Un « obsédé du renseignement » : le docteur Henri martin
Gérald ARBOIT
En révélant l’existence des cahiers à spirales « secrets » de l’ancien directeur des Renseignements généraux (1992-2003), Yves Bertrand, impliqué dans l’affaire Clearstream [1], la presse française s’est interrogée sur l’épidémie de graphomanie qui touchaient les responsables des services de renseignement français. Déjà, dans le cadre de la même procédure judiciaire, le général de division Philippe Rondot, qui, avant d’être le conseiller spécial pour le renseignement et les opérations spéciales de différents ministres de la Défense (1997-2005), avait fait ses armes au SDECE (1965-1981), à la DST (1981-1990), à la DRM (1990-1993) et à la DGSE (1993-1997), avait du remettre à la justice ses propres carnets. Loin d’enfreindre les règles d’un métier dont les médias méconnaissent la réalité, ces notes, manuscrites ou informatisées, bourrées d’informations confidentielles sur des affaires sensibles, s’étalant sur plusieurs années, étaient à la base de leurs fonctions d’analystes du renseignement.
En qualifiant ces officiers de renseignement d’« obsédés », pour reprendre la phraséologie journalistique, l’importance du travail d’analyse se trouve négligée. Mais il est vrai que l’imaginaire, façonné par des années de littérature et de cinéma consacrées à la recherche, qualifiée d’espionnage [2], ne s’intéresse guère à ces fournisseurs d’informations et de connaissances pour décideurs de toute nature, qu’ils fussent civils ou militaires, politiques ou économiques. D’ailleurs, ces clients écoutèrent-ils toujours leurs analystes ? Shermann Kent, que l’on peut considérer comme le théoricien de la profession, a beaucoup réfléchi à ce lien entre analyste et décideur, mais également sur les biais qui influençaient le travail du premier : son environnement idéologique, sa rigueur intellectuelle, sa capacité à ne pas s’enfermer dans sa propre logique, mais bien à envisager d’autres possibilités tout en assurant une information juste et délivrée en temps utile, de même que sa capacité à prendre recul face à ses échecs [3].
Bien avant le général Rondot ou le commissaire Bertrand, un homme était comme eux fasciné par « les deuxièmes rideaux de scène » , cette véritable « place de choix lui permettant de surveiller la salle, le souffleur, l’orchestre, les coulisses et la proximité du pompier de service était une sacrée assurance vie… ». Mais, à leur différence, il ne servait pas l’Etat, avec ou sans biais. Il était au mieux un « romantique du renseignement » , pour reprendre les mots de Licette, qu’il avait placé comme lectrice dans une grande famille bourgeoise [4]. Au pire, c’est-à-dire selon la justice qu’il fréquenta trop souvent, il n’était que « fantaisiste et excentrique » [5] . Plus généralement, le docteur Félix-Victor-Henri Martin exerça moins longtemps l’art médical que celui du complot. Mais ce « médecin conspirateur » , comme le nomma gentiment son improbable soutien, parce qu’apparenté communiste, André Blumel [6], n’en fut pas moins un analyste du renseignement. Naturellement, les décideurs à qui il destinait ses informations améliorées n’appartenaient pas, excepté au moment où la légitimité n’était plus en France mais à Londres, à la sphère gouvernementale, et encore moins légale. Son univers était celui de la lutte contre le régime républicain, mâtinée d’anticommunisme, depuis le 6 février 1934 jusqu’à l’Organisation armée secrète (OAS), en passant par la Cagoule (1937), les intrigues de Vichy (1940-1942), la Résistance (1943-1945), l’anti-gaullisme (1945-1947), la lutte contre la Communauté européenne de défense (CED, 1954) et les complots d’Alger (1958-1962).
Le docteur Martin n’était pas un homme du renseignement à proprement parler. Engagé volontaire en 1915 dans les Dragons, à Tours, cet élève de la Faculté de médecine de Paris, étudiant la chimie en Sorbonne, avait rapidement été versé dans les services de santé et affecté, comme médecin-auxiliaire, au 112e régiment d’artillerie lourde. Démobilisé, il avait repris ses études, externat à Saint-Antoine (1920-1921) et internat à Broca, puis à la Pitié (1921-1923). Militant de l’Action française avant la guerre, il reprit ses activités aux Camelots du Roi. Très vite, il s’imposa parmi « les dirigeants particulièrement qualifiés » [7] dans l’art militaire, et particulièrement dans celui du renseignement [8]. En mars 1930, en guerre ouverte avec la nouvelle direction de l’Action française, dont il soupçonnait le secrétaire général, Pierre Lecœur, d’être un indicateur de police [9], il fut contraint de se retirer. Il se rendit à Bruxelles auprès du prétendant au trône de France, Jean d’Orléans, lui-même en train de prendre ses distances avec le mouvement maurassien condamné par le Saint-Siège. Grâce à l’entremise du colonel de cavalerie Elie de Froidemont, qu’il connaissait depuis l’automne 1929 au moins [10] et qui émargeait au service de renseignement de l’Armée, il se vit charger de la sécurité de la duchesse Isabelle lors de ses séjours parisiens chez sa fille Isabelle, jeune veuve du comte Bruno d’Harcourt. Il devait s’assurer de l’honorabilité des différents solliciteurs d’entrevue avec l’épouse du prétendant orléaniste.
