Libye : panorama des forces en présence
Jamil ABOU ASSI
Chercheur associé au CF2R, spécialiste du Moyen-Orient
Depuis la chute du régime de Kadhafi en octobre 2011, la situation sécuritaire en Libye reste déterminée par les trois facteurs suivants :
– La faiblesse et l’inefficacité de l’action des institutions sécuritaires du pouvoir politique central à l’intérieur du pays et le long des 4 000 km de frontières ; cela est la conséquence directe des tiraillements et des divergences entre les institutions politiques de transition.
– La présence sur tout le territoire libyen d’une multitude d’intervenants et de formations armées, tant libyens qu’étrangers. Du côté libyen, on est en présence de l’armée nationale libyenne, des forces ralliées au général Hafter, des katibas de djihadistes islamistes, des milices de rebelles aux mains de chefs de tribu ; sans oublier la présence de terroristes étrangers de différentes nationalités. Et pour compléter la scène déjà très complexe, et depuis quelques mois, des contingents de certains pays occidentaux et de la région : les Etats-Unis, la France, l’Algérie et l’Egypte, opèrent directement sur le sol libyen
– La profusion, à travers tout le territoire, de quantités impressionnantes d’armes de tous types allant des armes légères individuelles aux armes lourdes et complexes; en passant par la panoplie de produits et gadgets pyrotechniques faciles à mettre en œuvre et suffisants pour mener les actions terroristes les plus dévastatrices.
Ces armes proviennent de plusieurs sources notamment :
– des restes du large arsenal de l’armée de la Jamahiria de Kadhafi qui, pendant la révolution, ayant senti la gravité de la menace, n’a pas hésité à donner ses instructions pour ouvrir les dépôts d’armes et de munitions aux volontaires appelés à défendre son régime ;
– des armes fournies en 2011 aux rebelles par certains pays occidentaux et du Golfe pour booster la révolution ;
– des armes introduites illicitement dans le pays à travers ses longues frontières sud presque totalement incontrôlées.
Les forces en présence
Pour mieux cerner la situation sécuritaire actuelle en Libye, entrevoir les développements futurs possibles et surtout apprécier les retombées sur la sécurité de la région, il convient d’identifier les principaux acteurs et intervenants sur le théâtre libyen dans le domaine sécuritaire et examiner leurs rôles respectifs.
L’Armée nationale libyenne
L’actuelle Armée nationale libyenne (ANL) n’est, en fait, que l’Armée de libération nationale qui a été mise sur pied par le Conseil national de transition (CNT) en 2011. Celle-ci a absorbé les militaires déserteurs de l’armée de l’ancien régime ralliés à la cause révolutionnaire et les brigades/katibas de rebelles constituées pendant la révolution. L’ANL compterait 35 000 hommes environ. Quant à son équipement, elle a hérité de l’armée de Kadhafi les restes de l’armement et des équipements à dominante soviétique ayant échappé aux raids de l’OTAN. L’Armée nationale libyenne a également bénéficié au cours de la révolution, en 2011, de la part des pays occidentaux, de certains armements notamment:
– des missiles antichars Milan français,
– des fusils FN-F2000,
– des fusils automatiques légers FN-FAL,
– des mitrailleuses légères M249,
– 200 véhicules de type Hummer, donation du gouvernement américain, livrés en juillet 2013.
Les katibas sont des unités militaires ou paramilitaires dont l’effectif varie de quelques centaines à plus d’un millier d’hommes, formées durant ou après la révolution et qui relèvent en principe du ministère de la Défense ou de l’Intérieur et devraient être sous les ordres du chef d’état-major. Seulement, le commandement politique et militaire n’arrive pas à imposer son autorité sur l’ensemble du territoire ni sur toutes les formations armées. Certaines katibas gardent leur entière indépendance et agissent sans en référer au commandement militaire gouvernemental, alors que d’autres unités ont tout simplement rejoint le général Hafter dans son entreprise contre les jihadistes.
