Les pays occidentaux complices de crimes contre l’humanité au Yémen
CORVEZ Alain
Après une carrière militaire orientée vers les relations internationales qui l’a amené à exercer en Afrique puis au Moyen-Orient où il a été conseiller du Général commandant la Force des Nations Unies au Liban, puis conseiller au ministère de l’Intérieur dans le même domaine, Alain Corvez a ouvert un cabinet indépendant de conseil en stratégie internationale en 1994.
Je veux stigmatiser l’indifférence des puissances occidentales, voire leur soutien, à l’agression sauvage de l’Arabie Séoudite et ses alliés contre le Yémen depuis plus de deux ans, dans le but de remettre au pouvoir ses affidés qui en ont été chassés, afin de reprendre le contrôle d’un pays disposant de ressources pétrolières, situé au débouché de la mer Rouge sur l’océan Indien par le détroit de Bab El Mandeb où transitent des flux énergétiques énormes, à quelques encablures de Djibouti, de l’Erythrée et de la Somalie. Ces enjeux stratégiques et économiques sont évidemment dans les esprits de tous. Il est regrettable que le Conseil de Sécurité aie voté, à l’exception notable de la Russie, le 16 avril 2015, trois semaines après le déclenchement de l’agression, sa légitimation sous le chapitre 7.
L’Occident, ardent à donner des leçons de morale au monde entier, au nom d’une vertu dont il prétend dicter les principes au monde et ainsi dénoncer les crimes des états auxquels il est hostile, voire dont il veut changer par la force des armes les dirigeants qui ne répondent pas à ses critères, en dehors de toute légalité internationale, reste silencieux sur les crimes commis par l’Arabie Séoudite et ses alliés.
Une hypocrisie odieuse marque sa politique qui n’est, en fait, que celle décidée à Washington, et nous avons vu que lors de son voyage en mai en Arabie, le Président Trump, inversant les responsabilités sur la question du terrorisme, a renoué son appui à ceux qui le soutiennent depuis des lustres et accusé ceux qui le combattent en première ligne comme l’Iran, et en subissent cruellement les effets. Depuis son passage à Riyad, un affrontement radical contre le Qatar est intervenu, la répression contre les démocrates de Bahreïn se renforce, et un attentat terroriste coordonné à l’évidence par l’Arabie s’est produit à Téhéran.
C’est à l’ONU qu’il revient de porter des jugements équilibrés sur ce qui est bien et mal dans le monde, en tenant compte des intérêts et des cultures des pays, et non à un état, quelle que soit sa puissance militaire.
Les crimes contre l’humanité commis par la coalition menée par l’Arabie Séoudite au Yémen ont détruit toutes les infrastructures vitales du pays : barrages, eaux, hôpitaux, électricité, infrastructures routières, aériennes et portuaires… et tué des milliers de civils dont de nombreux enfants car leurs frappes semblent vouloir non seulement détruire le pays berceau de l’arabisme et de ses cultures séculaires, mais aussi atteindre le moral des habitants à la manière nazie. Le choléra est désormais à l’état épidémique et les ressources médicales et de première nécessité ont du mal à atteindre le pays. Tous les experts militaires savent que les combattants yéménites ont montré depuis toujours qu’ils sont bien plus expérimentés, patriotes et courageux que les mercenaires de l’alliance séoudienne qui accumulent les échecs tactiques sur le terrain. L’Arabie désormais frappée sur son propre sol par des représailles yéménites ne peut gagner cette guerre mais continue à déverser chaque jour des tonnes de bombes par des frappes aériennes pour détruire un pays qui est le symbole de l’inverse de sa brutalité, de son sectarisme religieux et de sa barbarie.
Donald Trump qui avait promis tout au long de sa campagne de mettre un terme à l’interventionnisme militaire américain en se rapprochant de la Russie et de la Syrie notamment, fait exactement le contraire depuis son intronisation, sans doute repris en main de force par l’oligarchie qui gouverne en réalité les Etats-Unis. Il a frappé la Syrie sans avoir attendu qu’une enquête se déroule sur les accusations infondées d’emploi de l’arme chimique à Khan Cheilkoun, envoyé une escadre en mer de Chine comme pour attaquer la Corée du Nord au risque de déclencher une guerre nucléaire mondiale.
Ces rodomontades dangereuses s’accompagnent au Yémen d’un renforcement du soutien militaire à l’Arabie Séoudite et de l’augmentation des frappes de drones, soi-disant contre Al Qaïda mais qui touchent souvent des Yéménites qui n’en sont pas membres. Il accomplit ainsi les promesses qu’il a faites au Prince Héritier du roi Salmane, venu le rencontrer à Washington, de continuer et même de renforcer l’alliance du Pacte du Quincy de février 1945.
La Grande-Bretagne et la France, si promptes à donner des leçons de morale au monde, non seulement ne dénoncent pas ces crimes dont pâtit atrocement la malheureuse population civile du Yémen, mais participent au soutien en armement de la monarchie wahabite.
Le Yémen, appelée autrefois « l’Arabie heureuse », est un pays dont les richesses culturelles et patrimoniales ont été vantées au cours des siècles par tous les voyageurs et orientalistes français et britanniques. Les historiens comme le Français Jacques Benoist-Méchin ont décrit avec émotion le raffinement qui a toujours marqué la culture yéménite qui est, en fait, le berceau de toute la culture arabe et l’origine des migrations qui peuplèrent la péninsule. Ce patrimoine exceptionnel est en train d’être détruit par la barbarie séoudienne, avec l’appui de l’Amérique et de ses valets. C’est un scandale qui restera dans l’Histoire.
L’élection en avril dernier de l’Arabie Séoudite à la Commission de la condition féminine à l’ONU est une insulte totale, un déni de bon sens, et ridiculise l’organisation internationale. Heureusement des sénateurs et sénatrices français courageux ont fait part de leur indignation.