussi à l’article de L. Louriou, « Le nouveau POITOU », paru dans la revue de l’Association des Anciens du transport Aérien Militaire (TAM), ANTAM Info, n°36, mars 2008, p.9
[12] « La saga du TAM », opus laud.
[13] On peut approfondir en récupérant deux livraisons – n°413, avril 2004 & n°414, mai 2004 – de la revue Le fana de l’aviation, plutôt bien construits sur le sujet, mais datés ; de même dans le n°3 de Raids Aviation, septembre-octobre 2012, article de J.-M. Tanguy
[14] Editions JPO, décembre 2015. Préface d’André Lanata
[15] Dans le tome 2 de la Saga du TAM – op. laud. – récits respectifs des commandants Pépin de la DOS du CIET 00.340 et du regretté lieutenant-colonel Hufschmidt, pp. 308 à 318. On notera que Ch. Gomart dans son livre cité supra ne fait aucune mention de cet épisode à mettre pourtant au crédit du COS alors qu’aucun militaire français (hors DGSE) n’était à ce stade présent sur le théâtre afghan !! Honni soit qui mal y pense !
[16] Jean-Christophe NOTIN, Le maître du secret. Alexandre de Marenches, Légende des services secrets français, Tallandier, 2018, chap.15 « Feux rouges à l’est », p. 161
[17] Command, Control, Communications, Computers, Intelligence, Surveillance and Reconnaissance
[18] Cf. J.-M. Tanguy, op. cit.
[19] Observe, Orient, Decide, Act
[20] Plon, 1938. Phrase introductive au chap. 1 « Origines »