Parmi les katibas de l’ANL, on distingue :
– La Chambre des opérations conjointes des révolutionnaires libyens. Commandée par Adel Al-Tarhouni et contrôlée par le ministère de la Défense, ses effectifs sont estimés entre 200 et 350 hommes. Elle a pour principal allié la Brigade de la Libye unie et pour principale adversaire le groupe Al-Zintan.
– La Direction de la Sécurité nationale. Commandée par Mahmoud Sharif et contrôlée par le ministère de l’Intérieur, elle assure une fonction de police nationale en opérant dans les villes de Tripoli, Benghazi et Beida. Ses effectifs sont compris entre 7 000 et 9 500 hommes. Elle a pour principal rival le groupe Ansar Al-Sharia.
– La Brigade anticriminelle. Commandée par Abdulhakim Blazi, c’est une unité contrôlée par le ministère de l’Intérieur. Son principal allié est la Force de dissuasion spéciale et son principal rival est le groupe Al-Zintan.
– La Force de dissuasion spéciale. Contrôlée par le ministère de l’Intérieur, elle est chargée de la lutte contre le trafic de drogue et contrôle la production et le commerce de l’alcool dans le pays. Son principal rival est la Brigade de Garghour, à Misrata.
– La Direction de la protection des installations pétrolières. Contrôlée par le ministère du Pétrole, elle est chargée de la protection des installations pétrolières. Elle est formée par de miliciens faiblement entrainés. Ses effectifs sont estimés entre 18 000 et 20 000 hommes. Ses deux principaux leaders sont Rasheed Mohammed Saleh Alsabri et Ibrahim al-Jathran.
L’armée ralliée au général Hafter
Après la débâcle de la guerre au Tchad en 1987 et une longue retraite forcée de plus de 20 ans aux Etats-Unis, le général Khalifa Hafter rejoignit la rébellion en mars 2011. En avril, il occupait la fonction de commandant des forces terrestres rebelles, alors que le général Omar Al-Hariri faisait fonction de chef d’état-major sous la coupe du général Abdelfettah Younès, le commandant en chef des Forces armées de libération. Après la chute de Kadhafi et l’assassinat d’Abdelfattah Younès, le général Hafter est proclamé chef d’état-major de l’Armée nationale libyenne par plus d’une centaine d’anciens officiers, ce qui a provoqué la colère des islamistes qui le considèrent comme étant «l’homme des Américains».
Aussi, Hafter n’est reconnu ni par le Congrès national, ni par le gouvernement en place, qui le considère comme un simple putschiste. Cependant, depuis le 16 mai 2014, début de son offensive El-Karama contre les djihadistes à Benghazi – qu’il qualifie de «terroristes» à combattre -, le général Hafter cumule le soutien des fédéralistes du Conseil de la Cyrénaïque, basé à Tobrouk, de certaines milices et surtout d’une partie non négligeable des forces armées, notamment des forces spéciales de la région orientale et des unités de l’armée de l’air implantées dans cette même région dotées de Mig 21, Mig 23, d’hélicoptères d’attaque MI 24 et MI 35, ainsi que les bases aériennes dont celles de Benina, d’El-Abraq et de Tobrouk d’où partent les raids aériens sur les campements djihadistes d’Ansar Charia au sud-ouest de Benghazi.
Les milices tribales
En Libye, la tribu continue à jouer un rôle sociopolitique déterminant, comme du temps de Kadhafi. De nombreuses katibas de rebelles sont plutôt aux ordres de leur tribu d’origine que de l’autorité politique centrale. Le soutien de nombreuses unités militaires et sécuritaires de la région orientale de la Libye, dont bénéficie le général Hafter, est dû en grande partie aussi à ses racines tribales. Il est de la tribu Abaydat dans les environs de Dernah.
