Le sous-réseau belge du poste de limoges du SR Air
Etienne VERHOEYEN
Historien, correspondant du Centre d'Etudes et de Documentation
« Guerres et Société Contemporaine » (CEGES), Bruxelles (Belgique)
L'AVANT-GUERRE
L'origine du groupe belge qui était traité par le poste P3 Av de Limoges remonte à 1939[2]. En effet, en octobre de cette année, Emile Kraemer devint l'adjoint de l'attaché militaire français, rue Brialmont, à Bruxelles, où il devait s'occuper plus spécialement des affaires se rapportant à l'aviation. Officiellement, il est arrivé en Belgique le 25 novembre 1939 en tant que « secrétaire de M. l'Attaché de l'Air »[3]. Né en 1898 à Metz, il aurait été actif dans les services secrets français depuis 1916. En septembre 1939, il fut rappelé sous les drapeaux et affecté au 5e Bureau de l'état-major général des armées (EMGA), Section Air. Avant d'être attaché au poste de Bruxelles, il avait été, entre autres choses, commissaire de police à Charleville-Mézières (Ardennes). Il est à remarquer qu'en octobre 1939 au plus tard, son nom réel et plusieurs pseudonymes (« Enderlin », « Sinaud ») étaient connus par les services secrets allemands. En effet, Kraemer figure sur une très longue Sonderfahndungsliste, compilée en 1939 par les services de renseignement allemands[4]. Apparemment, ces connaissances allemandes n'ont pas eu de suite pour Kraemer lui-même.
Lorsqu'il fut attaché au poste de Bruxelles, la mission de Kraemer était de rassembler des renseignements sur les formations de la Luftwaffe dans la région ouest de l'Allemagne, d'identifier des terrains d'aviation et de recruter des agents belges sur l'Allemagne. Il monta dans ce but un réseau de bateliers sur le Rhin jusqu'à Mayence et un réseau frontalier qui s'étendait de Liège à Luxembourg en passant par Aix-la-Chapelle[5].
Nous savons très peu de choses sur les activités de Kraemer à Bruxelles entre octobre 1939 et mai 1940. C'est ainsi que nous ignorons tout sur le réseau frontalier et presque tout sur le réseau de bateliers. Notre connaissance de son travail de recrutement est sans doute très fragmentaire et incomplète. Mais il est établi qu'il a recruté un industriel flamand du nom de Otto De Maeyer, qui deviendra plus tard le personnage central du sous-réseau dont il sera question ici[6].
Etant donné que plusieurs membres de la famille De Maeyer ont, tôt ou tard, été impliqués dans le travail du SR Air, il paraît utile de nous arrêter un instant auprès de cette famille tout à fait remarquable. La famille De Maeyer est originaire de la commune de Bornem, dans la province d'Anvers. Animée d'un patriotisme ardent et active dans la vie industrielle de la région, elle y était bien connue. Plusieurs de ses membres, dont au moins un frère d'Otto ainsi que leur père, avaient des dons artistiques, qui s'exprimaient notamment dans le domaine de la musique (Walter De Maeyer, frère d'Otto, était un excellent musicien et un compositeur de valeur). Le père d'Otto De Maeyer, Théodore (1872-1949) avait déjà mérité de la patrie pendant la Grande Guerre. Il a fait partie d'un réseau de renseignements et de passage que nous n'avons pu identifier, mais qui est probablement d'origine anglaise[7]. Son fils aîné, Guillaume-Benoit (Willy), né en 1895, s'était engagé en 1914 comme volontaire dans l'armée belge. Il fut grièvement blessé en 1917 et y perdit une jambe. Des autres enfants de Théodore De Maeyer (Walter, Dirk, Elisabeth, Frédéric, Otto, Brunhilde et Raphael), seuls Dirk (Thierry) et Otto joueront un rôle dans notre histoire.
Théodore De Maeyer, qui s'était établi comme industriel du textile, fit en sorte que ses enfants puissent s'engager dans la même voie. C'est ainsi que Walter De Maeyer dirigeait la S.A. Tissage de Bornhem, que Willy travaillait dans l'usine paternelle, et qu'Otto devint, en 1929, administrateur-directeur d'une S.A. nouvellement créée dénommée ATTA (Auxiliaire du Tissage, Teinturerie et Achèvement[8]). Auparavant, Otto De Maeyer voulait devenir officier de marine. Il a d'ailleurs suivi des cours qui pouvaient y mener ; sur l'acte de constitution de la S.A. ATTA, il est qualifié « d‘officier de marine ». Ayant fait un stage dans les usines allemandes d'I.G. Farben, très importantes dans l'industrie chimique se rapportant au textile, il s'est engagé dans la teinturerie de coton et de soie. L'usine d'Otto De Maeyer se trouvait au lieu-dit « Briel » ou « Ouden Briel », partiellement sur le territoire de la commune de Buggenhout et sur celui de la commune de Baasrode, près de Termonde (Flandre Orientale). Rien ne subsiste actuellement des bâtiments.
Vers 1930, Otto De Maeyer et ses frères participaient activement à la vie politique, qui était, entre autres choses, marquée à la fois par un regain du nationalisme belge (la Belgique a fêté ses cent ans en 1930) et par l'extension d'un nationalisme flamand imprégné d'un fort courant anti-belge. Ce nationalisme belge s'exprimait notamment par l'action d'organisations d'anciens combattants de 14-18, dont certains se muaient en mouvement politique et, parfois, se rapprochaient du fascisme. Parmi ces derniers, la Légion Nationale était la plus connue. Fondée en 1922, Elle avait évolué d'une organisation d'anciens combattants, très opposée au nationalisme flamand, vers un mouvement d'extrême droite proche du fascisme, tout en restant anti-allemande. L'organisation n'était pas inconnue des services secrets français. Son chef, l'avocat liégeois Paul Hoornaert, eut en juillet 1934 un entretien avec « M. Henri » et « T 16 ». « M. Henri » est Henri Javaux, agent français depuis 1914, qui lors de l'entretien faisait probablement fonction de représentant du SR français ; « T 16 » est Marthe Ramoisy, inspectrice de l'enseignement à Liège qui, elle aussi, était au service de la France depuis 1916. Hoornaert souligna la « francophilie active » de la Légion nationale qui, selon lui, ne pouvait pas être qualifiée de fasciste et qui ne prenait pas au sérieux les tentatives de rapprochement qui venaient surtout du côté d'organisations fascistes italiennes. Bien au contraire, la fermeté de la Légion au point de vue patriotique et son action contre tout séparatisme d'où qu'il vienne, étaient selon Hoornaert, un moyen de préserver la jeunesse de la tentation fasciste et nazie[9]. En fait, Hoornaert n'était déjà plus un inconnu pour les services spéciaux français depuis les années vingt[10].
