Renseignement et pouvoir
Brigitte HENRI
Ancien Commissaire divisionnaire de la Police Nationale, Brigitte Henri est docteur en droit, et diplômée de criminalité organisée internationale. Elle a travaillé pendant près de 25 ans dans le renseignement et s’est notamment spécialisée, au sein de la Direction Centrale des Renseignements Généraux (DCRG) – où elle fut une collaboratrice directe d’Yves Bertrand – dans le domaine économique et financier. Elle a notamment enquêté sur les affaires de corruption qui ont défrayé la chronique au cours des années 1990 et 2000.
Elle quitte la Police en 2006 pour rejoindre le secteur privé et devient alors Directrice du contrôle des risques opérationnels et de la conformité bancaire, de la sécurité des systèmes d’information et du plan de continuité d’activité de la banque française BRED. Elle y poursuit ses actions de la lutte contre la délinquance financière et les fraudes internes et externes et y créé un pôle d’Intelligence économique.
Brigitte Henri est l’auteur de plusieurs ouvrages consacrés au renseignement, à l’intelligence économique, à la lutte contre la corruption et à la conformité, ainsi que d’un roman.
Peu d’hommes politiques français estiment que le renseignement soit décisif dans le choix de leurs orientations. Le renseignement n’est pas considéré comme un atout essentiel du pouvoir. Si le renseignement a pesé quelquefois sur les orientations, ou du moins sur les décisions politiques, cela n’a été que rarement, presque fortuitement et, en tout cas, dans un climat toujours empreint de suspicion. En 1967, par exemple, la section sociale des Renseignements Généraux avait titré une note confidentielle : « Les étudiants sur le chemin de la violence ; les éléments sont réunis pour créer une situation révolutionnaire ». Un an plus tard, faute d’avoir pris en compte cette information, le gouvernement se retrouvera pris au piège des événements…
Comme le disait très justement Jean-Louis Gergorin : « J’ai toujours considéré que la condescendance ironique avec laquelle la classe dirigeante française traite le monde du renseignement était à la fois injuste et néfaste. Injuste parce que de l’affaire Dreyfus à l’affaire Ben Barka, les politiques ont trop souvent reporté sur un métier honorable et patriotique des responsabilités qui étaient les leurs. Néfaste car bien des guerres et bien des souffrances auraient pu être évitées si nos espions avaient été écoutés[1]. »
La défiance du pouvoir vis-à-vis des services de renseignement
Au cours de leur existence, les Renseignements Généraux (RG) ont été plus ou moins marginalisés parce que suspectés d’être au service des uns et des autres avant d’être au service du pouvoir en tant qu’organe représentatif de l’État. Ils ont été perçus comme évoluant en marge de celui-ci et non pas en symbiose avec lui. Et les affaires qui les ont éclaboussés ont sans doute favorisé cette marginalisation.
Le pouvoir a souvent cherché aussi à noyauter les RG. C’était une façon pour lui de mieux les contrôler. Gilles Ménage, conseiller technique du Président François Mitterrand, avait ainsi demandé à Paul Roux, alors directeur central des RG, de s’affranchir de la voix hiérarchique – et en l’occurrence du directeur général de la Police nationale et du cabinet du ministre de l’Intérieur – pour lui adresser directement des notes sensibles émanant de son service afin de les remettre au Président. Paul Roux n’ayant pas entendu – ou voulu entendre – le message, a accru de ce fait la défiance de l’Élysée vis-à-vis de son métier.
Certains hommes politiques ont également cherché à utiliser les RG pour combattre leurs adversaires en faisant volontairement « fuiter » des informations mettant en cause ces derniers.
Le pouvoir a parfois pris ombrage de renseignements pouvant le mettre en difficulté. Comme le disait Yves Bertrand, « Dans le cas des RG, quand le Cabinet du ministre voit d’un mauvais œil une information que vous lui transmettez, il y a une chance sur deux pour qu’il vous désavoue[2]. »
Les hommes politiques n’ont pas, non plus, voulu tenir compte de certaines informations lui permettant de prendre des décisions opportunes. Je me rappelle avoir travaillé sur des malversations qui éclaboussaient Michel Gillibert. Devenu tétraplégique à la suite d’un accident d’hélicoptère, il avait fondé un mouvement de défense des grands accidentés de la vie et avait été à l’origine de la fondation de l’Institut de recherche sur la moelle épinière ; il avait également animé une émission sur Europe 1, « Vive la vie, aidons-les ». Ces diverses initiatives en faveur du handicap lui avait valu d’être décoré chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur en 1987. Un an plus tard, il avait été nommé secrétaire d’État aux personnes handicapées dans le gouvernement de Michel Rocard, fonction qu’il avait gardée dans les gouvernements d’Edith Cresson et de Pierre Bérégovoy, malgré les notes blanches des RG sur ses malversations financières. Il faudra attendre dix ans pour que cet homme politique soit condamné alors que le pouvoir était informé depuis 1992[3]…
Cherchant à se préserver, les services de renseignement, de leur côté, se sont parfois soumis plutôt que de montrer du doigt les décisions inopportunes, inadéquates ou irrationnelles du pouvoir. La fragilisation de celui-ci et le morcellement du renseignement ont renforcé la médiocrité de leurs relations. De son côté, le pouvoir n’a pas cherché, loin s’en faut, à informer les services de renseignement, sur ses besoins, ses ambitions ou ses stratégies. Il s’est refusé également à leur donner des orientations claires et à exercer un contrôle efficace.