S’il avait quitté l’Action française, il n’en continuait pas moins à en fréquenter certains membres, notamment des Camelots. Il se chercha également un nouveau complot à soutenir, plutôt qu’à ourdir, contre la « Gueuse ». Soucieux de regrouper les forces nationalistes dans un même mouvement, il poursuivit toute sa vie un rêve d’entrisme partisan. Après le monarchisme intégral, il se porta vers le Parti agraire et paysan de Henri-Auguste d’Hallauin, dit Henry Dorgères, dont il anima le Centre d’action et de documentation contre le marxisme agraire (CADMA). Toute sa vie durant, Martin chercha à prendre le contrôle d’une fronde corporatiste, rejoignant après la Seconde Guerre mondiale Pierre Poujade et son Union de défense des commerçants et artisans (UDCA), avant de retourner vers l’agriculture, en tentant d’infiltrer la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) [11].
Mais il laissa le plus largement aller son « obsession » pour le renseignement à l’occasion des différents complots qu’il rejoignit. Vraisemblablement à partir de l’éphémère structure du CADMA, domiciliée chez lui, au n° 7 de la rue de Bucarest, ou du Centre d’études des problèmes de l’Etat, Martin établit pour trente ans un service de renseignement, privé plutôt que clandestin. Hormis les périodes de septembre 1940 à mars 1942, où il travailla pour le compte des services vichyssois, et de septembre 1944 à février 1945, où il était le « commandant Bernard » dans le cadre d’une opération combinée entre le G-2 de la Septième armée américaine et de l’Office of Strategic Services (OSS), et peut-être encore au cours de l’année 1946 dans une épopée monarchiste belge, sous le nom de « Monsieur Leloup » [12], il n’appartint à aucun service officiel. Mais ses activités n’en étaient pas pour autant secrètes. Ses notes de synthèses, généralement informes, sans véritable ponctuation, tapées d’une traite à la machine par lui, par son épouse ou par une collaboratrice, selon les époques, étaient largement diffusées, avant guerre, auprès de la presse d’extrême droite ( Choc , L’Insurgé , Gringoire , Jour ), puis, après le second conflit mondial, auprès de quelque trois cents destinataires, parmi lesquels des agents des services officiels, des parlementaires, des fonctionnaires, des banquiers, des notabilités…, qu’il pensait acquis à ses idées. Ainsi dérogeait-il au principe de neutralité idéologique de Sherman Kent !
La « Maison Martin »
Néanmoins, le fonctionnement de la « Maison Martin » [13] ressemblait à un Deuxième bureau ou à une antenne de la Sûreté. Il est vrai que, souvent, elle en empruntait aussi les hommes. La plupart avait été rencontrée dans les années 1930, au moment de l’aventure cagoularde du Comité secret d’action révolutionnaire (CSAR) d’Eugène Deloncle. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, un de ses « agents », membre du Deuxième bureau de la Marine, le lieutenant de vaisseau Jean Joba, rapporte que le docteur Martin pouvait compter sur trois catégories de personnels [14] :
- les « petits gars », compagnons de conspiration depuis l’Action française et la Cagoule ;
- les « vieux amis », contacts bien placés dans la société française ;
- les « barons », notables bien implantés dans leurs régions et non suspects d’appartenir à l’extrême droite.
Tous n’appartenaient pas au monde du renseignement et la structure du réseau laisse plutôt à penser qu’il était plutôt construit pour la conspiration plutôt que pour l’analyse de l’information politique. Pour la plupart, ils venaient du monarchisme ou du nationalisme intégraux et suivirent plutôt une trajectoire similaire à celle du docteur Martin.
Jacques de Place était de ceux-là. Il avait rencontré le docteur en 1936, âgé de vingt-quatre ans, à l’instigation d’un certain Félix Dessolier [15] ; immédiatement séduit, il ne le quitta plus, malgré les vicissitudes. Le jeune homme assura les fonctions de « secrétaire général », permanent d’un réseau compartimenté autant que tentaculaire et mouvant. A l’époque de la « Cagoule », il semblerait qu’Aristide Corre (Dagore) ait assuré la liaison entre la « Maison Martin » et le CSAR [16]. En 1954, Place partagea en partie sa charge avec le jeune vicomte Yves de Pontfarcy [17].
Les hommes qui venaient ensuite, permanents ou non, organisaient le réseau moins en fonction de compétences thématiques que de capacités personnelles. La « Maison Martin » se constitua toujours d’un « service central », composé des fonctions de secrétaire, d’archiviste, de dactylo et d’officier traitant, chacune recouverte par une ou plusieurs personnes selon les époques ; ainsi, à Vichy, au sein du Centre d’informations et d’études (CIE, septembre 1940-février 1941) comme du « service noir » de l’amiral Darlan, qui multipliait les Deuxième bureaux (mars 1941-mars 1942), une douzaine de collaborateurs l’encadraient. Ils avaient été moitié moins durant le complot de la Cagoule et ne furent pas beaucoup plus à se mettre au service de l’anti-gaullisme et de l’Algérie française. Peut-être fallait-il y voir là les affres de la clandestinité, alors que le service de l’Etat offrait un plus grand confort de travail ?