L'opposition entre le nationalisme belge et le nationalisme flamand se manifesta violemment en 1929, à l'occasion de l'élection comme représentant (alors qu'il était encore en prison !) de l'ancien chef activiste August Borms, condamné à mort après 1918 pour cause de collaboration. Il fut libéré peu après son élection et les nationalistes flamands organisaient dans plusieurs villes et localités dse Flandres des manifestations en son honneur. C'est lors d'une de ces manifestations à Bornem, en juillet 1930, que des incidents assez violents opposèrent les deux camps. Du côté de la Légion nationale et des anciens combattants, les frères De Maeyer participèrent activement à l'action[11]. En janvier 1931, de nouveaux incidents eurent lieu à Bornem entre des nationalistes flamands et des membres de la section anversoise du mouvement de jeunesse de la Légion nationale, Jeunes Belges. Ces jeunes avaient été amenés d'Anvers à Bornem (distance : une vingtaine de kilomètres) dans des camionnettes appartenant à Willy De Maeyer et à Joseph Taverniers, dont il sera encore question.
Il est possible que cette activité ou l'appartenance des frères De Maeyer à la Légion Nationale, ou éventuellement l'activité de Willy De Maeyer dans des organisations d'anciens combattants, aient attiré l'attention des services français. En tout cas, après la guerre, c'est Willy De Maeyer qui revendiqua d'avoir été le premier à se mettre au service des Français, sa famille et surtout son frère Otto l'ayant « secondé dans cette tâche ». Willy De Maeyer situe son propre recrutement en décembre 1939. Il dit avoir été recruté par « Mercier » (alias de Kraemer) et par un M. Fricquegnon, que nous n'avons pu identifier plus amplement.
Il n'est toutefois pas établi que le recrutement des De Maeyer s'est fait par cette voie, en quelque sorte politique. Il y a en effet une autre possibilité. Le 16 mai 1938 fut constituée à Bruxelles la S.A. Socrinex, dont l'objet était de « favoriser et de faciliter l'établissement, la création et le développement d'industries, branches d'industries ou commerces en Belgique, en vue essentiellement de conquérir de nouveaux débouchés à l'étranger »[12]. Il s'agissait d'une société import-export, qui, selon une de ses employée, agent général pour le département couture, ne servait en réalité que de paravent à l'activité du 2e Bureau français en Belgique. Selon elle, l'administrateur délégué de la société, Marcel Liljeblad, était attaché à la Mission militaire française, rue Brialmont à Bruxelles[13]. Des preuves formelles manquent à ce sujet. Toujours est-il que le colonel Verneuil, liquidateur des réseaux SSMF-TR, a bien voulu communiquer en 1949 à la Mission belge de liaison à Paris que « M. Lillienbladt [sic] alias Gravier a cessé d'être en rapport avec nous [le SR] après le mois de mai 1940 »[14] – ce qui est une façon de confirmer qu'il l'était bien avant le 10 mai 1940. Il est donc possible qu'Otto De Maeyer ait d'abord eu des contacts professionnels avec la S.A. Socrinex, qui traitait notamment des robes et des manteaux, et que c'est ainsi que l'attention des services secrets français a été retenue. Liljeblad, né à Paris en 1890 et ayant son domicile légal à Strasbourg, était « pensionné de l'Etat français ». Il s'était installé à Bruxelles en juin 1937 au plus tard. En mai 1938, il s'installa au siège de la Socrinex, 138 rue Royale à Bruxelles, avec une femme allemande. Il voyageait beaucoup en France et en Allemagne.[15]
Il semble bien que Liljeblad avait constitué un noyau de collaborateurs belges, parmi lesquels il faut citer : Roger Dister (directeur de la S.A. Socrinex et secrétaire de Liljeblad), Otto De Maeyer, Arthur De Sutter (inspecteur à la Société nationale des chemins de fer belges/SNCB) et Georges Vanbergen (sous-chef de station à la gare de triage de Schaerbeek). Ce petit groupe aurait donné son assentiment de travailler pour la France, sans toutefois aller au-delà. L'un d'eux écrivit après la guerre, dans une lettre privée : « Certes, nous avions été pressentis avant le 10 mai 1940, mais, malgré toute notre sympathie, nous avons refusé toute intervention directe en raison de la neutralité de notre pays »[16]. Il semblerait que le « groupe Gravier » (Liljeblad) avait été chargé d'une mission de sabotage, probablement sur les transports vers l'Allemagne. En effet, dans la même lettre, Vanbergen précise : « Le 10 mai [1940], en compagnie de Liljeblad, j'ai rendu visite à votre frère [Otto De Maeyer] pour y faire certain dépôt, visite répétée le 13 mai. A partir de ce moment, je n'ai plus quitté Liljeblad ». Ils avaient en effet l'intention de créer d'autres « nids de résistance ». Mais, en raison de « difficultés insurmontables », ils décidèrent de livrer leur « marchandise » au major Mampuys, chef du service de renseignement militaire belge, avec lequel ils avaient été mis en rapport à Bruges. Ceci constitue – selon Vanbergen – la preuve de ce que « nous avions dès mai 1940 constitué des centres de résistance et que nous dotions ces centres d'un matériel perfectionné qui fit les délices du major Mampuys ». Ce dépôt de matériel dans l'usine ATTA d'Otto De Maeyer fut confirmé après la guerre par un ami intime de Otto De Maeyer, Louis Willaert, ouvrier à l'ATTA. Selon Willaert[17], Vanbergen et un « M. X » ont amené des explosifs à l'ATTA et chez Willaert lui-même[18]. Un autre ami de Otto De Maeyer, Charles Van der Vreken, garde champêtre à Buggenhout, déclara à la même époque qu'il savait depuis 1939 « qu'une bombe à retardement serait placée sur un navire allemand à Anvers ». Sur une feuille de papier, quelqu'un – probablement sous la dictée de Vanbergen – a griffonné ce qui suit en rapport avec le dépôt fait à l'ATTA et ailleurs : « 10 mai et 14 mai déposé Buggenhout chez L.Willaert un dépôt – bombes incendiaires, explosifs, percuteurs, matériel de sabotage »[19]. De plus, l'acte d'accusation allemand de trois collaborateurs d'Otto De Maeyer dans le SR Air 40 mentionne le fait que « des explosifs se trouvaient depuis avant la guerre dans une entreprise de transport de la Chaussée de Mons à Bruxelles »[20]. Selon Arthur De Sutter, il y avait également des dépôts à Deinze et Ledeberg, près de Gand.