« A la fin des années 1990, une fois passés les attentats de 1995 qui étaient liés à la situation algérienne, on est venu me dire que mon service coûtait cher et qu’il ne servait pas à grand-chose puisque rien ne se passait. Bercy rechignait à budgétiser les postes. A la DGSE, aujourd’hui, il doit y avoir 4 500 à 5 000 personnes, dont 1 000 qui font de l’administratif. Le problème n’est pas tant les effectifs que la qualité et l’utilisation des effectifs, comme à la DGSI. J’ajoute qu’à la gendarmerie, il y a 80 000 personnes qui, à une époque, quadrillaient le territoire et parlaient à tout le monde. On les a reconvertis en percepteurs d’impôts et en père fouettard sur le bord des routes, au lieu de créer un corps spécifique, une police des routes. Du coup, le maillage territorial du renseignement et la défense opérationnelle du territoire ont été affaiblis[4]. »
Parallèlement, le pouvoir n’a jamais réellement cherché à savoir comment fonctionnaient ses services de renseignement. « Il y a une réelle inexpérience de nos politiques sur ce qui est le renseignement. Début 2001, on m’a demandé de reconvertir une partie de mes effectifs antiterroristes sur l’immigration clandestine, à cause d’une affaire de cargo rempli de clandestins. Et puis, le 12 septembre, je devais doubler mes effectifs antiterroristes, comme si j’allais trouver 200 ou 300 spécialistes comme ça, du jour au lendemain… [5]»
Certains hommes politiques se sont aussi montrés ouvertement hostiles, non seulement aux RG, mais aussi à des policiers appartenant à cette direction, pour des raisons parfois très personnelles. Cela a été le cas de Nicolas Sarkozy qui nourrissait une réelle antipathie, voire une profonde défiance envers Yves Bertrand, patron des RG. Cela a été aussi le cas de certains ministres qui n’étaient pas exempts de reproches et qui n’aimaient pas voir les RG s’intéresser à leurs turpitudes. A cet égard, Alain Carignon[6] est un exemple parmi d’autres. Plusieurs notes blanches avaient en effet été rédigées sur les affaires financières faisant ou non l’objet d’une instruction judiciaire qui visaient le maire de Grenoble. A titre indicatif, l’une de ces notes blanches évoquait, en novembre 1991, « la possibilité de poursuites judiciaires » contre Guy Nacache, adjoint chargé des grands travaux d’Alain Carignon. Cet adjoint avait été arrêté à la frontière Suisse avec six cent mille francs de l’époque provenant d’un compte suisse. La mise en cause judiciaire du maire de Grenoble n’aura lieu que trois ans plus tard. En tout cas, cet élu politique une fois devenu ministre de la Communication, fera en sorte que le directeur départemental des RG de l’Isère, Paul Bourde, soit muté. Pour cela, il est intervenu à plusieurs reprises auprès de Charles Pasqua et du directeur général de la Police d’alors, Edouard Lacroix, et il avait même choisi un remplaçant qui lui était fidèle. « Nous avons pris cette affaire très au sérieux. Ce commissaire n’avait fait que son travail en avertissant sa direction des problèmes que risquait de rencontrer un homme politique important. Il n’était pas question d’accepter qu’il soit sanctionné. Cela aurait montré aux RG que le déroulement de leur carrière dépendait de leur soumission aux élus. Les RG avaient connu cela quinze ans plus tôt. Il n’était pas question que cela recommence[7]. » Le commissaire Bourde sera pourtant muté en janvier 1994, comme directeur départemental de la Police des Pyrénées-Atlantiques…
L’affaire de la MNEF sur laquelle j’ai travaillé longuement tant à Paris qu’à Grenoble lorsque j’étais directeur départemental des RG de l’Isère, m’a amenée à rédiger plusieurs notes blanches sur cette affaire alors que nous étions sous le gouvernement Jospin. Yves Bertrand le rappelle fort bien lorsqu’il évoque ces enquêtes : « Lorsqu’elle s’est mise à gratter sur la MNEF, cette mutuelle étudiante alors considérée comme la pouponnière du Parti socialiste, on m’a clairement fait savoir qu’elle devait ravaler sa curiosité. Les politiques ne supportent pas que l’on aille fouiller dans leurs poches[8]. »
La défiance des hommes politiques envers Les services de renseignements les a aussi conduits à commettre des erreurs. Les attentats du 13 novembre 2015 à Paris les ont malheureusement mises en exergue, selon d’anciens responsables des services de renseignement. Pour Alain Chouet, la France « est en guerre. Elle s’y trouve, non pas parce qu’elle a rompu avec la politique de non-ingérence du président Chirac, mais parce qu’elle s’est mis en tête avec arrogance de donner des leçons de démocratie aux autres, de choisir ou rejeter leurs dirigeants, de les juger et – paradoxalement – de s’allier pour des raisons d’intérêt mercantile avec ceux-là mêmes qui sont à l’origine de l’expansion du phénomène salafiste en vue de rejeter toute forme d’évolution démocratique ou de pluralisme dans le monde arabe. C’est une ambiguïté dont nous payons aujourd’hui le prix[9] ».
Bernard Squarcini, a aussi, sur un autre plan, reproché aux autorités politiques leur passivité dans la gestion de la lutte antiterroriste : « Il y a déjà deux ans, les services syriens m’avaient effectivement proposé une liste des Français combattant en Syrie. J’en avais parlé à mon ancien service qui en a rendu compte à Manuel Valls. La condition des Syriens était que la France accepte de coopérer à nouveau avec leurs services de renseignement. On m’a opposé un refus pour des raisons idéologiques. C’est dommage car la proposition était une bonne amorce pour renouer nos relations et surtout, pour connaître, identifier et surveiller tous ces Français qui transitent entre notre pays et la Syrie. Résultat : on ne sait rien d’eux et on perd beaucoup de temps en demandant des informations aux agences allemandes, qui sont toujours restées sur place, mais aussi jordaniennes, russes, américaines et turques. On n’est absolument plus dans le concret [10]».
Cette conclusion recoupe avec le constat fait par l’ex-patron de la DST, Yves Bonnet : « La France n’a pas à s’immiscer dans les affaires des autres pays, comme nous l’avons fait en Libye. Elle doit, par contre, bien choisir ses partenaires et ses amis. Or, il est établi chez tous les hommes de renseignement qu’une entraide entre tous les services secrets du monde (donc y compris syriens) est de mise dans la lutte antiterroriste, nonobstant les positions politiques ou idéologiques des régimes en place[11]. »
Heureusement, certains hommes politiques se sont préoccupés des services de renseignement, tels Pierre Joxe ou Paul Quilès qui nourrissait une passion pour le renseignement et l’intelligence économique, ou encore Jean-Pierre Chevènement. Il faut aussi mentionner Michel Rocard qui n’a pas hésité à écrire : « Le renseignement est trop souvent perçu dans notre pays comme une contrainte et non comme l’instrument nécessaire au développement de la richesse du pays et à son ambition dans un monde où la France doit affronter une diversité croissante de menaces terroristes ou économiques[12]. »
Toutefois, les passerelles qui auraient dû exister entre les secteurs politiques, militaires, économiques et culturels n’ont jamais vraiment vu le jour. Les stratégies actives à partir du renseignement n’ont jamais été intégrées dans la culture française. Elles ont été essentiellement analysées sur un plan défensif, en tant que danger venant des autres. Le pouvoir a toujours eu une perception trop passive du renseignement et une trop grande propension à entretenir encore le goût du secret, dans une société où la culture individuelle et collective de l’information est moins développée qu’en Grande-Bretagne, en Allemagne, aux Etats-Unis ou au Japon.
Cette absence de culture du renseignement a constitué un handicap majeur. Le renseignement en France n’a jamais représenté, et de loin, une culture « de masse ». En dehors du cas japonais, la mise en place d’une stratégie de renseignement a longtemps été une spécificité anglo-saxonne et surtout allemande où la capacité à défendre ou conquérir des positions nationales fortes s’est appuyée sur le renseignement.
Les hommes politiques aiment depuis toujours, et c’est humain, que l’opinion publique reconnaisse et évalue leurs réussites. Or, les écueils évités, les mesures judicieuses prises ou les économies réalisées grâce aux services de renseignement sont difficiles voire impossibles à quantifier.
A contrario, les services n’ont pas toujours appréhendé les évènements majeurs de la vie sociale et politique. Les deux guerres mondiales, l’effondrement du bloc soviétique, l’invasion du Koweit, la crise financière asiatique en sont autant d’exemples. Bien sûr, le renseignement ne se réduit pas à une boule de cristal dans laquelle il est possible de lire l’avenir.
Il est vrai que les stratégies à court terme des hommes politiques n’ont pas favorisé non plus la capacité d’analyse opérationnelle des services. Perçu comme une activité réservée aux spécialistes, le renseignement en France est donc resté cloisonné. L’organisation extrêmement compartimentée de la DCRI puis de la DGSI et son absence de concertation avec le SDIG, par exemple, ont été un frein à l’efficacité et une cause de démobilisation des fonctionnaires. Ceci a entraîné un défaut de coordination, un gaspillage de temps et, plus grave peut-être, un climat malsain de méfiance, voire de suspicion.