Tous étaient susceptibles de produire une analyse comme de mener une recherche documentaire, de « traiter » des informateurs ou de mener des investigations. Les enquêtes judiciaires autour du complot de la Cagoule montrent l’ampleur des missions remplies par la « Maison Martin » à partir d’un « plan de travail, programme de recherches » établi par le lieutenant-colonel de réserve Georges Cachier, « chef » du Troisième bureau [18]. Le déroulé du cycle du renseignement confirmait bien l’indépendance de ce « Deuxième bureau » que formaient Martin et ses recrues par rapport aux « autorités » qu’ils servaient. Et si le médecin avait contribué à la formation du CSAR, il apparaît qu’il n’en fit jamais partie, le responsable du renseignement étant Aristide Corre [19]. Même chose à Vichy, où la « Maison Martin » fut employée par le colonel Georges Groussard, au sein du CIE, puis par le capitaine de vaisseau Jean Tracou, du cabinet de Darlan.
Une officine de renseignement privée
Pour le recueil de renseignement, la « Maison Martin » disposait de ressources d’intelligence et d’action apparemment sans limites. La base consistait dans l’exploitation des sources ouvertes que sont les médias. Dans le cas présent, il s’agissait essentiellement de la presse écrite. Spécialisé dans l’anticommuniste, le docteur Martin se délectait de la lecture de la presse de cette tendance, à commencer par L’Humanité . Mais l’homme nourrissait aussi par ce moyen son besoin d’informateurs potentiels. Ainsi la lecture du Fonctionnaire de France lui permettait de relever les noms des adhérents de l’Action française qui allaient rejoindre le vivier qui lui servirait pour le renseignement humain. La fréquentation des cafés parisiens était une autre méthode [20].
Les officiers traitants de la « Maison Martin » exploitaient différentes sources. Les plus nombreuses étaient des contacts et des informateurs occasionnels. Il y eut naturellement des anciens de l’Action française, bien introduits dans la bonne société de Paris et de province [21]. Certains étaient des indicateurs de police, classés dans les fichiers de Martin sous les cotes P1, P2, P3, P4… ; comme il y avait beaucoup de concierges parisiens, la porte des immeubles privés lui était ouverte. L’un d’entre eux, Thomas Bourlier, s’avéra être un agent de pénétration policière ; le docteur Martin tenta bien de dissuader le CSAR de l’employer, en vain [22]. D’autres avaient été approchés lors d’infiltrations menées dans les secteurs stratégiques de l’économie française, dans les administrations, dans les partis et les associations… Chargés de l’étude des agissements du Komintern en France, Rouyat et Pochet adhérèrent le plus naturellement du monde, en juin 1937, au Parti communiste pour en noyauter la cellule 113, où Pochet occupait dès septembre le secrétariat. Le docteur Martin approcha quant à lui Pierre de Harting, baron balte qui avait épousé la propriétaire de la librairie Honoré Champion. Quant il apprit que cet ancien combattant français avait servit pendant la Première Guerre mondiale dans le renseignement et qu’il était le fils d’un ancien chef du bureau parisien de l’Okhrana, la police secrète tsariste [23], Harting cessa de n’être qu’un simple contact pour apparaître comme un des principaux agents de la « Maison Martin ». « Extraordinairement informé sur le Komintern et surtout sur ce qui touchait les bolcheviks et le PC » [24], il était encore présent à ses côtés dans les années 1950.
Par Harting, mais également par d’autres canaux, comme, dans les années cinquante, celui de l’avocat catholique Jean Viollet, la « Maison Martin » obtenait aussi des renseignements émanant des services officiels des années 1930 aux années 1960, aussi bien au Deuxième bureau et au Service de renseignement (SR), puis après-guerre Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE), qu’à la Sûreté, puis Renseignements généraux (RG) et Direction de la surveillance du territoire (DST). Certains de ses contacts d’après 1945 n’avaient rien à voir avec les conspirations de l’entre-deux-guerres, mais venaient de Vichy, comme Roger Warin, dit Wybot (DST), ou Robert Dumont (SDECE) que Martin avait rencontré au CIE [25], avant de le retrouver à la direction du contre-espionnage de la IVe république (1944-1958). D’autres, comme les commissaires Marc Bergé (Sûreté, puis RG ; ennemi intime de Wybot) et Jean Dides (RG) ou le colonel Pierre Fourcaud (SDECE), venaient de l’anticommunisme le plus ancien. Les rapports qu’entretenaient ces hommes, que l’on ne saurait qualifier d’agents, avec le docteur Martin semblaient officiels.
A l’époque de la Cagoule, le maréchal Louis Franchet d’Esperey avait invité le colonel Groussard et le commandant Loustaunau-Lacau à renseigner l’organisation secrète [26]. Les réseaux de renseignement, baptisés Corvignoles, du nom de famille de la mère du maréchal Sébastien Le Presle de Vauban, qu’anime ce dernier pour « nettoyer l’armée des cellules que le parti communiste y développe sans arrêt » , étaient mis au service de la « Maison Martin » [27]. De son côté, Groussard apportait les ressources du Deuxième bureau, que dirigeait le lieutenant-colonel Louis Rivet, mais aussi des SR des trois armées. Le chef de bataillon Guy Schlesser (Terre) et le capitaine de frégate Robert Labat (Mer) et le lieutenant-colonel Alfred Heurteaux (Air), soit qu’ils les dirigeassent, soit qu’ils en fussent proches, partageaient leurs informations avec la « Maison Martin ». Bien que toutes ces relations ne fussent pas le fait du docteur Martin, mais de l’environnement conspirateur dans lequel il gravitait, des liens se formèrent entre ces hommes, constituant un réseau d’information qui perdura aux vicissitudes des temps incertains dans laquelle la France plongeait.