Il semble donc, en tout cas, qu'Otto De Maeyer était connu, dès avant le 10 mai 1940, de Liljeblad. Si cela n'avait pas été le cas, on ne conçoit pas comment Liljeblad et Vanbergen aient pu déposer dans son usine des explosifs dont l'usage se laissait deviner facilement. La Belgique n'était d'ailleurs pas le seul pays où les services français avaient déposé des explosifs avant le 10 mai 1940. Dans ses mémoires, le chef de l'antenne du SR français à Luxembourg, rapporte que des explosifs avaient été déposés à la Maison du Peuple à Luxembourg-ville, qui devaient être utilisés par des syndicalistes luxembourgeois. Le but était « d'apporter un appui efficace au système défensif luxembourgeois entre la frontière et la position d'arrêt [de l'armée française]. Des reconnaissances sur le terrain avaient permis de déterminer une première série de destructions »[21] Il cite notamment des ponts de chemin de fer qui avaient été minés. Toujours après la guerre, Arthur De Sutter, membre du « groupe Gravier », a affirmé que les explosifs fournis au groupe étaient destinés à « saboter l'envoi de matériel et de vivres en Allemagne ». Selon lui, douze trains de marchandises et de matériel furent repérés. « Le plan d'action fut mis à exécution en gare de Schaerbeek-Formation [où De Sutter était sous-chef de gare], Merelbeke, Anvers, Bressoux et surtout Montzen, d'où des milliers de wagons s'acheminaient vers l'Allemagne ». Mais comme De Sutter ne donne pas de précisions (pas de dates, par exemple), il est quasi impossible de vérifier ses dires. De plus, en 1948, le service de liquidation du réseau ‘Kléber', qui regroupait tous les agents des services spéciaux français, fit savoir à l'administration belge « qu'avant mai 1940, les succès des missions de sabotage dont se vantait le dit Gravier dans certains milieux, semblaient très contestables »[22]
Si nous ne savons pas précisément comment Otto De Maeyer est entré en contact avec Kraemer (par la Socrinex, par son frère Willy, par la Légion Nationale ou encore autrement ?) nous pensons quand même avoir retracé quelque peu les milieux dans lesquels évoluait la famille De Maeyer et qui ont pu contribuer à une prise de contact de la part des services secrets français. Quant au réseau de bateliers que Kraemer devait créer, nous ne connaissons qu'un batelier de Baasrode, Aloïse Van den Eynde, qui fut recruté en 1939. Selon une brève notice du commandant Rupied, liquidateur des réseaux SR Air 40, Van den Eynde avait « été recruté en juin 1939 par Othon De Maeyer. A fait plusieurs voyages sur le Rhin entre la frontière belge et Mayence, et a fourni des renseignements importants sur les positions de DCA le long du Rhin »[23]. Kraemer ne semble pas avoir été le seul à constituer un groupe de bateliers. Paul Potocki, directeur de l'entreprise de navigation Worms & Co à Anvers, et attaché à l'antenne du SR français dans la même ville, s'intéressait lui aussi à la batellerie, dans laquelle il essayait de recruter des agents pouvant fournir des renseignements sur l'Allemagne[24].
Quant au réseau frontalier, comme nous l'avons dit, nous n'en savons rien. Kraemer avait recruté un agent à Verviers, en février ou mars 1940, et un autre à Liège, mais nous ignorons si c'était dans le but de fonctionner à la frontière allemande. Ces agents n'ont pas continué à travailler pour le SR Air 40 après l'invasion.
L'OCCUPATION
En mai 1940, les frères De Maeyer quittent la Belgique pour se replier en France. Willy y réussit, mais Otto n'arrive pas plus loin que le Nord de la France et rentre assez vite dans son foyer (il est marié et a quatre enfants). Emile Kraemer, leur officier traitant, se replie également en France. Lors de la constitution du SR Air 40 en été-automne 1940, il est attaché au poste de Limoges, qui va s'efforcer de rassembler des renseignements sur la présence allemande dans les secteurs ouest et nord de la zone occupée et en Belgique. C'est probablement en septembre à Clermont-Ferrand, où une partie des services secrets français s'est installée, que Willy De Maeyer retrouve Kraemer, qui a été chargé notamment de regrouper les anciens agents belges réfugiés en zone libre et d'en recruter de nouveaux.