La sclérose du renseignement
La sclérose du renseignement n’est pas un fait nouveau et touche tous les services. Pierre Marion, lui-même, n’hésitait pas, lorsqu’il prit la tête du SDECE en 1981, à stigmatiser « la marginalisation » des services français de renseignement. Quelques années plus tard, en 1996, la présidente du bulletin de l’association d’entraide de la DGSE, L’Echauguette, adressait ces mots au directeur général de la DGSE, Jacques Dewatre : « Tout d’abord, je suis frappée par un phénomène qui s’est aggravé ces dernières années. Chacun, à titre individuel, chaque cellule, chaque section, chaque service, chaque direction sont l’objet d’un dénigrement systématique par les autres et réciproquement, comme pour se valoriser eux-mêmes. Quel gâchis de temps et d’énergie alors qu’il y a tant de personnes de grande qualité, de grande compétence, de grand enthousiasme dans cette maison. Peut-être faudrait-il prendre le temps de se connaître, de se confronter et de s’estimer (…). Je suis frappée par le discours de certains échelons hiérarchiques qui prétendent ne pas avoir le temps de communiquer, si ce n’est par un entretien annuel avec le personnel. C’est, pour moi, un discours irrecevable à l’heure actuelle (…). Il faudra bien, comme cela se fait dans les grandes administrations, dans d’autres services, détecter, préparer et former des hommes et des femmes de notre maison, avec ce savoir-faire spécifique à diriger, c’est-à-dire à motiver et animer une cellule, un service et, pourquoi pas, est-ce si inconcevable ?, une direction (…). Le système vise parfois à paralyser l’initiative, à ne pas trop responsabiliser le personnel, à entretenir même une certaine peur de la hiérarchie, à refuser le dialogue [13]».
Or, le cloisonnement doit être appliqué, de façon très limitée, à des affaires particulièrement sensibles. Le traitement moderne du renseignement doit être de plus en plus fondé sur l’échange de renseignements entre services. Celui-ci avait été mis en œuvre, certes de façon embryonnaire et limitée aux services policiers, par le ministre de l’Intérieur Raymond Marcellin : « J’assure moi-même la coordination à mon échelon de l’information collectée sur les mouvements extrémistes, leur implantation, leurs effectifs, leurs intentions et leurs projets (…). C’est le rôle du ministre de l’Intérieur d’animer et d’orienter journellement l’action des responsables et des services dans leur tâche de défense de l’État [14]».Le 14 novembre 1968, celui-ci avait supervisé la création d’un « bureau de liaison » entre toutes les directions de la police, chargé de centraliser les informations sur les menées subversives. Véritable service centralisateur du renseignement, ce bureau, auquel participaient les RG, la DST, la PJ et la gendarmerie, se réunissait chaque semaine.
Face à l’évolution des formes de pouvoirs, les services spécialisés doivent nécessairement s’adapter. L’État n’est plus apte à gérer les crises nées de leurs activités en raison, principalement, de la faiblesse du pouvoir politique et de la montée en puissance des médias et des groupes d’influence. Le prestige des institutions publiques et politiques ne cesse de se dégrader : l’enseignement, la défense, la police, la justice, les énarques, les hommes politiques, tous sont pris dans cette tourmente. Parallèlement, cependant, le respect de la personne et des libertés individuelles n’a jamais été autant revendiqué.
Lors d’une table ronde sur le thème « Pour une adaptation du renseignement français ? » organisée au Sénat en septembre 1996, plusieurs spécialistes avaient déjà souligné la carence traditionnelle de la culture du renseignement français et avaient suggéré de mieux intégrer le renseignement – à savoir l’ensemble des activités de recherches d’information à caractère diplomatique, politique, économique ou technologique – dans le processus de décision au plus haut niveau de l’État. Ces suggestions n’ont guère dépassé, à l’époque, les bancs du Sénat…
Pourtant, la création de l’Institut des Hautes études de la Sécurité intérieure (IHESI), en 1989, aurait pu être considérée comme un premier pas vers une meilleure prise en compte du renseignement. Cet Institut avait pour objectif de stimuler les recherches sur la sécurité et de sensibiliser les décideurs à ces questions. Outre des fonctionnaires de police, des responsables économiques figuraient au nombre des inscrits. Par ailleurs, des universités dispensent des Masters et des MBA sur le thème du renseignement.
Une culture collective du renseignement doit s’appuyer sur des règles déontologiques. Or, jusque dans les années soixante-dix, les activités des services de renseignements publics, sont restés extrêmement confidentielles. Les sociétés de renseignement privées se comptent encore sur les doigts de la main et sont bien souvent tenues par les premiers. La déontologie n’a alors aucune assise concrète et personne ne songe à lui en donner une. Il est vrai que pendant ces années, les discours politiques n’ont fait aucune référence aux valeurs morales, tant dans leur principe que dans leur mise en œuvre, fidèles en cela à l’histoire. Faut-il rappeler les conseils de Talleyrand à Bonaparte : « Pour nous, morale et légalité ne comptent pas. Nous sommes au-dessus de cela. Pour nous, la vie ne compte pas ».
Il faut attendre le début des années quatre-vingt-dix, pour voir les mentalités évoluer. Le remplacement du Conseil supérieur de l’activité de la Police nationale[15] par un Haut conseil de déontologie de la Police nationale[16], puis la création du Commission nationale de la déontologie de la sécurité[17], ont amélioré la réflexion sur les règles de déontologie policière. En octobre 1993, Yves Bertrand avait donné une place importante à la déontologie dans son « plan de relance » des RG. Une inspection technique interne avait été alors mise en place, chargée de veiller à la bonne utilisation des moyens fermés dans la lutte contre le terrorisme et la « prévention à l’égard des groupes à risques ».
Comme le préconisait, en 1995, Yves Bonnet, ancien directeur de la DST, il serait indispensable de créer une structure unique et permanente basée sur la déontologie du secret, qui serait composée d’agents de renseignement et de fonctionnaires de police judiciaire, les premiers prenant à tous les niveaux le pas sur les seconds. Pour l’ancien directeur de la DST, cette structure, qu’il appliquait essentiellement à la lutte contre le terrorisme, devait avoir pour objectifs de « connaître l’état des menaces, des intérêts contradictoires aux nôtres, des moyens de l’adversaire et de ses réseaux » et de permettre, « en amont, d’éviter les catastrophes ». Pour lui, « la volonté politique d’un Etat à lutter contre le terrorisme se mesure à l’investissement qu’il est prêt à faire dans ses services de renseignement et aux résultats qu’il obtient essentiellement par la paix maintenue ».
Le contrôle du renseignement
Le renseignement doit être soumis régulièrement à un contrôle parlementaire. Jacques Fournet, ancien directeur des RG, avait évoqué en 1996 la nécessité de ce contrôle pour les deux anciens services de renseignement, RG et DST, dépendant du ministère de l’Intérieur. Pierre Marion et Alexandre de Marenches encouragèrent la création d’un Conseil national de sécurité, dirigé par un directeur du renseignement, le seul, selon eux, permettant de limiter les dérives du renseignement ainsi que sa parcellisation.