Les trois plus importantes tribus en Libye sont :
– à l’est, les Warfallah comptant plus d’un million de personnes. Quoique traditionnellement opposés à Kadhafi, certains ont occupé d’importants postes politiques et militaires au sein du système de la Jamahiria ;
– au centre, dans la région de Sebha, les El-Kadhafa. C’est la tribu d’appartenance de la famille de Mouammar Kadhafi, ce qui lui a permis de contrôler les rouages du système politique et sécuritaire de l’ex-Jamahiria ;
– A l’ouest, les Megarha toujours bien armés.
Il y a lieu de signaler qu’en raison de l’importance des liens tribaux dans le tissu sociopolitique du pays et compte tenu du vide institutionnel actuel, il n’est pas exclu que la normalisation de la situation libyenne passe par le « Conseil suprême des tribus libyennes » qui a tenu, le 25 mai dernier à El Azizia (à 55 km au sud de Tripoli), sa dernière réunion laquelle a débouché sur un plan de quinze recommandations. La quatrième et la sixième recommandations proposent notamment des mesures pour normaliser la situation sécuritaire et demandent :
– la dissolution des milices et l’interdiction à l’armée et à la police de distribuer des armes. Elle déclare qu’attaquer une région ou une tribu, c’est attaquer le pays tout entier.
– la reconstitution de l’armée et de la police et le contrôle des frontières.
Les djihadistes
Le pouvoir central à Tripoli peine à mettre sur pied une armée et une police structurée, opérationnelle et répondant à ses ordres. Entre attendant, il fait régulièrement appel aux ex-rebelles ayant combattu Kadhafi pour rétablir l’ordre. Mais le pouvoir central, dont l’autorité ne dépasse pas les limites de quelques quartiers de Tripoli et de Benghazi, ne réussit toujours pas à exercer son autorité sur ces formations de révolutionnaires qui continuent à imposer leur propre volonté et à agir d’une façon autonome. Les milices d’obédience djihadiste, notamment Ansar Al-Charia, sont très actives dans la région orientale du pays, la Cyrénaïque. Profitant du vide sécuritaire créé par la chute des institutions du régime de Kadhafi, Ansar Al-Charia, l’organisation djihadiste la plus menaçante sur le théâtre libyen, fait la loi dans l’est du pays ; elle contrôle des quartiers entiers de Benghazi, de Syrte – ville martyre détruite par l’OTAN -, et de Derna, fief historique des islamistes extrémistes libyens et des kamikazes d’Al-Qaïda. Selon certains analystes, ces trois villes (Benghazi, Syrte et Derna) abritent des centres de recrutement et alimentent le mouvement djihadiste contre le régime syrien.
Dirigée par son fondateur historique, Mohamad Al-Zahawi, Ansar Al-Charia prône « la charia comme seule et unique source de législation en Libye » et exige son application immédiate. Elle compte entre 3 000 et 5 000 miliciens. Pour atteindre ses objectifs, elle a adopté un plan d’action fondé sur trois modalités :
– le combat armé,
– d’intenses activités caritatives et sociales,
– la prédication religieuse.
De plus, depuis la fin de 2014, la ville de Derna est contrôlée par le Majlis Choura Chabab Al-Islam, formation qui a prêté serment à l‘Etat islamique. Le groupe est constitué de plusieurs dizaines de combattants de retour d’Irak et de Syrie et contrôle plusieurs quartiers stratégiques de Derna.
Le contrôle des villes
Tripoli
Tripoli est, depuis sa chute, hors contrôle du pouvoir central. Elle est sous l’influence d’Aube Libyenne (Fajr Libya) : c’est une coalition de 26 villes révolutionnaires, partisane d’une ligne dure envers tout ce qui touche l’ancien régime de Kadhafi. Cette coalition a créé un gouvernement de salut national, dirigé par Omar Al-Hassi, un ex membre du Groupe islamique combattant libyen (GICL), considéré comme proche d’Al-Qaïda. Les membres des nombreuses brigades et milices armées de ce te coalition sont principalement des jeunes et n’ont pas d’expérience pour s’imposer dans la Libye actuelle.