Egalement à Clermont-Ferrand et à la même époque, Willy De Maeyer est mis en rapport avec son compatriote Maurice Simon. Celui-ci, né en 1903, est depuis 1928 directeur commercial en Belgique de His Master's Voice. Ayant suivi lui-même avant la Grande Guerre les cours de l'Ecole française, boulevard Poincaré à Bruxelles, il y envoie aussi ses propres enfants. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de Marc Fluhr, d'origine alsacienne, secrétaire général de l'école et directeur à la Chambre de commerce française à Bruxelles. Fluhr est capitaine de réserve et, selon Simon, agent du 2e Bureau français ayant son bureau rue de Brialmont (ce qui implique qu'il ait pu connaître Kraemer et Liljeblad)[25]. Simon se met bénévolement à la disposition de Fluhr pour lui fournir des renseignements. En même temps, Simon est approché par un dirigeant de sa société, qui lui demande de lui fournir « toute propagande allemande répandue en Belgique ». Parti en Grande-Bretagne en mai 1940, Simon y reçoit presque immédiatement une mission en Belgique occupée. Selon l'ancien dirigeant de la section belge du Special Operations Executive (SOE), la mission confiée à Simon était triple : rassembler des informations sur les papiers d'identité pour la Belgique ; examiner les possibilités d'y faire paraître des journaux clandestins ; et contacter un ancien dirigeant du 2e Bureau français[26], qui était plus que probablement Fluhr. Simon est débarqué d'une vedette anglaise dans l'embouchure de la Gironde, à Verdon, le 18 juin 1940. Il avait été convenu avec lui, avant son départ, qu'il serait repris sur la côte belge le 15 août ou le 15 septembre, mais ce rembarquement n'eut pas lieu.
Après bien des avatars, Simon parvient à rencontrer Fluhr à Royat, probablement fin juillet ou début août 1940. Celui-ci l'introduit auprès de Willy De Maeyer, qu'il ne semble pas avoir connu auparavant. Par De Maeyer, Simon est mis en rapport avec « un nommé Mercier, que je me souviens avoir connu à l'ambassade France à Bruxelles », dira-t-il en 1942 à Lisbonne. Cette présentation a lieu, non pas à Clermont-Ferrand, mais à l'Hôtel de la Croix Verte à Limoges[27]. « René Mercier » est le pseudonyme adopté par Kraemer lors de la constitution du SR Air 40. Il propose à Simon de remonter en Belgique, d'y recontacter Otto De Maeyer et de lui demander de venir rejoindre Kraemer et son frère Willy. Simon accepte la proposition ; la prise de contact avec Otto De Maeyer a lieu fin octobre 1940 par l'intermédiaire du père d'Otto De Maeyer, qui habite Bruxelles. Suite à cette démarche de Simon, Otto De Maeyer rejoint son frère Willy en décembre à Clermont-Ferrand. Le mois suivant, il est inscrit officiellement au SR Air 40 sous le nom de « Louis Marin ». Il reste en France jusqu'en mai 1941. Pendant les premiers mois de 1941, il accomplit plusieurs missions pour le poste de Limoges, notamment dans le nord de la France et dans la région de Bordeaux, mais nous ne savons pas en quoi consistaient ces missions.
Entre temps, en Belgique, Simon semble avoir formé un noyau de collaborateurs parmi lesquels on compte Théodore De Maeyer père, son fils Dirk, Félix Verdeyen (qui gérait une passementerie à Bruxelles) et son employé Henri Vincent. En février 1941, Dirk De Maeyer recrute à Bornem un ami de la famille, Joseph Taverniers, dont il a déjà été question au sujet des incidents qui se sont déroulés à Bornem en 1930. Taverniers, qui gérait une firme de location de voitures, conduisait aussi une voiture d'ambulance de la Croix Rouge de Belgique, section d'Anvers. Il est, en 1940-41, toujours membre de la Légion nationale, mouvement que les Allemands ont d'abord toléré et qu'ils finissent par interdire en septembre 1941 après la découverte d'un dépôt d'armes (autres que ceux laissés en Belgique par le « groupe Gravier »). Taverniers est présenté à Simon, qui décide de l'employer comme courrier vers la France. Le 5 mars 1941, Taverniers quitte la Belgique pour rejoindre les forces armées belges en Grande-Bretagne. Simon le met en rapport avec Vincent, d'où Taverniers emporte un premier courrier. Taverniers doit déposer ce paquet à l'Hôtel Helvetia, boulevard Diderot à Paris, à l'intention de « monsieur Mangin ». Plus tard, Taverniers, après être entré en contact avec Kraemer et Otto De Maeyer à Limoges, apprendra que « Mangin » n'est autre que Otto De Maeyer, « qui, à Limoges, s'appelait Marin ». Ce dépôt de courrier suppose un contact préalable – soit personnellement soit par courrier – entre le poste de Limoges et Simon. Il est possible que quelques Belges résidant à Paris aient servi de relais. Simon y aurait recruté, pour le SR Air 40, le Belge Edmond Verbruggen, né à Anvers en 1896, habitant rue de Tournon. Volontaire de guerre 14-18 au 14e de Ligne, il est à Paris vice-président des Volontaires de guerre belges en France. Dès mars 1941, il est en rapport avec Otto De Maeyer et héberge Simon et Taverniers. Mais les liaisons entre Limoges et Paris semblent loin d'être parfaites, car, une fois présenté à Kraemer par Otto De Maeyer, Taverniers reçoit la mission d'aller chercher lui-même le courrier qu'il a déposé à Paris. Il profite de ce voyage pour aller chercher du courrier à Lille (où il recrute son cousin Edmond Anné) et à Bruxelles. Il fera un voyage pareil en avril 1941. En cette occasion, il remplit une « mission de liaison concernant la mise en service de postes émetteurs en zone occupée », notamment à Bruxelles. Dans ce but, il est mis en contact par Théodore De Maeyer avec « une personnalité de la Banque de Bruxelles »[28].