Le système américain a également eu ses partisans. Rappelons que le contrôle des services de renseignement est exercé aux Etats-Unis par le Congrès et repose sur le principe suivant : « les organes de renseignement effectuent leurs missions en accord avec les principes de la Constitution ». Stansfield Turner, directeur de la CIA sous Jimmy Carter affirmait d’ailleurs que le contrôle exercé par le Congrès garantissait la crédibilité de la CIA et légitimait son action. Pour lui, l’absence de contrôle ou un contrôle insuffisant était la porte ouverte aux opérations douteuses et constituait le pire ennemi du renseignement.
A part quelques-uns – par exemple Julien Dray[18] qui avait, en 2004, interpellé Nicolas Sarkozy afin qu’il y ait un contrôle parlementaire concernant le renseignement – les députés français ne cherchèrent pas à contrôler le renseignement, préférant laisser au pouvoir politique la gestion, à la fois de ses succès et de ses… dérives. Ce n’est que très récemment que certains hommes politiques ont relancé le débat et permis l’adoption de la loi sur le renseignement.
Il est en effet indispensable que le pouvoir contrôle efficacement le renseignement mais sache aussi le respecter pour ce qu’il est, une arme nécessaire dans certains cas, un outil indispensable dans tous les cas.
Les réflexions de Jacques Harstrich sont, à cet égard, éloquentes : « Vingt ans de carrière au sein des RG m’ont permis de mesurer le degré d’hypocrisie du pouvoir en matière d’enquêtes réservées ou d’affaires délicates. Combien de responsables politiques ou administratifs désireux d’obtenir des informations pour le compte du gouvernement ou de certaines personnalités s’intéressent à la manière dont les RG les recueillent ? Je sais des directeurs des RG prêts à bien des choses pour satisfaire leur ministre (…) Ils veulent la fin sans entendre parler des moyens. Pourtant, ils savent la façon dont nous opérons : filatures, perquisitions plus ou moins clandestines, écoutes sauvages ou non, interception de courrier. Il n’y a pas trente-six manières de mener à bien une enquête (…). Mais plus le temps passe et moins ma hiérarchie semble capable d’assumer, à défaut de revendiquer, des procédés pourtant nécessaires[19] ».
Le pouvoir use et abuse aussi, parfois, des services de renseignement sans réel contrôle. Faut-il craindre que tout soit possible à moyen terme ? « Dans cinq ans, ou plus tôt, ou plus tard (…). En période de crise, quelques hommes, disposant d’une information secrète, non contrôlée et utilisable de diverses façons, deviennent un centre de pouvoir. Et la menace n’est pas seulement dirigée contre la gauche et l’extrême-gauche[20] » L’utilisation que le pouvoir a fait de certains renseignements est là pour le rappeler.
Les sondages RG sont un exemple parmi d’autres de cette utilisation dévoyée du renseignement. « Il existe aussi une utilisation cynique des sondages RG, considérés alors comme une arme politique. Dans ce domaine, la noix d’honneur revient à Charles Pasqua, dont les services n’ont pas hésité à laisser filtrer, via un journaliste d’Europe 1, quelques chiffres confidentiels favorables au candidat RPR lors de l’élection de 1988. Le ministre de l’Intérieur lui-même n’a pas pu s’empêcher d’utiliser de façon allusive ces sondages RG[21] ». Il faut rappeler que Charles Pasqua, invité par Antenne 2[22], avait évoqué un sondage RG qui donnait Jacques Chirac favori. Or, le lendemain, le journaliste Charles Villeneuve évoquait, sur Europe 1, le résultat des sondages effectués du 29 février au 2 mars. François Mitterrand arrivait en tête avec 34% des voix. La publication de ces chiffres, contraires à ceux des instituts de sondage privés, avait provoqué un véritable tollé. Un ancien fonctionnaire de la section politique des RG avait alors expliqué : « C’est un faux procès. Les chiffres divulgués sur Europe 1 étaient bien ceux auxquels nous étions parvenus. Nous avions d’ailleurs déjà placé Chirac en tête à la fin janvier (…). En ce qui concerne François Mitterrand, il n’avait pas encore annoncé s’il serait candidat ou non et cela rendait réticent dans ses réponses l’électorat de gauche. Dès qu’il a annoncé qu’il se présentait, les chiffres se sont inversés en sa faveur et nous l’avons alors écrit. [23] »
L’utilisation politique des sondages RG n’est pas nouvelle. En 1981, ce ne sont pas les chiffres recueillis par les RG qui seront transmis au Président de la République et qui le donnent perdant. La manipulation des chiffres a été faite à un niveau élevé où le pouvoir politique ne pouvait être absent.
Le débat parlementaire sur le renseignement intérieur qui avait été annoncé par Pierre Joxe n’a pas eu lieu, alors que nombre de RG souhaitaient que des hommes politiques prennent enfin leur responsabilité en la matière et déterminent clairement ce qu’ils attendaient d’eux. La Fédération autonome des syndicats de Police (FASP), classée à gauche et majoritaire chez les policiers en tenue, avait elle-même organisée le 10 avril 1991 les « Assises du renseignement », invitant les commissaires et inspecteurs des RG et de la DST à débattre de leurs problèmes. « Être affecté dans un service de renseignement, quel que soit son grade, c’est un métier, honorable et respectable. Un État démocratique a des règles intangibles, c’est pourquoi le contenu des missions ne peut être flou, pour la garantie des citoyens comme du fonctionnaire lui-même[24] » L’absence de directives claires a amené les participants à ces Assises à s’interroger sur le sens de leur mission et sur leur marge de manœuvre. Une question à cet égard avait été significative :
« A quel moment les RG qui travaillent sans contrôle de la Justice doivent-ils se dessaisir au profit de la PJ ?
– En dehors de la surveillance des jeux de hasard et du terrorisme, nous n’avons pas vocation à faire du judiciaire ; ce serait même un danger pour la démocratie, répond un policier en poste dans la région Rhône-Alpes. Avant, on passait des infos brutes de décoffrage aux collègues de la PJ ou de la gendarmerie. Ensuite, on a décidé de recouper, de vérifier nos tuyaux pour transmettre des infos affinées, immédiatement exploitables par eux.
– Quelle est l’étendue de nos missions ?, avait interrogé un autre inspecteur.