Si, à cette époque, la « Maison Martin » entretint des relations avec des services étrangers, notamment italiens et espagnols, il ne semble pas que ces liaisons fussent une de ses initiatives. En effet, le contact avec le Servizio informazioni militare (SIM) fasciste était une initiative de l’industriel François Méténier. A partir de la fin janvier 1937, à Nice, puis à Monte-Carlo et enfin à San Remo, cet ancien lieutenant d’artillerie rencontra le chef de poste turinois du service italien, le commandant Roberto Navale [28] ; le 22 mars, en échange de l’assassinat de deux opposants au fascisme, les frères Carlo et Nello Rosseli par la Cagoule, il offrit de fournir cent mousquetons à Méténier [29]. De même, sans que Martin ait à y voir quoi que ce soit, la Cagoule, par l’intermédiaire du médecin niçois Jean Farent, chercha à entrer en contact avec les Nazis [30]. La situation fut radicalement différente après 1945. De par son passage par l’OSS et celui de son gendre au SDECE autant que par un anticommunisme de bon aloi en ces temps de Guerre froide, la « Maison Martin » fut proche des services alliés, aussi bien l’organisation Gehlen que d’officiers des services belges, hollandais et italiens, voire soviétiques.
Le docteur Martin ne négligea pas de pénétrer les organes de presse, afin de se fournir en informations, certes ouvertes, mais largement inaccessibles pour un particulier désargenté comme lui. De tout temps, les journalistes destinataires de ses notes de synthèse étaient également des pourvoyeurs d’informations politiques sensibles, qui ne faisaient pas obligatoirement l’objet d’un traitement dans les médias. Après 1945, il fut servi par deux « fidèles », l’un engagé à l’époque du CIE, Yves Daude, l’autre devenu son gendre, après avoir été dans la résistance et au SDECE, Pierre Faillant de Villemarest ; tous deux commencèrent une carrière à l’Agence France Presse, avant de passer dans d’autres médias.
La « Maison Martin » au travail
La « Maison Martin » ne négligeait pas de recourir à des méthodes que la morale, étant donné que l’entièreté de ses activités se situait dans un espace extra-légal, sinon illégal, réprouvait. Depuis qu’il s’occupait du « contre-espionnage » de la duchesse Isabelle d’Orléans, il avait éprouvé ses méthodes. Les visites domiciliaires, auxquelles il procédait ou faisait procéder par ses personnels, servaient autant à s’assurer de la sûreté des individus cherchant à intégrer la société secrète du moment qu’à remplir les objectifs de renseignement ordonnés [31]. Fort de la complicité des concierges, qu’ils fussent des contacts réguliers ou qu’ils fussent abusés par quelque subterfuge inconnu, les hommes de Martin visitaient les appartements, en relevaient les plans, en fouillaient le plus méthodiquement possibles tous les endroits susceptibles de dissimuler des informations utiles. La plus belle opération datait encore une fois de l’épopée de la Cagoule. Lorsque la police saisit toute la documentation du CSAR, quel ne fut pas son étonnement d’y trouver toutes sortes d’informations sur les ministres du Front populaire, leurs appartements, leurs ministères, les réseaux parisiens d’électricité, de téléphone, de métro et des anciennes carrières, ainsi que les moyens d’accéder par les égouts et les caves à l’Elysée, aux ministères des Affaires étrangères, de la Guerre, de la Marine, de l’Intérieur, des Travaux publics, ainsi qu’au Palais Bourbon. Son plus grand échec, toujours à la même époque, fut de ne pas avoir pu découvrir les caches d’armes communistes… si jamais elles avaient existées.
Malgré tout, la « Maison Martin » remplit la mission de tout service de renseignement, à savoir rendre possible l’action. En aucun cas, la responsabilité opérationnelle tactique ne lui incombait. L’implication de Luc Robet, agent d’assurance de Douarnenez et lieutenant de vaisseau de réserve [32], dans l’arraisonnement avorté du sous-marin républicain espagnol C2, en rade Brest, le 18 septembre 1937, se limita à une reconnaissance rapide. Il avait ensuite laissé le commandant Julian Troncoso, chef du SR nationaliste espagnol en France, agir avec quatre hommes [33]. De la même manière, mais avec les ressources de l’AFP, où travaillait Pierre de Villemarest, et de ses correspondants en Belgique, en Suisse et à Trieste, la « Maison Martin » se mit à partir de novembre 1957 – le docteur venait d’être libéré de prison – sur la trace de l’armement du Front de libération nationale (FLN) algérien. Elle mit en évidence un transfert depuis la Yougoslavie. L’information améliorée fut transmise aux contacts de Villemarest dans les services officiels et dans l’armée. Le 18 janvier 1958, la marine arraisonnait le cargo Slovenija , chargé de cent cinquante tonnes d’armes. Quinze jours plus tard, le 6 février, un passeur d’armes, Michel Beerthelo, était arrêté par la police belge sur les renseignements de Villemarest.