Cette affaire de postes émetteurs est loin d'être claire. A la même époque, en tout cas, plusieurs officiers de renseignement français (pas forcément du SR Air) désirent établir une liaison radio avec Bruxelles. Une de ces tentatives débouche aussi, curieusement, à la Banque de Bruxelles. En février 1941, l'officier belge Jean Cassart, va, à la demande du capitaine Leman, chef du poste du Bureau des menées antinationales (BMA[29]) de Limoges, établir une première liaison, dont un premier essai réussit partiellement le 24 février. Un deuxième essai, quelques semaines plus tard, est un échec et les officiers intéressés concluent qu'il faut recommencer à zéro[30]. Ceci aura lieu peu de temps après, par l'intermédiaire de l'officier aviateur belge Raymond Jamar, ami de Cassart. Par l'officier BMA Chabot, en poste à Marseille, Jamar est mis en rapport avec un capitaine de l'air français nommé « Marcel ». Jamar le rencontre à l'Hôtel du Faisan à Limoges. « Marcel » lui demande de réaliser une liaison radio entre Bruxelles d'une part, Limoges et Montpellier, d'autre part. En mai 1941, Jamar reçoit deux postes des mains de Leman, qui lui procure un contact avec « Barry » (le capitaine Boué, futur officier traitant du SR Air 40) à Argenton-sur-Creuse (Indre). Celui-ci lui donne l'adresse d'un passeur à La Haye-Descartes, en Indre-et-Loire, le vétérinaire André Goupille, qui peut facilement circuler des deux côtés de la ligne de démarcation. Jamar utilise cette filière (et le passeur René Fleury sur la ligne rouge de la Somme) pour remonter en Belgique, où il délivre un poste récepteur à Fernand Kerkhofs, chef du service d'information de la Brufina, holding de la Banque de Bruxelles[31]. Pour autant que nous sachions, cette liaison entre la Belgique et le Midi de la France ne s'est jamais réalisée.
Au cours de son voyage d'avril 1941, Taverniers rencontre Simon à Paris, qui lui remet des documents et lui demande de ménager un rendez-vous avec Otto De Maeyer sur la ligne de démarcation (ce rendez-vous aura lieu à Vierzon). Après son retour, Taverniers est chargé par Kraemer de visiter des camps pour travailleurs étrangers afin de recruter des Belges qui y sont employés.
Début mai 1941, en compagnie d'Otto De Maeyer, Taverniers remonte une fois de plus vers le nord, en passant la ligne de démarcation à Vierzon. De Maeyer est chargé de constituer un réseau en Belgique ; Taverniers devra assurer la liaison entre De Maeyer et le poste de Limoges. Il rentre en France, cette fois en passant par Nancy, où il récolte du courrier auprès d'Edmond Gérard, mécanicien à l'arsenal de la SNCF, dont Taverniers a déjà fait la connaissance à Limoges. En août 1941, Taverniers remonte de nouveau vers la Belgique. Cette fois, il passe la ligne de démarcation près de Poligny (Jura), ce qui suggère qu'il a été guidé par des agents de l'antenne avancée du poste de Lyon, laquelle est dirigée depuis septembre 1940 par le Belge « Roger de Saule »[32]. Il arrive à Bruxelles le 5 août, où il apprend qu'Otto De Maeyer et son propre frère René viennent d'être arrêtés la veille.
Pour expliquer cette « casse », il faut revenir quelque peu en arrière. Le 19 juillet 1941, Simon est arrêté à Bruxelles, où il était directeur à la Corporation nationale de l'alimentation et de l'agriculture. Cette arrestation semble être la suite d'autres arrestations effectuées antérieurement parmi des relations de Simon. En effet, le 9 juin 1941, la Geheime Feldpolizei arrête à Bruxelles Félix Verdeyen et son employé Henri Vincent. C'est par Vincent que Taverniers a été mis, en mars 1941, dans une filière d'évasion très incertaine qui passait par Lens (Pas-de-Calais), où Vincent connaissait depuis 1936 Jules Derichebourg. Celui-ci est arrêté quelques jours après le passage de Taverniers, et retourné, semble-t-il, par l'Abwehr de Lille. Celle-ci « plante » alors un agent dans son service, le Hollandais Cornelius Verloop. Patiemment, celui-ci remonte les maillons. Sous des noms divers, il rend plusieurs fois visite à Vincent et Verdeyen, et il fait peu de doute que leur arrestation est due à son action. Simon, à son tour, est entré en contact avec un autre agent de l'Abwehr de Lille, le Belge Richard Colson, qui, sous le nom de « Stuart » lui a fait croire qu'il était un agent anglais.
Dans ses rapports d'après-guerre, Simon a donné plusieurs versions pas toujours concordantes de son arrestation et surtout de ce qui s'est passé après. En effet, le 9 août 1941, quelques jours après l'arrestation d'Otto De Maeyer, Simon est remis en liberté. Il dit avoir accepté de travailler pour les Allemands, mais affirme qu'en réalité il a fait semblant et a, par contre, fait avertir les personnes qu'il devait pister – parmi ceux-ci se trouvait Kraemer, qui, après la guerre, a déclaré n'avoir reçu aucun avertissement de la part de Simon. Celui-ci pourra partir en Grande-Bretagne en 1942. Il y aura un poste dans le Political Intelligence Department, et rédigera un fort utile « Agenda sur la vie en Belgique occupée », qui servira à des agents parachutés[33].
Après l'arrestation d'Otto De Maeyer, Taverniers prend la fausse identité de « Léopold Blavier » et se rend chez René Bouillon, employé de banque à Bruxelles, dont les beaux-parents sont, après l'exode, restés à Limoges[34]. Les deux hommes se connaissent depuis l'avant-guerre. Contacté à nouveau en mai 1941 par Otto De Maeyer, Bouillon a accepté de prendre la succession de celui-ci en cas de « panne ». Il accepte cette mission le 7 ou le 8 août 1941[35]. Taverniers précise qu'il a besoin de renseignements sur l'emplacement des aérodromes allemands, leur camouflage, les entreprises d'armement travaillant pour les Allemands etc. Il remet à Bouillon plusieurs adresses de personnes susceptibles de l'aider, ainsi que celles de trois boîtes aux lettres en France : Edmond Gérard, rue Jean-Jacques Rousseau à Saint-Max, près de Nancy ; Marc René, Café du Dépôt à Vierzon[36] ; et le Café des Sports à Abbeville. Bouillon peut aussi déposer des enveloppes adressées à « Lejeune » (le pseudo de Taverniers dans le SR Air 40) dans un café à Jeumont, sur la frontière franco-belge. En outre, Taverniers lui apprend que des explosifs sont déposés depuis avant la guerre dans une entreprise de transports à Bruxelles.