– Infinie, avait répondu un de ses collègues de la Direction centrale des RG. Je peux être amené, dans la même journée, à rédiger une note sur la situation d’une municipalité et à trouver d’urgence le numéro de téléphone privé d’un journaliste. Tout cela en ignorant le destinataire et le but de la question. (…)
– Un jour, mon préfet a reçu à dîner l’ambassadeur d’Allemagne en France. Il a fallu, entre 19h00 et 21h00, lui préparer une étude complète sur la communauté allemande du département, histoire de lui permettre de meubler la conversation ! [25]»
La conclusion de la FASP avait été intéressante et combien pertinente : « A quoi servent les Renseignements Généraux ? A tout ! Service SVP du gouvernement ou porte-serviettes des préfets, les missions traditionnelles des RG sont perverties par leurs utilisateurs (…). La modernisation des services de Police ne passe pas seulement par une augmentation du parc informatique, mais aussi par un changement de mentalité chez ceux qui les utilisent. »
Le Livre blanc de 2008 a fait, plusieurs années plus tard, du renseignement et de la cyberdéfense une priorité nationale. Mais la Délégation parlementaire au renseignement (DPR) créée un an plus tôt[26], composée à parité de députés et de sénateurs[27], chargée du suivi des services de renseignement, n’a pas vraiment rempli sa mission. Le principal apport de cette délégation a été « de permettre à une fragile confiance de s’instaurer entre les services de renseignement et la représentation nationale[28]. » Mais, pour autant, « les nombreuses crises qui, ces dernières années ont secoué les services de renseignement, n’ont nullement incité à sortir la DPR de son silence[29]. » Son rapport de 2011 était d’ailleurs laconique. La Délégation, pour en cacher la pauvreté, avait rappelé dans son introduction que l’ensemble de ses travaux était couvert par le secret de la défense nationale… Même si plusieurs points importants ont été évoqués dans le rapport de 2012, qui lui fait une vingtaine de pages, ils n’ont pas été, toutefois, davantage approfondis. En effet, si ce rapport a survolé d’un bref constat les situations au Sahel, en Somalie et en Syrie, il a évoqué malgré tout les menaces liées aux cyberattaques et a préconisé un nécessaire rapprochement entre les services (DCRI à l’époque et SDIG) à la suite de l’affaire Merah. Dans le cadre de la loi de programmation militaire de 2013, la DPR a vocation à exercer « le contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement en matière de renseignement et évalue la politique publique en ce domaine. »
Par ailleurs, il n’existait pas, jusqu’à une époque récente, de contrôle interne en dehors de celui exercé par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), pour les écoutes et la consultation des données de connexions. Les autres moyens d’investigation utilisés tels que les effractions, les infiltrations, les sonorisations… n’étaient pas véritablement encadrés. Pourtant, comme l’énonçaient si justement les membres de la mission parlementaire, « le contrôle est la nécessaire contrepartie du secret » !
La comparaison avec le contrôle des services de renseignement étrangers n’est guère flatteuse pour la France. Le Canada et la Belgique ont un service de surveillance autonome ; les Etats-Unis, l’Allemagne et Israël ont accordé aux parlementaires un large pouvoir de contrôle et de surveillance. Le Congrès américain contrôle même les opérations en cours de leurs services secrets avant de débloquer les fonds. La Grande-Bretagne a un Comité composé de parlementaires, rattachés au Premier ministre et ses rapports ne font pas moins de cent cinquante pages qui relatent sans complaisance les insuffisances de ses services…
Pour combler ce retard français, la loi de programmation militaire 2014-2019[30] avait annoncé enfin une amélioration de la gouvernance du renseignement, avec des moyens du Parlement renforcés et une Délégation parlementaire au renseignement confortée chargée du « contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement en matière de renseignement » et de l’évaluation de la politique publique en ce domaine.
Ce document fixait quatre orientations : la « mutualisation des moyens » entre les services, le « renforcement de la gouvernance », un « effort particulier en faveur du renseignement intérieur » et « un effort d’investissement majeur ». Les services allaient pouvoir recruter des personnels supplémentaires et acquérir de nouveaux matériels.
La mutualisation des moyens au sein d’une communauté du renseignement est un vrai défi car les services sont encore trop cloisonnés, peu disposés à partager des moyens techniques, financiers, voire humains. Ils sont encore moins disposés à échanger des renseignements entre eux sur des actions de surveillance, même si des progrès ont été faits en ce domaine dans la lutte engagée contre le terrorisme.
En ce qui concerne les moyens humains affectés au renseignement, Jean-Yves Le Drian rappelait en 2014 qu’il y a « près de 13 000 agents opérant au sein des services » de renseignement répartis dans trois ministères[31] et que « 800 millions d’euros sont consacrés chaque année à l’équipement des services[32] ».
Malgré tout, le renseignement qu’il soit militaire ou civil, reste encore le parent pauvre. Cette « question (…) est une rengaine vieille de trente ans. La France dispose, tant au niveau du budget que des effectifs, du plus faible arsenal des grandes et moyennes puissances en comparaison de l’Allemagne, du Royaume-Uni, et bien sûr des géants comme la Russie ou les Etats-Unis. Les différents politiques depuis De Gaulle, qu’ils soient de droite ou de gauche, ont toujours considérés que le renseignement n’était pas une priorité, et l’on peut à ce titre saluer les performances de nos services qui sont tout sauf médiocres par rapport aux moyens modérés qui leur sont attribués[33]. »
Il faut attendre le rapport[34], rendu public le mardi 14 mai 2013, du député PS Jean-Jacques Urvoas, pour que le renseignement entre véritablement au cœur des débats politiques. Basé sur l’audition d’anciens ministres et de dizaines d’agents du renseignement, Jean-Jacques Urvoas et les quatorze députés-rapporteurs, de toute obédience politique, ont travaillé pendant sept mois sur les services de renseignement. Outre les critiques concernant le traitement de l’affaire Merah, les constats relevés ont été sans appel et rappellent ceux qui avaient déjà été soulignés les années antérieures.
Dès les premières pages, les rapporteurs estimaient que le renseignement, caractérisé par son « activité secrète par essence et par nécessité, continue de s’inscrire dans un environnement (…) extraordinairement flou (…). Vivant au rythme des crises qu’ils suscitent ou subissent, les services travaillent au profit de la République dans les limbes du droit et des exigences démocratiques. Or plus les années passent et plus le retard accusé par la France dans ce domaine paraît indéfendable et nuisible. »
Le rapport passait ensuite en revue les failles jugées importantes du renseignement. « Faute de textes législatifs adaptés à certaines de leurs activités, [les services de renseignement] sont parfois contraints d’agir en dehors de tout cadre juridique ». Une aberration pour les agents qui, lorsqu’ils interceptent des communications, insonorisent des lieux, localisent un téléphone portable ou un véhicule, tombent, en fait, sous le coup de la loi ! « Le cadre juridique s’avère brouillon, fruit d’un processus de sédimentation que nul n’a souhaité rationaliser en raison du secret qui entoure cette activité. Sans pour autant rompre avec la culture du secret, il est impératif de mieux encadrer les activités du Renseignement. »
Les rapporteurs soulignaient également la pauvreté des moyens d’actions dont disposaient les services de renseignement. Les agents, en dehors des interceptions de sécurité, des réquisitions de données techniques de connexion[35] ainsi que de l’usage restreint de fichiers [36], ne peuvent recourir aux autres moyens exploitables, « sous peine d’être frappés d’illégalité ».
S’il est un domaine où la défiance du pouvoir envers les services de renseignement est flagrante, c’est bien celui des fichiers. L’absence d’interconnexion de ceux-ci, voulue jusqu’alors par les hommes politiques, traduit cette défiance vis-à-vis des services de renseignement, soupçonnés d’utiliser ces fichiers de façon déloyale.
Cela met également en lumière le décalage qui peut exister entre l’exigence de sécurité et celle de liberté. Dans un monde mouvant, menaçant à bien des égards, l’hypocrisie politique ne devrait plus être de mise. Il est aujourd’hui nécessaire, pour ne pas dire indispensable, de donner aux différents services de renseignement les moyens de travailler et, notamment, de pouvoir croiser des fichiers policiers et financiers, dans le respect du droit, sans susciter une levée de boucliers. Nos libertés dépendent justement de notre capacité à admettre que nous vivons dans un monde dangereux.
