Les navires transitant par la mer Rouge font un nouvel usage de l’AIS pour parer aux attaques des Houthis
Alain CHARRET & Eric DENÉCÉ
Les conditions de navigation sont aujourd’hui particulièrement périlleuses en mer Rouge et dans le détroit de Bab al-Mandeb. En effet, depuis le début l’offensive israélienne contre la bande de Gaza, les Houthis, par solidarité avec les Palestiniens, ont décidé de cibler tous les navires appartenant à des intérêts israéliens ou faisant du commerce avec l’État hébreu transitant au large des côtes yéménites. L’US Navy a déclaré que plus de 100 drones et missiles ont été tirés contre des navires marchands dans la région et une analyse des cibles visées a permis de mettre en lumière un lien clair avec Israël. Les Houthis semblent utiliser Internet et consulter des bases de données pour identifier certaines de leurs cibles[1].
Dans ce contexte, les navires et leurs armateurs cherchent par tous les moyens à améliorer la sécurité. De nombreux bâtiments ont choisi de suspendre momentanément leur navigation dans la zone, d’autres éteignent leur transpondeur AIS à l’approche des côtes yéménites afin de limiter le risque d’être détecté par les Houthis, d’autres ont choisi une autre option : ils utilisent leur système d’identification automatique (AIS) comme moyen de communication pour s’adresser indirectement aux Houthis afin de parer à d’éventuelles attaques.
Normalement, l’AIS d’un navire est utilisé pour afficher des informations sur sa destination, sa direction et sa vitesse. Il est également parfois utilisé pour prévenir d’un danger. Il est ainsi fréquent de voir un bâtiment afficher la mention « NOT UNDER COMMAND » (navire en avarie moteur ou à la dérive) lorsqu’il rencontre un problème mécanique, afin d’avertir les autres bâtiments de ne pas s’approcher.
Dans le contexte actuel, les navires circulant en mer Rouge commencent à utiliser leur AIS pour communiquer indirectement avec les rebelles. Lorsque leur principale crainte est un abordage, ils affichent des messages indiquant « GARDES ARMÉS À BORD » afin de décourager les attaquants potentiels. Cette technique est utilisée depuis quelques années déjà par certains grands yachts naviguant dans des zones où sévissent des pirates.
Le site TankerTrackers.com révèle dans un récent post sur X (anciennement Twitter) qu’il a identifié un nouveau type de message affiché par certains navires ; en lieu et place du port de destination, ils annoncent n’avoir aucun lien avec Israël : « VSL NO CONTACT ISRAEL » (« Navire n’étant pas associé à Israël ».
Le navire Xin He Lu 1 navigant sous pavillon du Panama en est un bon exemple :
À noter que jusqu’à ce jour les navires usant de ce procédé transportent du fret préalablement chargé en Russie. Est-ce une coïncidence ?
[1] Selon d’autres sources un navire espion iranien présent dans la zone renseignerait les Houthis sur la position des navires ayant coupé leur AIS ?