Taverniers quitte la Belgique le 9 août 1941 emportant du courrier pour Kraemer. Il passe la ligne de démarcation à Arc-et-Senans (Doubs), lieu de passage utilisé fréquemment par des agents de l'antenne de Poligny du SR Air 40. Comme il est brûlé dans le Nord et en Belgique, Kraemer le charge d'abord d'une nouvelle visite de camps de travailleurs, puis de missions de liaison en Touraine et en Bretagne, cette fois en compagnie de Jacques Jansen (appelé Jacques ou Jacco de Malines dans certains documents), qui a été envoyé en France par Bouillon[37].
Au camp de Manzat (Puy-de-Dôme), Taverniers recrute un autre membre de la Légion nationale, le Liégeois Raymond Lacroix. Celui-ci quitte le camp, fait une première mission d'essai, puis est employé par Kraemer directement. Il est arrêté le 2 octobre 1941, probablement dans le Doubs, car il est enfermé à la Maison d'arrêt militaire de Besançon. Quelques jours après son arrestation, Lacroix y reçoit de la visite inattendue. C'est le moment où les polices allemandes enquêtent sur l'origine et le but des dépôts d'armes découverts lors de l'action d'envergure entreprise contre la Légion nationale. Lacroix reçoit la visite d'un employé du SD[38] de Liège et du Feldpolizeisekretär Berger, chargé de l'enquête sur la Légion. Ils croient, à tort, que Lacroix était le responsable de l'armement à la Légion nationale. Les Allemands l'accusent d'avoir espionné contre eux pour le compte de l'Intelligence Service (IS). Lacroix leur dit qu'après l'invasion, la Légion est devenue une organisation anti-allemande. Son « chef à l'IS », un certain Taverniers, dirigeant de la zone 1 de la Légion, est selon Lacroix « extrèmement anti-allemand ». Lacroix cite en outre un autre « agent de l'IS », comme lui membre de la Légion nationale, qu'il désigne sous le nom de « Jacques Loncin », domicilié à Malines. Il s'agit selon toute probabilité de Jacques Jansen, dont il a déjà été question[39]. Il faut croire que Taverniers a prétendu vis-à-vis de Lacroix qu'il était un agent important de l'IS, et que Lacroix a pensé que cette communication le rendrait intéressant aux yeux du SD, au service duquel il s'est effectivement mis par la suite.
Au cours d'une de leurs missions de liaison, Taverniers et Jansen sont arrêtés à Ligueil (Indre-et-Loire), sur la ligne de démarcation, mais ils réussissent à s'échapper. Dorénavant, Kraemer considère que Taverniers est définitivement brûlé et qu'il serait dangereux de continuer à l'employer. Taverniers est dirigé sur le major belge Jean-Baptiste Branders, qui organise à Montpellier des départs de Belges, vers la Grande-Bretagne. Après une captivité d'un an et demi à Barcelone, et comme il a à ce moment plus de trente ans, Taverniers est envoyé au Congo belge, où il s'engage dans le Corps expéditionnaire belge. Il y restera après la guerre.
Par la suite, Bouillon envoie quatre lettres écrites à l'encre secrète – au jus de citron – entre les lignes d'une lettre innocente, deux adressées à Saint-Max, deux à Vierzon. Dans une de ces lettres, datée du 23 septembre 1941, saisie probablement par les Allemands lors de l'arrestation de Bouillon, survenue le 9 octobre 1941, Bouillon signale la localisation de dépôts de munition à Grimbergen, la garde des terrains d'aviation à Brasschaat, et la présence de « Louis » (Otto De Maeyer) à la prison de Loos (Nord). Mais dans la même lettre, Bouillon fait également part à « René »(Kraemer) de sa décision de ne plus vouloir travailler pour lui, « parce que je n'ai pas encore été payé pour tous les renseignements fournis ». Bouillon avait obtenu les informations contenues dans cette lettre de René Swaelus, beau-frère d'Otto De Maeyer. En outre, Théodore De Maeyer, père d'Otto, lui a remis le plan de l'aérodrome de Grimbergen, confectionné par René Adams, employé dans l'entreprise de construction de son père, qui avait été chargé par les Allemands de divers travaux sur le terrain d'aviation susdit (entretien, construction de baraquements, etc).
L'arrestation de Bouillon, suivie de celle de Swaelus et d'Adams, met pratiquement fin au sous-réseau belge du poste de Limoges animé par les De Maeyer. Il est vrai que Kraemer traitait d'autres Belges, dont certains ont été en rapport avec Otto De Maeyer, d'autres non. C'est ainsi que Maurice Lempereur, directeur de la société Servofrein Dewandre à Liège, fut recruté en zone libre en décembre 1940. Il fut recontacté en 1941 par Otto De Maeyer. Fin 1941, il fut de nouveau touché au nom de Kraemer par « mademoiselle Mars », c'est-à-dire Lucie Sorel. Cette infirmière belge, née en 1910, voulait rejoindre la Grande-Bretagne en mai 1941. Elle s'adressa à l'Office belge à Limoges, d'où elle fut dirigée vers « René Mercier », Kraemer donc. Elle accepta d'assurer le courrier entre Limoges et la Belgique. Jusqu'à son arrestation, le 10 juillet 1942, et sous le pseudonyme « Yvette Mars », elle accomplit au moins quatre missions de liaison avec des agents à Lille, Bruxelles (entre autres René Marc et Léopold Herry), Anvers et Liège (Lempereur).