– La sécurité à Tripoli est assurée par une multitude de milices d’ex-rebelles dont deux principales : la katiba de Zenten, ville située au nord-ouest du pays, et la katiba de Misrata qui est déployée à l’est de Tripoli et serait plutôt dominées- par les Frères musulmans. Les affrontements entre milices – y compris entre celles de Zenten et de Misrata – sont fréquents pour diverses raisons : notamment parce que la majorité d’entre elles refuse leur démantèlement et leur intégration au sein des institutions sécuritaires officielles, l’armée ou les forces de sécurité intérieure ; mais aussi parce qu’elles se disputent le contrôle des installations pétrolières.
– La Brigade de Tripoli a été formée et armée au Qatar par la France et les Émirats arabes unis. Mise sur pied pendant la révolution, elle compte entre 500 et 1 000 hommes dont une majorité de binationaux qui vivaient à l’étranger – y compris en Irlande – et des Tripolitains ayant fui la capitale au début du soulèvement, en février 2011.
– La Brigade du 17 Février, a également été formée et armée au Qatar par la France et les Émirats arabes unis. Elle se compose d’insurgés ayant été infiltrés dans le djebel Nefoussa par pont aérien. Elle était commandée pendant la révolution par l’islamiste Abdelhakim Belhadj. La Brigade du 17 Février est théoriquement rattachée au ministère de l’Intérieur.
Ces deux brigades relativement bien formées et équipées bénéficient d’une certaine légitimité due à leur participation à l’assaut final menant à la libération de Tripoli. Aussi, elles ne sont pas prêtes à quitter la capitale de sitôt.
Parallèlement, de nombreuses autres brigades de révolutionnaires, dont celles originaires de Misrata et Zenten, s’attachent à améliorer leur positions pour mieux négocier les décisions à venir. Parmi ces brigades figure également la katiba Béchir Sedaoui, forte de 1 000 hommes environ, basée à Souk Jemaa, à l’est de Tripoli.
Les autres villes
– La ville de Zintan abrite des proches de l’ancien régime kadhafiste qui cherchent à contrer la ville de Misrata. Les dirigeants de cette ville se rapprochent également d’anciens dignitaires du régime réfugiés en Algérie et en Tunisie. La ville est la principale alliée de la Chambre des Représentants qui siège à Tobrouk.
– La ville d’Oubari est le théâtre d’affrontements entre deux ethnies non arabes : les Toubous et les Touaregs. Implantés dans la région du Fezzan, les deux ethnies ont été marginalisées sous le régime de Khadafi. L’écrasante majorité des Toubous soutient la Chambre des Représentants de Tobrouk. Quant aux Touaregs, certains soutiennent la Chambre des Représentants mais les plus radicaux soutiennent Aube Libyenne.
– La ville de Misrata est contrôlée par Aube Libyenne ainsi que par plusieurs groupes armés associés. Le principal homme fort de la ville est Salah Hadi, qui a réussi un savant mélange de business et de politique pour contrôler la ville dont le port est le principal atout commercial. Il est allié au Parti de la justice et de la construction – implanté à Tripoli et dirigé par Mohamed Swan, originaire de Misrata – et soutenu par la Turquie et le Qatar.
– Benghazi est le théâtre d’affrontements entre les forces du général Khalifa Haftar, adoubé par la Chambre de Représentants, et le groupe Ansar Al-Charia, placé sur la liste noire de l’ONU depuis le 19 novembre 2014.
– La ville de Derna est contrôlée par le Majlis Choura Chabab Al-Islam qui a prêté serment à l‘Etat islamique. Le groupe est constitué de plusieurs dizaines de combattants de retour d’Irak et de Syrie et contrôle plusieurs quartiers stratégiques de Derna.