Le renseignement permettait l’action. Dans les années 1930, aux côtés de cette surveillance des livraisons clandestines d’armes à l’Espagne républicaine par le syndicaliste douanier Gaston Cusin, plusieurs assassinats étaient à créditer au travail d’information de la « Maison Martin ». Le cas de Dimitri Navachine était même exemplaire. Cet économiste russe, ancien haut-commissaire aux Transports du gouvernement Kerenski (1917), ancien directeur de la Banque commerciale pour l’Europe du Nord (1927-1930), proche du Front populaire et des milieux Russes blancs de Paris, était l’objet d’une surveillance du CADMA depuis le début de l’année 1935 [34]. Mais ce franc-maçon, pour détestable qu’il pouvait être à ces nationalistes intégraux, n’était pas une cible pour le CSAR ; il ne le devint qu’à la demande du maréchal Franchet d’Esperey, désireux d’avoir une preuve du sérieux de l’organisation conspiratrice. Son sort fut définitivement scellé par le hasard du tirage de son nom dans un chapeau que tenait le docteur Martin [35]. Après une rapide reconnaissance de ses habitudes par le service « action » (André Tenaille, Jean-Marie Bouvyier et Derville), le 25 janvier 1937, Navachine était mis à mort par Jean Filliol à la fin de sa promenade quotidienne au bois de Boulogne [36]… L’enquête de police ne devait pas révéler l’implication de la Cagoule ; Martin la surveillait de près, obtenant même le 9 juin suivant une copie du rapport transmit au ministère de la Justice [37]. Le même réseau devait lui servir, quelques mois tard, à se procurer le dossier de l’affaire Stavinsky/Prince qui avait mené aux émeutes antiparlementaires du 6 février 1934 et à la constitution de l’OSARN/CSAR…
Si l’implication de la « Maison Martin » dans l’assassinat des frères Rosselli ne semble pas évidente, les renseignements sur les deux socialistes italiens émanant certainement des services mussoliniens, il en allait différemment pour trois cas d’exécution liés à la sécurité de la Cagoule. Les conditions des enquêtes internes, qui incombaient nécessairement aux hommes de Martin, sinon au seul docteur, sur les cas des deux premiers « armuriers » de l’organisation, Adolphe Juif et Léon Gabriel Jean-Baptiste, restent inconnues. Simplement sait-on qu’ils étaient suspectés de détournement de fonds. Le 3 février 1937, François Méténier déclara au commandant Navale avoir tué le premier en territoire italien [38] ; Juif avait disparu le 14 décembre 1936 à San Remo, son corps criblé de balles ne devant être retrouvé dans fossé du côté de Canarotto cinq jours après l’entrevue avec le chef de poste du SIM. Quant à Jean-Baptiste, il avait simplement disparu en se rendant à une entrevue avec Eugène Deloncle, dans la soirée du 26 octobre 1936 [39]. L’implication des services italiens étant exclue [40], restait le docteur Martin… Même chose pour la mort de Laetitia Toureaux, le 16 mai 1937. Cette jeune veuve de vingt-neuf ans, originaire du Val d’Aoste, employée dans une fabrique de cirage à Saint-Ouen, était aussi une informatrice de l’agence de détectives Rouff, dirigée par Georges Rouffignac, de l’inspecteur Seltour , de la police judiciaire [41], et de l’ambassade d’Italie à Paris [42]. Ajoutons qu’elle entretenait une relation avec Gabriel Jeantet, et toutes les explications sont possibles (crime passionnel, lié au trafic d’armes entre la Suisse et la Cagoule ou à la préparation de l’assassinat des frères Rosselli), mais seule une chose était certaine : la « Maison Martin » avait démasqué la belle. Seulement, à la différence de Thomas Bourlier, personne au sein du CSAR n’avait pris sa protection… même pas Jeantet !
Une vingtaine d’années plus tard, la « Maison Martin » fut impliqué dans une nouvelle série de meurtres. Les cibles étaient des dirigeants du FLN en Europe, éliminés par le « Grand O » sur informations de l’ancien Cagoulard. A l’été 1961, entraîné par son gendre, qui a créé le Comité de résistance à la désagrégation (CRD) [43], la « Maison Martin » se lança dans une série d’attentats pour le compte de l’Organisation de l’Armée secrète (OAS) et visant des « barbouzes » gaullistes. Fin 1961, un bistrot de la rue de Gergovie était traité ; il abritait les réunions d’une « barbouze » et de deux agents du FLN et du KGB qui échangeaient des renseignement sur l’OAS. L’information provenait du SDECE [44]…
Le problème que rencontrait inévitablement Martin, dans son travail d’analyse du renseignement, était l’auto-intoxication. Comme il ne pensait qu’ « à son complot » [45], « le Docteur accueill [ait] toutes sortes d’informations avec une déconcertante naïveté… Le Bib était un incorrigible mythomane -alors qu’il était un praticien des plus sérieux !-et ses informations étaient du même ordre [46] . » Son parti pris anticommuniste l’amenait toujours à surestimer la menace, sinon à l’inventer. « Il ne cherch [ait] pas à vérifier et [avait] même tendance à transformer les suppositions en informations [47]. » Sa vie de conjuré était l’illustration de son absence de discernement face à l’information qu’il recueillait. A Vichy, lancé sur les traces de son ancien ami Eugène Deloncle, zélé collaborationniste parisien, il adhéra sans difficulté et sans réserve à la fiction que polytechniciens et hauts fonctionnaires de l’Etat français formaient une société secrète, la synarchie, qui s’était emparé du pouvoir [48]. Au cours de la décennie suivante, il plongea avec la même énergie dans la chasse à la « taupe » soviétique, avec une égale assiduité et les mêmes conséquences pour la carrière de certains que James Jesus Angleton, chef du contre-espionnage de la CIA entre 1954 et 1974, mit à poursuivre Sacha, cet agent de pénétration soviétique qui nicherait dans l’agence américaine [49]. A chaque fois, l’amalgame avait fait office de réflexion.