Pour terminer, il convient d'évoquer le sort des agents arrêtés. Si Lucie Sorel a survécu aux camps allemands, Otto De Maeyer et ses trois collaborateurs (Bouillon, Adams et Swaelus) furent plus infortunés. Après un procès devant un conseil de guerre allemand à Lille, Otto De Maeyer fut exécuté le 20 juin 1942 à Lille-Marquette. Jusqu'à ce jour, aucune pièce relative à ce procès n'a été découverte. Il est pourtant quasi certain que son acte d'accusation, par exemple, pourrait fournir de précieux renseignements sur son activité dans le SR Air 40 – d'autres documents, comme l'acte d'accusation de Bouillon et consorts le prouvent à suffisance. Bouillon, Swaelus et Adams furent exécutés à Dortmund le 30 juin 1943. Théodore De Maeyer, son épouse, ses fils Dirk et Walter et la fille de celui-ci furent arrêtés le 9 octobre (même date que Bouillon) et remis en liberté le 18 décembre de la même année. Willy De Maeyer, après avoir rempli les fonctions de chef de secteur à Issoudun (Indre), eut un sort quelque peu différent. En 1950, le liquidateur des réseaux du SR Air 40, notait que « les chefs du SR Air 40 ont été dans l'obligation de mettre un terme aux activités de M. De Maeyer pour des questions de sécurité tant pour l'intéressé que pour le service. En effet, débordant un peu le cadre qui lui était imparti, M. De Maeyer a eu des initiatives qui auraient pu avoir de bien fâcheuses conséquences. C'est pourquoi il avait été décidé, à cette époque, en pleine connaissance de cause, de le faire interner au camp du Vernet-d'Ariège. Eu égard cependant aux services rendus par M. De Maeyer et à sa bonne foi souvent égarée par un orgueil exagéré, j'estime qu'il y a lieu de le maintenir sur les listes du SR Air 40 jusqu'à la date de son internement : décembre 1941 »[40]. Après sa libération du Vernet, Willy De Maeyer fut placé en résidence forcée à Châteauneuf-les-Bains (Puy-de-Dôme).
- [1] Service de renseignement de l'armée de l'air
- [2] Sauf autre indication, les renseignements sur les agents de ce sous-réseau ont été puisés dans leur dossier d'homologation comme agent de renseignements et d'action (ARA), fonds Sûreté de l'Etat, AA 1333, déposé au Centre d'Etudes et de Documentation Guerres et Société Contemporaine (CEGES) à Bruxelles. Voir aussi : J. DANIS, Les espions de l'armée de l'Air française, Ed. Hugues de Chivré, 2010, p. 215-228.
- [3] Office des étrangers, dossier no. 7384537 (Emile-Louis Kraemer), Ministère des Affaires Etrangères, Bulletin de renseignements, 28.XI.1939. Kraemer habitait 66 rue des Drapiers à Bruxelles.
- [4] La compilation de la Sonderfahndungsliste fut terminée très peu de temps avant l'événement qui est entré dans l'histoire des services de renseignement sous le nom « d'incident de Venlo », l'enlèvement de deux officiers de renseignement britanniques par le Sicherheitsdienst (9 novembre 1939). Elle compte plus de 500 pages (CEGES, AA 1835)
- [5] Lettre du commandant Danis à l'auteur, 3.V.2000.
- [6] "J'ai bien connu Otto De Maeyer, avec qui j'étais en relations dès la fin 1939 à Bruxelles" (lettre d' Emile Kraemer à « Roger De Saule », 2.IV.1949, (CEGES, AA 1333, dossier ARA Otto De Maeyer).
- [7] Le 1.IX.1919, une commission militaire britannique fit savoir à Théodore De Maeyer que la British War Medal venait de lui être attribuée (lettre de Walter De Maeyer à l'auteur, s.d. [1987]).
- [8] Annexes au Moniteur belge du 20-21-22.V.1929, n° 2227, p. 3355.
- [9] Résumé du long entretien qui eut lieu le 20 juillet entre M. Paul Hoornaert, chef de la Légion Nationale Belge, M. Henri et T 16, 8.IX.1934. C'est « T 16 » qui tenait la plume et qui sans doute transmit son compte-rendu aux services français (CEGES, AA 1423, 7/1/610). Paul Hoornaert lui-même reçut en 1937 la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur « pour services rendus à la Section technique de l'EMA » (CEGES, AA 1423, 7/1/615). Pour l'activité de Javaux au profit des services français, voir : CEGES, AA 1068, Papiers L 100.
- [10] Communiqué par Francis Balace.
- [11] Note succincte sur mon activité pendant la guerre au service des armées alliées, s.d., rédigée par Willy De Maeyer (CEGES, AA 1333, dossier ARA O. De Maeyer).
- [12] Annexe au Moniteur belge du 29 mai 1938, n° 8801, p. 3364.
- [13] Rapport de Alice Rutgeerts, 19.VI.1945 (CEGES, AA 1333, dossier ARA Alice Rutgeerts).
- [14] Lettre de Verneuil à la MBL, 7.V.1949, CEGES, dossier ARA A. Rutgeerts. Selon celle-ci, Liljeblad partit au Maroc en mai ou juin 1940.
- [15] Office des Etrangers, dossier no. A 298818 (M. Liljeblad), Bulletin de renseignements.
- [16] Lettre de G. Vanbergen à Walter De Maeyer, 16.XI. 1947, archives E.V. (communiquée par Walter De Maeyer en 1987)
- [17] Qui, pour des raisons inconnues, est homologué au SR Air 40 sous le nom de « Buggenhout ». Comme il habitait la commune de Buggenhout, on peut penser que le liquidateur français a pris le nom de la commune pour un nom propre, ce qui pourrait indiquer que Willaert n'a pas lui-même introduit de demande d'homologation.
- [18] Attestation de L. Willaert, 29.XI.1947 (communiquée par M. Théo De Maeyer). Le dépôt chez Otto De Maeyer sera encore confirmé après la guerre par son frère Willy : « Mon frère Otto reçut des services français des explosifs pour son travail de sabotage après le départ des armées alliées ».
- [19] Pièce communiquée par M. Walter De Maeyer en 1987.
- [20] Acte d'accusation allemand en cause de R. Bouillon, R. Swaelus et R. Adams, ministère des Affaires sociales, Administration des victimes de la guerre, dossier R. Bouillon Tr 37856, R 149.
- [21] F. ARCHEN, Missions spéciales au Luxembourg, Paris, Editions France-Empire, 1969, p. 270-276.