Encore trop de responsables politiques ou administratifs pensent que le fait d’élargir les moyens de lutte contre les diverses menaces qui nous entourent, notamment le terrorisme, est de facto suspect car attentatoire aux libertés. A cet égard, le fait d’avoir décrété l’état d’urgence après les attentats du 13 novembre 2015 a provoqué une réaction que l’on peut qualifier de choquante du Syndicat de la magistrature[37] qui indiquait dans un communiqué de presse : « L’état d’urgence modifie dangereusement la nature et l’étendue des pouvoirs de police des autorités administratives. Des interdictions et des restrictions aux libertés individuelles et collectives habituellement encadrées, examinées et justifiées une à une deviennent possibles par principe, sans autre motivation que celle, générale, de l’état d’urgence. Des perquisitions peuvent être ordonnées par l’autorité préfectorale, sans établir de lien avec une infraction pénale et sans contrôle de l’autorité judiciaire, qui en sera seulement informée. Il en va de même des assignations à résidence décidées dans ce cadre flou du risque de trouble à l’ordre public. Quant au juge administratif, il est réduit à peau de chagrin.
« La France a tout à perdre à cette suspension – même temporaire – de l’état de droit ».
« Lutter contre le terrorisme, c’est d’abord protéger nos libertés et nos institutions démocratiques en refusant de céder à la peur et à la spirale guerrière. Et rappeler que l’état de droit n’est pas l’État impuissant. »
C’est oublier que la lutte contre le terrorisme nécessite des moyens exceptionnels car ceux qui fomentent ces attentats sont justement dans une logique guerrière ; c’est aussi faire fi non seulement des 130 morts du 13 novembre 2015 mais également de tous ceux qui ont été tués dans des attentats ; c’est enfin occulter le fait que la protection des libertés et de nos institutions démocratiques est fragilisée, non pas par l’état d’urgence, mais par ces actions terroristes. Ce communiqué traduit bien la défiance qu’éprouvent certains idéologues envers la police.
Le syndicat des commissaires de la police nationale s’est d’ailleurs insurgé contre de tels écrits en répondant notamment au syndicat de la magistrature : « Nous préférons – et l’écrasante majorité des habitants de nos quartiers et villages avec nous – un risque mesuré, encadré et temporaire d’ « arbitraire administratif » à une dictature de juges aveugles (il faut l’être pour porter des préoccupations aussi décalées le jour même où nombre des perquisitions diligentées en application de l’état d’urgence ont amené à la découverte d’armes de guerre et d’explosifs !) [38]».
Le rapport 2012 de la Délégation parlementaire au renseignement avait estimé que « La France [devait] se doter des moyens permettant de suivre les déplacements de personnes par voie aérienne vers des destinations sensibles, y compris lorsque les trajets comportent une ou deux escales. »
Le besoin d’un « cadre juridique applicable aux services de renseignement » n’a pas provoqué l’enthousiasme à la Défense et à l’Intérieur. Malgré tout, la nouvelle loi sur le renseignement a été votée[39] après diverses controverses. En effet, Malgré les modifications qui ont été portées sur le texte d’origine, certains points ont été source de polémiques, notamment le fait que le Premier ministre se positionne comme seul décisionnaire et qu’il peut passer outre l’avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), en motivant sa décision.
Une pétition signée par plus de 119 000 Français avait été remise au Premier ministre[40], Manuel Valls, pour demander le retrait du projet de loi relatif au renseignement. Ses auteurs, Katerina Ryzhakova et Thomas Guénolé, co-fondateurs du cabinet de conseil en communication Vox Politica, se décrivaient en préambule de leur pétition comme des « habitants ordinaires de la France », qui « refusent simplement de vivre dans un État policier numérique » et rejettent « le chantage à la menace terroriste érigé en argument d’autorité anti-libertés. Nous refusons de légaliser le droit pour les services secrets de lire tout courriel, d’écouter toute conversation téléphonique, de lire tout SMS, de mettre tout espace privé sur écoute[41] ». Le texte avait provoqué également l’ire des associations de défense des libertés, de La Quadrature du net à Reporters sans frontières, en passant par Amnesty International et des syndicats. Pour elles, la loi revenait à « légaliser une NSA à la française ». Une autre pétition, signée par plus de 800 acteurs du numérique et intitulée « Ni pigeons, ni espions », allait d’ailleurs dans le même sens en dénonçant « la surveillance généralisée d’Internet ».
Les critiques étaient aussi venues de l’étranger, d’Allemagne notamment et des Etats-Unis où le New York Timesdémontait le projet de loi français sur le renseignement dans un éditorial intitulé « The French surveillance state ». Ce qui n’était pas sans saveur, venant des Américains qui écoutent illégalement et sans retenue les chefs d’État étrangers !
La loi a fait aussi l’objet de trois recours[42], par le président de la République, par le président du Sénat et par au moins soixante députés. Le Conseil constitutionnel a jugé le texte conforme à la Constitution à l’exception de trois dispositions[43]. Tout d’abord, l’article sur la surveillance internationale a été censuré. « En ne définissant dans la loi ni les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés en application de cet article, ni celles du contrôle par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de la légalité des autorisations délivrées en application de ce même article et de leurs conditions de mise en œuvre, le législateur n’a pas déterminé les règles concernant les garanties fondamentales accordées au citoyen pour l’exercice des libertés publiques. »
De même, le Conseil a censuré la disposition permettant aux services de renseignement, en cas d’urgence opérationnelle, de déroger à l’autorité du Premier ministre et de se passer de l’avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), considérant que cette disposition portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances. Le troisième article censuré était, selon le conseil, mineur, et concernait le contrôle des comptes de la CNCTR qui relève du domaine réservé de la loi de finances.
Notons que le Conseil Constitutionnel n’a rien trouvé à redire sur un article de cette loi qui a suscité le plus de polémiques, celui donnant la possibilité pour le gouvernement d’imposer des boîtes noires aux opérateurs pour filtrer les communications et détecter d’éventuelles menaces terroristes.
Cette loi est considérée par beaucoup comme un Patriot Act[44] à la française. Les très nombreuses critiques des défenseurs des libertés individuelles n’ont donc pas changé la donne. L’essentiel de la loi sur le renseignement a été validée par le Conseil constitutionnel, qui a jugé conformes à la Constitution les autres dispositions de ce texte combattu par de nombreuses associations et critiqué par le Comité des droits de l’Homme de l’ONU.
La nouvelle loi sur le renseignement de 2015 et les suivantes
Cette loi a donc donné un cadre légal aux activités des services de renseignement, suivant en cela les recommandations de la commission d’enquête parlementaire. Des techniques de recueil de renseignements qui étaient permises dans un cadre judiciaire ont été étendues aux services de renseignement : balisage de véhicule, sonorisation de lieux privés (micros), captation d’images dans des lieux privés, captation de données informatiques, accès aux réseaux des opérateurs de télécommunications pour le suivi d’individus identifiés comme présentant une menace terroriste… Les moyens de contrôle des communications des détenus dont dispose l’administration pénitentiaire ont été renforcés. Le dispositif d’analyse automatique des données installé par les fournisseurs d’accès à internet (FAI) afin de surveiller le trafic et de détecter des comportements suspects a été modifié par l’Assemblée nationale. Les hébergeurs effectuent désormais eux-mêmes la séparation entre les métadonnées (données de connexion) et les contenus. Les services de renseignement peuvent seulement consulter les métadonnées, mais uniquement dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. De même, l’Assemblée nationale a limité l’utilisation des imitateurs d’antennes relais qui permettent d’aspirer les conversations dans un périmètre donné à des agents individuellement désignés et habilités.