Comme toute officine de renseignement privée et légale, la « Maison Martin » devait faire face aux aléas du marché… à cette différence près que la conspiration reste, même en France, une occupation insolite. Cette condition d’emploi n’était pas sans conséquence sur ses analyses. Indéniablement, les années cagoulardes lui avaient été les plus prolifiques. Du printemps 1936 à l’automne 1937, elle appartenait à une structure à laquelle elle fournissait de l’information contre un financement régulier ; Eugène Deloncle avait de précieux « abonnés », comme le colonel Heurteaux et l’industriel Jacques Lemaigre-Dubreuil, qui surent pénétrer le grand patronat [50] et la haute banque protestante [51] français. Le cœur financier, sinon politique, de l’OSARN semblait se situer dans la zone de Clermont-Lyon [52]. Les premières années d’après-guerre furent plus dures. Pour financer son activité de renseignement, il ne songea nullement à reprendre l’exercice de la médecine [53], mais préféra vendre un immeuble familial du Raincy. Jusqu’en 1955 et le lancement d’une nouvelle conspiration, celle du « Grand O », son épouse fut sa seule collaboratrice et il vécut d’expédients procurés par ses amis, anciens et nouveaux. A cette époque, il obtint le soutien d’Alain de Mieulle, marquis d’Angosse, exploitant agricole domicilié dans le VIIIe arrondissement de Paris. Les subsides reçus lui permirent de payer papiers et timbres pour expédier ses notes de synthèses dans tout le pays et bientôt les billets d’avion pour se rendre en Algérie. En mai 1964, la « Maison Martin » se retrouvait à nouveau sans le sou. C’était la fin… Cinq ans plus tard, le 6 juin 1969, le docteur Martin s’éteignait dans l’hôpital où il avait été mobilisé dès son retour d’exil à San Remo (du 22 novembre 1937 au 31 août 1939)
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Le docteur Martin se plaisait à écrire que « la IIIe, la IVe, la Ve [l’avaie] nt poursuivi, arrêté ou recherché. Les prétextes les plus divers ont été évoqués » [54]. Mais de juillet 1923 à août 1960, il fut incarcéré un tiers de son existence, soit trois années et quatre mois en prison, réparties en cinq séjours, dont quatre à la prison de la Santé. S’ajoutaient encore vingt et un mois de fuite en Italie. A noter, l’Etat français, qu’il servit officiellement, lui infligea la plus longue peine (deux ans et deux mois). Sa connaissance, réelle ou supposée, de la donne politique française dérangeait. Ses fiches faisaient peur parce qu’elles ne servaient pas la légalité, mais étaient mises au service d’une conspiration, toujours différente, bien que toujours similaire. Jamais, il ne fut arrêté pour des actions illégales. Le renseignement qu’il recueillait était, somme toute, régulier.
Il importe toutefois de bien comprendre les époques successives où le docteur et les hommes qui peuplaient sa « Maison » opérèrent. Ces trente années furent une succession de périodes troublées pour l’histoire politique française. L’anticommunisme la parcourait en filigrane. Et l’explosion nationaliste européenne des années Trente expliquait la Cagoule et Vichy, tandis que l’agonie de la IVe république, sur fond de crise algérienne, justifiait le « Grand O » et l’OAS. Apparaissent ainsi deux biais pointés par Sherman Kent dans le travail d’analyste : l’environnement idéologique et l’enfermement dans sa propre logique.
Mais il convient de ne pas perdre de vue deux éléments. D’abord, la différence de chronologie : Martin entama sa « carrière » dans la France des années 1930, tandis que Kent formula ses conclusions professionnelles aux Etats-Unis trente ans plus tard. Enchaînant les complots comme une normalité, le premier ne vécut pas la scission que représentait la création de la CIA, après le mélange des genres qui présidait à l’OSS. La réflexion sur le cadre d’exercice des différents métiers du renseignement contemporain était rendu possible dans le cadre officiel par la réflexion politique même sur le type de service désiré. Ce changement de cadre, et il s’agit là du second élément, n’affecta jamais le docteur Martin. Passant de l’Action française à la Cagoule, puis à Vichy, à l’anti-gaullisme, à l’anti-européanisme et l’Algérie française, il ne servit que les mêmes deux causes : l’anticommunisme et le nationalisme intégral. L’effet final recherché restant le même, les méthodes le demeurèrent également.
- [1] L’affaire Clearstream est une affaire politico-judiciaro-méditique française débutant en 2001 et toujours en jugement en avril 2009. Elle repose sur deux axes principaux. L’un concerne le blanchiment d’argent (2001-2002) pour lequel la justice luxembourgeoise, où se trouve le siège de l’entreprise éponyme, a rendu un non-lieu en 2004. Le second est proprement franco-français et commence en 2004 ; il prend prétexte la lutte d’influence entre deux factions au sein de la direction du groupe EADS, poursuivant les luttes entre Airbus-Matra-System et Thalès d’avant la fusion, notamment autour de la vente de frégates à Taïwan. Des personnalités politiques françaises semblent impliquées, laissant croire à une tentative de déstabilisation à l’approche de la présidentielle du printemps 2007.