- [22] Lettre de L. Quercy à la Missionb de liaison à Paris, 6.X.1948 (CEGES, dossier ARA Alice Rutgeerts)
- [23] Si Otto De Maeyer n'a lui-même été recruté que fin 1939, il est exclu qu'il ait pu recruter Van den Eynde en juin 1939 pour figurer dans le réseau de bateliers.
- [24] Auditorat général près la Cour Militaire, Conseil de Guerre d'Anvers, dossier no. 7095/46 en cause J. Celis et G. Block (sans suite), rapport de Karl Ulrich, agent de l'Abwehr, 18.XI.1941. Ce rapport fut rédigé par Ulrich sur base d'un rapport d'avant guerre extrait des archives de la police judiciaire d'Anvers, et rédigé fin 1939 par l'inspecteur à la PJ Fernand Metsers. A partir de 1941, celui-ci se mettait au service de l'Abwehr ; il était conduit par Ulrich. Il est à remarquer qu'aussi bien Potocki que les deux dirigeants de l'antenne du SR à Anvers, le (futur) général Alphonse Van Hecke et son associé Génébrias de Fredaigue, figurent sur la Sonderfahndungsliste allemande de 1939 (ils avaient été signalés par l'Abwehrstelle Münster). En 1934, Van Hecke et de Fredaigue avaient constitué à Anvers la compagnie d'assurances S.A. la Confiance Mutuelle, qui était en réalité un paravent à leurs activités dans le SR (et qui était dès avant la guerre connue comme telle par les Allemands). Il faut dire que Van Hecke et de Fredaigue (président des Combattants de France de 14-18 et des « Bleuets d'Anvers ») n'avaient pas toujours fait preuve de discrétion et de prudence. En 1937, ils furent impliqués dans un trafic d'armes en provenance d'Allemagne et destinés à l'organisation conspiratrice connue en France sous le nom de « la Cagoule » (C. BERNADAC, Dagore, les carnets secrets de la Cagoule, Paris, Editions France-Empire, 1977, p. 108-112).
- [25] Marc Fluhr, né à Thann (Haut-Rhin) le 28.VII.1888, fut volontaire de guerre 14-18 comme interprète. Il fut homologué capitaine FFC pour le réseau ‘Mithridate' à partir de début 1943. Dans une déclaration d'après-guerre, il a confirmé avoir joué un rôle dans le SR français avant le 10 mai 1940 alors qu'il vivait à Bruxelles. Il avait eu un agent à Ostende et se rappelait vaguement que le SR avait installé un poste émetteur sur un bateau de pêche ostendais (CEGES, AA 1333, dossier ARA M. Fluhr).
- [26] Lettre de E.F. Dadson à G. Aronstein, chef de la section belge du Political Warfare Executive, 11.V.1944 (CEGES, AA 1333, dossier ARA M. Simon). La mission de Simon n'émanait pas du SOE, qui n'existait pas encore en juin 1940, mais d'un précurseur du PWE, connu sous le nom de « Electra House », qui était essentiellement chargé de la contre-propagande.
- [27] Note du commandant Rupied au sujet de l'activité de M. Simon pour le SR Air 40, dont il est agent P1, 4.V.1950 (CEGES, dossier ARA M. Simon)
- [28] Nous ignorons qui a été approché par Taverniers. Il semblerait que Théodore De Maeyer, industriel et vivant à Bruxelles, avait des relations d'affaires avec cette banque.
- [29] Le Bureau des menées antinationales (BMA) est le service de renseignement de l'Armée d'armistice constituée par le régime de Vichy. Entre septembre 1940 et sa dissolution, en novembre 1942, il se consacre principalement au contre-espionnage contre les Allemands et les italiens en zone libre.
- [30] Rapport de J. Cassart, s.d., [1941], CEGES, AA 1333, dossier ARA Cassart.
- [31] Rapport d'interrogatoire de R. Jamar à Royal Victoria Patriotic School à Londres, 29.XI.1943 (n° 17798). CEGES, Papiers W. Ugeux, n° 156. Selon Jamar, le poste émetteur de Montpellier serait manipulé par le lieutenant français Mouton, qui y travaillait au service de la censure, 5 rue Maury.
- [32] Voir à ce sujet: E. Verhoeyen, "Van magistraat tot geheim agent. Robert De Schrevel, alias ‘Roger de Saule'; een Belg in de Franse militaire inlichtingendienst, 1939-1942", in Bijdragen tot de Eigentijdse Geschiedenis, nr. 12, 2003, p. 51-90.
- [33] Un exemplaire se trouve au CEGES, Papiers W. Ugeux, n° 50.
- [34] Le beau-père de Bouillon, Auguste Denis, ingénieur né en 1877, avait reçu « Legris » comme pseudonyme dans le SR Air 40, pour lequel il est homologué agent P1 du 1er février 1941 au 7 novembre 1942.
- [35] Les renseignements sur les événements qui se sont déroulés après l'arrestation d'Otto De Maeyer, sont – sauf autre mention – tirés de l'acte d'accusation allemand de René Bouillon et deux de ses agents, René Swaelus et René Adams, s.d. [probablement 6.II.1943], Administration des Victimes de la Guerre, dossier R. Bouillon.
- [36] Marc René, mécanicien à la SNCF et conducteur de trains entre Paris et Limoges, servait également de boîte aux lettre pour le courrier du Belge Camille Brassine, qui travaillait dans une entreprise de construction belge exécutant des travaux dans le Nord pour le compte de la Luftwaffe (communiqué par le commandant J. Danis).
- [37] Jansen, également membre de la Légion nationale, était un ami de la famille De Maeyer.
- [38] Le Sicherheitsdienst (SD) était le service de renseignement des SS, créé en 1931 par Reynard Heydrich.
- [39] Bericht, "streng geheim !", rédigé à Liège le 17.X.1941 (ministère des Affaires sociales, Administration des victimes de la guerre, dossier M. Louis, Tr 32351, R 451).
- [40] Note du commandant Rupied à l'attention de la MBL à Paris, 4.V.1950 (CEGES, AA 1333, dossier ARA W. De Maeyer).