– La ville de Zenten est un autre centre de puissance militaire qui cherche à peser sur le cours des évènements via la pression exercée par deux katibas locales :
. La katiba Essawaek. Cette force d’élite paramilitaire est contrôlée par le ministère de la Défense. Forte de 5 000 hommes, elle est dirigea par Wanis Bukhamada. Son principal allié est l’Armée national libyenne et son principal adversaire est Ansar Al-Sharia.
. La katiba Elkaakaa. Egalement contrôlée par le ministère de la Défense, elle est considérée comme la Brigade islamiste la plus puissante du pays. Commandée par Othman Mlekta, elle compte en effet 18 000 combattants et est alliée à Ansar Al-Sharia.
Le Grand Sud libyen et AQMI
La situation sécuritaire au sud libyen est encore plus préoccupante que dans les autres régions du pays, l’Etat y est totalement absent et les frontières sont ouvertes. Cette vaste zone, limitrophe de pays eux aussi instables et sévèrement affectés par le terrorisme (Algérie, Tchad, Niger) abrite des camps djihadistes qui servent de bases arrière pour les groupes opérant dans toute la région sahélo-saharienne. Les affrontements, parfois à caractère racial, entre les principaux groupes ethniques (Arabe, Touareg et Toubou) et autres minorités sont fréquents. Le contrôle des 2 000 km de frontières du Sud libyen est assuré par les délégués des tribus, dont chacune est repsonsable du contrôle, du moins en principe, d’une région précise :
– Les Toubous contrôlent la zone Est, allant du Soudan jusqu’au poste frontière de Toumou avec le Niger. L’écrasante majorité des Toubous soutient la Chambre des Représentants de Tobrouk.
– Les Touaregs s’occupent de l’ouest, de Toumou à l’Algérie. Certains Touaregs soutiennent la Chambre des Représentants mais les plus radicaux soutiennent Aube Libyenne.
– Les Arabes supervisent Sebha, capitale du Fezzan et nœud de passage traditionnel des trafiquants et désormais des terroristes.
Officiellement fermées depuis décembre 2012, en réalité, les frontières sud-libyennes restent de véritables passoires d’armes et de djihadistes au profit des groupes terroristes de toute la région sahélo-saharienne. Des trafiquants subtilisent des produits de commerce (huile, farine, pétrole) fortement subventionnés qui quittent la Libye vers le Niger et le Tchad. Dans le sens inverse, de la drogue et des clandestins – environ 600 Africains chaque jour – entrent en Libye.
En réalité, ces tribus ne maîtrisent pas le contrôle de ces frontières, d’abord par manque total de moyens appropriés, mais surtout par intérêt. Il arrive que ces tribus coopèrent avec les trafiquants comme avec les terroristes moyennant des contreparties financières. Les terroristes qui avaient attaqué début de 2013 le complexe pétrolier d’In Amenas au sud-est de l’Algérie étaient passés par le Sud libyen et auraient été même très bien accueillis par la katiba 315 d’Oubari, qui est supposée contrôler les frontières.
En conséquence, la Libye est aujourd’hui le foyer régional et international le plus ouvert au terrorisme, abritant un très grand nombre de groupes djihadistes actifs, d’origines très diverses, en premier lieu issus de la région sahélo-saharienne et d’Afrique du Nord.
Par exemple, Mokhtar Belmokhtar, le leader de la katiba « Les Signataires par le sang », accompagné d’un certain nombre de ses compagnons de diverses nationalités, chassés du nord du Mali suite à l’intervention militaire internationale en application de la résolution 2085 du Conseil de sécurité de l’ONU, se seraient eux aussi refugiés dans le Sud libyen. Il est plus que probable que ce groupe ne ratera pas les conditions propices actuelles en Libye, pour raffermir davantage ses relations avec les djihadistes libyens et planifier des actions à haute valeur médiatique, quoique les djihadistes libyens semblent pour le moment préoccupés plutôt par la cause nationale libyenne.