- [2] Cf. l’incontournable somme d’Alain Dewerpe justement intitulée Espion. Une anthropologie historique du secret d’Etat (Paris, Gallimard, 1994).
- [3] Cf. Jack Davis, « Sherman Kent and the Profession of Intelligence Analysis », The Sherman Kent Center for Intelligence Analysis Occasional Papers , vol. 1, n° 5, novembre 2002, pp. 9-12.
- [4] Citée par Jean-Louis Philippart, « Le docteur Martin, dit le Bib, conspirateur de la Cagoule », Anovi 1933-1939 : La montée des périls, http://www.guerre-mondiale.org/article.php?num=68
- [5] Selon l’acte de remise en liberté du 25 novembre 1947 [Archives de Paris (AP), 212/79/3, carton 47].
- [6] Dans un article éponyme publié dans Ici et ailleurs en juin 1969.
- [7] Archives nationales, Paris (AN), F7 13 195, note de la Sûreté générale du 19 octobre 1926.
- [8] Ibid. , F7 13 194, Relevé d’écoutes téléphoniques du 15 décembre 1927.
- [9] Eugène Weber, L’Action française (Paris, Hachette, 1990), p. 306.
- [10] AN, F7 13 199, notes de la Sûreté des 28, 30 et 31 octobre 1929.
- [11] Pierre Péan, Le mystérieux Docteur Martin. 1895-1969 (Paris, Fayard, 1996), pp. 77-87, 391, 468. Le travail du seul véritable biographe du docteur Martin sera largement utilisé pour ce travail.
- [12] Ibid. , pp. 367-369 ; National Archives and Records Administration, College Park (MD), RG 226.6.3, rapports du captain Thompson du 29 octobre 1944 et de Henry Hyde du 3 février 1945 ; Philippe Bourdrel, La Cagoule. 30 ans de complots (Paris, Albin Michel, 1970), p. 267 ; Francis Balace, « Les mouvements léopoldistes », Michel Dumoulin, Mark van den Wijngaert, Vincent Dujardin, Léopold III (Bruxelles, Complexe, 2001), pp. 292-293.
- [13] Comme l’appelle son biographe, Pierre Péan, passim .
- [14] Cité par Pierre Péan, op. cit. , p. 373.
- [15] Pierre Péan, op. cit. , p. 110.
- [16] L’éditeur de ses carnets, Christian Bernadac, ne parvient pas à se décider si Dagore était un secrétaire du docteur Martin, son archiviste ou alors le comptable de Gabriel Jeantet, chargé des achats d’armes [ Carnets secrets de la Cagoule (Paris, France Empire, 1977), p. 17]. Le réquisitoire définitif concernant l’affaire de l’Organisation secrète d’action révolutionnaire nationale du 1er juillet 1939 en faisait néanmoins le chef du Deuxième Bureau du CSAR [AP, 212/79/3, carton 46, p. 67].
- [17] Ibid. , p. 390.
- [18] AP, 212/79/3, carton 20.
- [19] Ibid. , carton 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, p. 67.
- [20] Témoignage de Jacques de Place dans Pierre Péan, op. cit. , p. 112.
- [21] AP, 212/79/3, carton 47, procès-verbal de la seconde audition du docteur Martin après son arrestation du 24 mars 1942.
- [22] Témoignage de Jacques de Place dans Pierre Péan, op. cit. , p. 111.
- [23] Cf. « Rita T. Kronenbitter », « The Illustrious Career of Arkadiy Harting », https://www.cia.gov/library/center-for-the-study-of-intelligence/csi-publications/books-and- monographs/okhrana-the-paris-operations-of-the-russian-imperial-police/art2.pdf
- [24] Témoignage de Jacques de Place dans Pierre Péan, op. cit. , p. 151.
- [25] Philippe Bernert, Roger Wybot et la bataille pour la DST (Paris, Presses de la Cité, 1975), pp. 15-17.
- [26] AP, 212/79/3, cartons 24, 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, pp. 275-283, et 49, procès-verbal Georges Groussard à Robert Lévy du 11 février 1945 et déposition de Georges Loustaunau-Lacau du 4 février 1946. Cf. aussi Georges Loustaunau-Lacau, Mémoires d’un Français rebelle (Paris, Robert Laffont, 1948), p. 98.
- [27] Georges Loustaunau-Lacau, op. cit. , pp. 85-108. Simon Epstein, Un paradoxe français. Antiracistes dans la collaboration, antisémites dans la Résistance (Paris, Albin Michel, 2008), pp. 399-402.
- [28] AP, 212/79/3, carton 50, rapports du commandant Roberto Navale au colonel Emmanuele Santo des 29 janvier, 3 février, 12 août 1937, et carton 49, procès-verbaux d’audition de l’ambassadeur Filippo Anfuso, ancien chef de cabinet du ministre des Affaires étrangères fasciste, le comte Galeazzo Ciano, par Léon Dauzas, le 19 octobre, et Robert Lévy, le 9 novembre 1945.