Ces techniques ne sont utilisées que pour des finalités limitativement énumérées par la loi : la sécurité nationale, les intérêts essentiels de la politique étrangère et l’exécution des engagements internationaux de la France, les intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France, la prévention du terrorisme, la prévention de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous (« dissous » supprimé par l’Assemblée nationale), la prévention de la criminalité et de la délinquance organisées, la prévention de la prolifération des armes de destruction massive (ajouté par l’Assemblée nationale), la prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique. A l’Assemblée nationale, le motif « prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique » a été remplacé par « prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions et des violences collectives de nature à porter atteinte à la sécurité nationale ».
Les techniques portant le plus atteinte à la vie privée ne sont employées qu’au regard des principes de proportionnalité et de subsidiarité[45]. Le recours à ces techniques de surveillance doit obéir à une procédure définie par la loi : les demandes écrites sont adressées au Premier ministre, lequel donne ou non son accord après avis de la CNCTR.
Autorité administrative indépendante, la CNCTR a succédé à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS). Elle est composée de magistrats, d’une personnalité qualifiée pour ses connaissances en matière de communications électroniques et de parlementaires. Outre l’avis qu’elle doit formuler avant toute autorisation de mettre en œuvre une technique de renseignement, elle peut demander que lui soit communiquées toutes les informations utiles pendant la mise en œuvre de la technique, ou une fois le recours à cette technique terminé. Dans les cas d’urgence absolue, l’autorisation de mettre en œuvre une technique de renseignement peut être délivrée sans avis préalable de la commission. Celle-ci doit néanmoins en être immédiatement informée, et peut recommander son interruption. Par un amendement voté par l’Assemblée nationale, la procédure d’urgence ne peut pas s’appliquer pour des techniques de renseignement mises en œuvre à l’encontre d’un magistrat, un avocat, un parlementaire ou un journaliste. Par ailleurs, cette nouvelle instance dispose d’un accès aux locaux des services, aux dispositifs de traçabilité, aux opérations de transcription, d’une saisine élargie du Conseil d’État. De plus, les renseignements collectés sont bien centralisés par le Groupement interministériel de contrôle (GIC).
La loi a instauré également un droit de recours devant le Conseil d’État ainsi qu’un réexamen de la loi dans un délai maximal de cinq ans à l’issue d’un bilan d’application réalisé par la Délégation parlementaire au renseignement. Un amendement adopté par la commission mixte paritaire interdit aux services pénitentiaires de recourir aux techniques du renseignement et, dans la foulée, une Inspection des services de renseignement, dépendant du gouvernement, a été créée par décret[46]. Cette inspection non permanente des services de renseignement est chargée de missions de contrôle, d’audit, d’étude, de conseil et d’évaluation à l’égard des services spécialisés de renseignement, ainsi que de l’Académie du renseignement. Ces missions sont réalisées sur instruction du Premier ministre.
Un « statut de lanceur d’alerte avait été créé afin d’apporter une protection juridique à tout agent souhaitant révéler des illégalités commises ». Le gouvernement, prétextant aménager le texte et protéger la sécurité des agents, a fait adopter un amendement de suppression de l’alinéa tout entier. L’agent désireux d’attirer l’attention sur des abus pourra toujours le faire, mais sans pouvoir communiquer d’information classifiée. La CNCTR devra donc juger de l’illégalité d’activités dont elle ne pourra avoir connaissance.
Les députés ont également profité du texte pour renforcer l’arsenal de sanctions contre les hackers. Ils ont décidé de doubler les sanctions pécuniaires pour tout piratage – actuellement puni au maximum de 75 000 euros -, voire de les tripler s’il s’agit d’un service de l’État. Par ailleurs, un nouveau fichier (FIJAIT) qui recense les noms et adresses de toutes les personnes condamnées ou mises en examen pour terrorisme, a été créé.
Cette loi donne un cadre juridique à l’utilisation de moyens techniques et opérationnels par les services de renseignement. Il ne faut pas oublier que ceux-ci interviennent en amont de la police judiciaire, sur des individus ou des groupements dangereux, susceptibles de commettre à tout moment des actes répréhensibles ; le recours à ces techniques d’investigations doit être possible sans se mettre hors la loi. Cette loi, qui encadre donc l’activité des services spécialisés, a eu une portée générale ce qui n’était pas le cas de la loi de 1991 qui ne concernait que les interceptions des communications.
La loi de 2015 a été un pas important permettant de faire évoluer les mentalités. Deux autres lois sont d’ailleurs venues la renforcer. En 2017, le nouveau régime légal de surveillance des communications hertziennes[47] a permis aux services de renseignement d’intercepter et d’exploiter les communications empruntant la voie exclusivement hertzienne qui n’impliquent pas l’intervention d’un opérateur de communications électroniques dans un cadre légal doté de garanties. La loi a pérennisé le régime qui permet la consultation des données du fichier des passagers du transport aérien. Elle a créé un système national de centralisation des dossiers passagers du transport maritime.
La loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement a renforcé, de son côté, certaines mesures de la loi 2017 ainsi que la loi sur le renseignement de 2015 en prenant en compte l’évolution des technologies et des modes de communication utilisés par les terroristes. Les services de renseignement disposent désormais de nouveaux moyens de contrôle, dont la possibilité, à titre expérimental, d’intercepter les communications satellitaires. La technique de l’algorithme expérimentée depuis 2015 a été également maintenue. Elle permet un traitement automatisé des données de connexion et de navigation sur Internet grâce à la coopération des fournisseurs d’accès. Cette surveillance a été étendue aux adresses de connexion (URL). En outre, le fait que ce texte ait permis de fluidifier et d’encadrer les partages d’informations par les services de renseignement et les autorités administratives, a été très important.
Des effectifs plus nombreux mais des efforts à poursuivre pour que pouvoir et renseignement cohabitent utilement
La Délégation parlementaire au renseignement a souligné que les effectifs des services de renseignement avaient progressé de façon significative en réponse aux nouvelles menaces. De 2014 à 2017, le nombre d’agents participant à la politique publique du renseignement est passé de 15 531 à 18 632 (+20%). Cependant, cette augmentation est plus lente que prévue et le nombre d’effectifs à recruter reste important. La loi de programmation militaire 2019-2025 a confirmé, de son côté, la priorité accordée au renseignement à travers la fonction stratégique « connaissance-anticipation ». Les trois services de renseignement du ministère des armées (DGSE, DRM, DRSD) font l’objet d’un effort supplémentaire en matière d’effectifs et d’équipements. De même, les crédits consacrés au renseignement ont cru d’environ 32% au cours des cinq dernières années.
Cette montée en puissance est à nuancer. Le directeur général de la sécurité extérieure, Bernard Émié, a insisté sur le fait que les moyens humains et budgétaires du renseignement extérieur français étaient relativement limités par rapport à ceux de pays comparables. « Ils sont, par exemple, inférieurs à ceux du Service fédéral du renseignement allemand, et très largement inférieurs à ceux des services britanniques, où le seul GCHQ (Government Communications Headquarters), consacré au renseignement électronique, emploie 10 000 personnes pour une budget de 1,4 milliard de livres. Les services américains sont hors échelle avec 17 agences. La NSA (National Security Agency) emploie à elle seule 30 000 agents[48] ».