D’autres groupes djihadistes fuyant le Mali seraient aussi réfugiés dans le Sud libyen. Mais leur présence reste à confirmer compte tenu de la complexité de la situation dans cette région. Parmi ces groupes on évoque:
– le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA),
– Ansar El Dine,
– le Mouvement pour l’unification et le djihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO).
Les interventions militaires des pays étrangers
Inquiétés par les répercussions néfastes du cas libyen au niveau régional et mondial, comme par l’incapacité du pouvoir libyen à maîtriser la situation, les Etats-Unis, la France et l’Algérie mènent des préparatifs, depuis déjà quelques mois, en prévision d’opérations militaires coordonnées et sélectives à l’intérieur du territoire libyen même, ciblant les groupes terroristes et les dépôts d’armes et de munitions sous leur contrôle.
La dernière opération connue après l’arrestation d’Abou Anas Allibi en 2013, est la capture le 16 juin 2014 d’Ahmed Abou Khoutalah, un djihadiste libyen suspecté par les services américains d’être le principal commanditaire de l’attaque du consulat américain à Benghazi, en 2012.
L’Egypte, se sentant également directement menacée par le terrorisme de provenance libyenne, n’hésite plus à intervenir militairement contre des objectifs terroristes repérés dans l’Est libyen.
A ce stade, les pays intervenant directement en Libye se seraient réparti les rôles comme suit :
– Algérie : sécuriser les frontières algéro-libyennes pour empêcher les terroristes de Libye de fuir vers le Sahara ou l’Est algérien. Son objectif, dans un premier temps, est de débarrasser l’ouest libyen, en particulier les villes de Nalout et de Zenten, des terroristes ; et dans un deuxième temps de nettoyer Sebha ;
– Tchad : empêcher la fuite de terroristes de Libye vers le Sahara et interdire l’arrivée de renforts vers la Libye, en maîtrisant le contrôle des frontières tchado-libyennes ;
– Etats-Unis et France : agir sur le sol libyen en engageant des éléments de leurs forces spéciales ou des moyens aériens déjà déployés dans la région ; détruire les éléments terroristes ainsi que leurs bases et dépôts d’armes.
L’armement présent sur le territoire libyen
La majorité des armes détenues par les différentes factions libyennes est issue de l’arsenal de l’ancien régime de Mouamar Khadafi. Principalement de fabrication russe, il comprend :
– Hélicoptères : Mi14, Mi-17, Mi-24
– Chars : Shilka ZSU-23, T34, T55, T62, T72, 155 Palmaria
– APC : BTR 80, BRDM-2, BPM-1, BPM-2, BPM-3
– Missiles sol-air
– Dispositifs anti-aériens : DSHK, ZPU-1
– Lance-roquettes : BM-21 Grad, Type 63
– Canon anti-char : Carl Gustav, M40
– Mitrailleuses : Vladimirov KPV
– Armes légères : Kalachnikov AK47, l’arme la plus utilisée dans les conflits
L’armée nationale libyenne a reçu depuis sa créations des armes plus sophistiquées de la part des pays engagés dans ce conflit. Parmi ces armes on distingue :
– fusils d’assaut FN F2000 fabriqués en Belgique,
– véhicules blindés Nimr fabriqués par les Emirats arabes unis,
– blindés légers Puma 4×4 fabriqués par l’Italie,
– véhicules Humvee fabriqués par les Etats-Unis
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Dans l’attente de réaliser des avancées significatives dans la construction d’un système politique stable en mesure d’exercer son autorité sur tout le territoire national, la situation sécuritaire en Libye, déjà inquiétante, ne peut qu’empirer, avec de graves conséquences et retombées pour ses voisins.
L’évolution vers une stabilité sécuritaire passe nécessairement par le désarmement des milices, des groupes et aussi des individus hors de contrôle du pouvoir central et la collecte des armes. Mais en raison de la complexité de la situation et des susceptibilités des acteurs internationaux, une telle opération ne peut réussir que sous l’égide de l’ONU.