- [29] Cf. le rapport de Navale au colonel Emmanuele Santo du 2 avril 1937 in Clara Conti, Servizio segreto. Cronache e documenti dei delitti di Stato (Rome, De Luigi Ed., 1945), p. 234-239. Giuseppe De Lutiis estime que le « Ed » du rapport Navale pourrait être le niçois Joseph Darnand [ I servizi segreti in Italia. Dal fascismo alla seconda Repubblica (Rome, Edizioni Riuniti, 1998), pp. 27-30]. En fait, après Pierre Péan [ op. cit. , p. 145], Brigitte Delluc, Gilles Delluc précise qu’il s’agissait bien de Ménétrel [ Jean Filliol, du Périgord à la Cagoule, de la milice à Oradour (Périgueux, Pilote 24, 2005), p. 54].
- [30] AP, 212/79/3, carton 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, pp. 132-133.
- [31] Témoignage de Jacques de Place dans Pierre Péan, op. cit. , p. 112.
- [32] Simon Epstein, op. cit. , p. 410.
- [33] Son implication n’est même pas mentionné dans le rapport du commissaire Valentin du 6 juillet 1937 [AN, F7 160242]. Cf. aussi AP, 212/79/3, carton 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, pp. 156-165 et Christian Bernadac (éd.), Carnets secrets… , op. cit. , p. 303.
- [34] Pierre Péan cite ainsi une note du docteur Martin du 30 mai 1935 le liant à Pierre Cot avec il était « très intime » [ op. cit. , p. 88]. Le « Jeune Turc » du Parti radical était alors redevenu député de la Savoie, après avoir été pendant un an ministre de l’Air de différents gouvernements.
- [35] Ibid. , p. 124.
- [36] AP, 212/79/3, carton 43, rapports des inspecteurs Simon et Bascou des 13 janvier et 3 mars 1939.
- [37] Christan Bernadac (éd.), op . cit. , pp. 38-39.
- [38] AP, 212/79/3, carton 50, rapport du commandant Roberto Navale au colonel Emmanuele Santo du 3 février 1937.
- [39] Ibid. , cartons 11 et 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, pp. 103-124, 129-134 et 319-350. Juif devait soupçonner quelque chose. Dès octobre 1936, il avait expédié à Jean-Baptiste, poste restante à Lille, deux males contenant des preuves explicites des activités criminelles de la Cagoule : factures d’armes, adresse du principal marchands d’armes belges et les noms de quelques membres du CSAR, dont Deloncle. Cinq mois plus tard, elles étaient ouvertes par les services compétents, déclenchant une enquête de la Sûreté qui relia les mort et disparition au CSAR dès le mois de mai 1937 [AN, BB18, rapports du procureur général de Douai au ministre de la Justice des 5 mars et 12 mai 1937]. Six mois plus tard, la Cagoule était démantelée.
- [40] Joel Blatt semble plutôt soutenir cette thèse, liant le retour de Deloncle et Duseigneur de Rome à la disparition de Jean-Baptiste, ce qu’infirme toutefois le rapport de Navale [« The cagoule Plot, 1936-1937 », Kenneth Moure, Martin S. Alexander (dir.), Crisis and Renewal in France, 1918-1962 (New-York, Berghahn Books, 2002), p. 90].
- [41] AN, F7 14816, Meurtres attribués au CSAR (…) Laetitia Toureaux (1937-1939) ; Archives de la préfecture de police, Paris, Ea/137 III, « L’affaire Laetitia Toureaux » ; Annette Finley-Croswhite, Gayle K. Brunelle, « ‘Murder in the Metro’: Masking and Unmasking Laetitia Toureaux in 1930s France », French Cultural Studies , 2003, n° 14, pp. 53-80.
- [42] Philippe Bourdrel, op. cit. , p. 151.
- [43] Claude Faure, Aux services de la république (Paris, Fayard, 2004), p. 295.
- [44] Pierre Péan, op. cit. , p. 458.
- [45] Témoignage de Luc Robet dans Pierre Péan, op. cit. , p. 393.
- [46] Henry Charbonneau, Les Mémoires de Porthos (1920-1943) (Paris, Clan, 1967), pp. 194-195.
- [47] Roger Stéphane, Chaque homme est lié au monde , 1 (Paris, Sagittaire, 1946), p. 250 et Tout est bien (Paris, Quai Voltaire, 1989), p. 150.
- [48] Cf. Pierre Péan, op. cit. , pp. 243-294 et Richard F. Kuisel, « The Legend of the Vichy Synarchy », French Historical Studies , vol. 6, n° 3, printemps 1970, pp. 384-388.
- [49] Sur cette question, cf. Gérald Arboit, James Jesus Angleton, le contre-espion de la CIA (Paris, Nouveau monde, 2007), pp. 129-142.
- [50] René de Peyrecave de Renault , Schueler de L’Oréal , Pierre Michelin (Clermont), Bernard de Revel (Marseille), Pavin de Lafarge , Gibbs, Violet de Byrrh . La police suspecta que les Chantiers de Saint-Nazaire , le Syndicat de l’industrie lyonnaise et Pont-à-Mousson aient également contribué au budget de l’OSARN/CSAR.
- [51] Mirabaud, Hottinguer, Neuflize.
- [52] AP, 212/79/3, carton 46, réquisitoire définitif, op. cit. , 1939, pp. 245-248.
- [53] De toute façon, il n’avait guère fait payer ses clients avant-guerre… Cf. Pierre Péan, op. cit. , p. 59.
- [54] Lettre de Martin à « Mon cher ami » d’avril 1960, cité par Pierre Péan, op. cit. , p. 449.