Face au nombre croissant d’individus faisant l’objet de signalements et des 20 000 personnes inscrites au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), certains experts estiment le nombre d’agents insuffisant pour élargir le dispositif des services du renseignement français. En 2021, la Revue stratégique réactualisée confirmait que le renseignement était « un des domaines critiques dans lesquels l’objectif d’une souveraineté maîtrisée restait une priorité. »
Par ailleurs, l’élu LR du Bas-Rhin, Patrick Hetzel, rappelait récemment que « depuis plus de cinq mois, le pays n’a plus de coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme », à la suite du départ de Laurent Nuñez pour la PP. Une vacance de poste jugée « très dangereuse ». « Le prochain coordonnateur du renseignement sera nommé sans doute dans les prochains jours, pour ne pas dire avant le début du mois de janvier en conseil des ministres », a précisé alors le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, le 13 décembre 2022. Le ministre a également tenu à préciser que ce « poste est pourvu et assuré par Hubert Bricq qui est actuellement le coordonnateur adjoint par intérim, et fait son travail ». Pascal Mailhos, préfet de la région Auvergne Rhône-Alpes, qui avait été peu de temps directeur des Renseignements Généraux, serait pressenti pour ce poste.
Pour conclure, il reste des progrès à faire tant par le pouvoir que par le renseignement. Celui-ci doit continuer à montrer à quel point il est indispensable au pouvoir et ce dernier doit lui montrer à quel point il peut lui fait confiance. Ce n’est que grâce à ce fragile équilibre que les deux serviront au mieux la démocratie.
[1] Jean-Louis Gergorin, Rapacités, Fayard, 2007, p. 13.
[2] Ce que je n’ai pas dit dans mes carnets. Entretiens avec Frédéric Ploquin, Fayard, 2009.
[3] Il sera condamné par le tribunal correctionnel en 2003 pour une partie des délits ne relevant pas directement de ses fonctions de secrétaire d’État. Il sera également condamné à trois ans de prison avec sursis, 20 000 euros d’amende et cinq ans d’interdiction de vote et d’éligibilité par la Cour de Justice de la République en 2004, pour escroquerie au préjudice de l’État. Il renoncera à se pourvoir en cassation. Il mourra en octobre 2004.
[4] Alain Chouet, ex-directeur à la DGSE, « On a baissé la garde sur le renseignement humain » Médiapart, 23 novembre 2015.
[5] Ibid.
[6] Alain Carignon, né le 23 février 1949 à Vizille (Isère). Maire RPR de Grenoble de 1983 à 1995, il est ministre délégué à l’Environnement du gouvernement Chirac II, puis ministre de la Communication du Gouvernement Balladur de 1993 à sa démission, l’année suivante, qui précède sa mise en examen pour corruption et son emprisonnement pendant 29 mois. Il est condamné le 9 juillet 1996 par un arrêt définitif de la chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Lyon à 5 ans de prison (dont 1 an avec sursis), 5 ans d’inéligibilité, et 400 000 francs d’amende pour corruption, abus de biens sociaux, et subornation de témoins. Il sera libéré en mai 1998.
[7] Propos d’un membre du Syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale, parus dans le livre de Francis Zamponi, Les RG à l’écoute de la France – Police et Politique – de 1981 à 1997, La Découverte, 1998.
[8] Yves Bertrand, Ce que je n’ai pas dit dans mes carnets…, op. cit.
[9] Algérie patriotique, 15 novembre 2015.
[10] Valeurs Actuelles 20 novembre 2015.
[11] Algérie patriotique.
[12] Michel Rocard, Si ça vous amuse, Flammarion, 2010.
[13] Le Monde, 14 juin 1996
[14] Interview, revue Entreprise, le 13 juin 1970
[15] Une première institution, le Conseil supérieur de l’activité de la police nationale, a été créée par un décret du 16 février 1993 ; elle a été supprimée par un décret en date du 7 mai 1993.
[16] Décret n°93-1081 en date du 9 septembre 1993.
[17] Créée par la loi no 2000-494 du 6 juin 2000.
[18] Né le 5 mars 1955 à Oran, il est d’abord militant trotskiste à la Ligue communiste révolutionnaire, puis, il rejoint en 1981 le Parti socialiste. Il est l’un des fondateurs de SOS Racisme. Député de la dixième circonscription de l’Essonne de 1988 à 2012, il est actuellement conseiller régional d’Île-de-France.
[19] Jacques Harstrich, RG, 20 ans de police politique, Calmann Levy, p. 115
[20] Claude Angeli et René Backmann, Les polices de la nouvelle société, Maspero, p. 41, 1971.
[21] Jean Guisnel et Bernard Violet, Services Secrets. Le pouvoir et les services de renseignement sous François Mitterrand, La Découverte/Enquêtes, 1988, p.68
[22] Journal du soir, 9 mars 1988.
[23] Les RG à l’écoute de la France – Police et politique de 1981 à 1997, op. cit.
[24] Pierre Lascombes, secrétaire général du Syndicat des commissaires (SNC), minoritaire, lors de ces Assises.
[25] Le compte rendu des Assises du Renseignement a été publié dans un numéro hors-série paru en décembre 1991 dans la revue du SNC, « Le commissaire de Police ».
[26] Le 9 octobre 2007.
[27] Quatre députés et quatre sénateurs.
[28] Rapport de la mission conduite par Jean-Jacques Urvoas.
[29] Idem.
[30] Parue le 18 décembre 2013.
[31] Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE), Direction du Renseignement Militaire (DRM), Direction de la Protection et de la Sécurité Défense (DPSD), au ministère de la Défense ; Direction nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED), Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers (TRACFIN) au ministère de l’Économie et des Finances ; DGSI au ministère de l’Intérieur.
[32] L’ENA hors des murs, juin 2014, n°442.
[33] Éric Denécé, Atlantico, 23 avril 2014.
[34] De 180 pages.
[35] Fadettes et adresses IP.
[36] CRISTINA pour la DCRI, les deux fichiers principaux de la DGSE, le fichier national des immatriculations, le système national de gestion du permis de conduire, le système de gestion des cartes nationales d’identité, le système de gestion des passeports, le système informatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, le fichier des non-admis sur le territoire national et celui des personnes dont la délivrance d’un visa a été refusée, les données relatives aux déplacements internationaux.
[37] En date du 16 novembre 2015.
[38] Communiqué de presse du 17 novembre 2015 du syndicat des commissaires de la police nationale – SCPN.
[39] Promulguée le 24 juillet 2015, elle a été publiée au Journal officiel du 26 juillet 2015.
[40] 28 avril 2015.
[41] Le Monde, 23 avril 2015.
[42] Déposés le 25 juin 2015.
[43] Dans sa décision du 23 juillet 2015.
[44] Loi antiterroriste votée par le Congrès des États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001.
[45] Dans les seuls cas où c’est l’unique méthode pour recueillir les renseignements.
[46] Décret no 2014-833 du 24 juillet 2014.
[47] La loi du 30 octobre 1917 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (SILT).
[48] Cité par le député Cornut-Gentille dans son rapport sur le projet de budget 2020 de la Défense.