Prise d’otages tragique à Siem Reap (Cambodge)
Alain RODIER
La raison de la tragique prise d'otages de Siem Reap le 16 juin dernier, relève purement du fait divers. En effet, le responsable présumé est un Cambodgien âgé d'à peine 23 ans, nommé Chea Sokhon. C'est un ancien garde de sécurité de la société Protex Security. Selon les aveux qu'il a fait à la police, son but était de se venger de l'affront que lui avait fait subir son ex-employeur, un restaurateur coréen. Chea Sokhon qui travaillait comme chauffeur de l'établissement était chargé de conduire tous les jours les deux filles de son patron à l'école internationale où elles étaient scolarisées. Or, au début juin, il les a déposé en retard. Le restaurateur l'a alors giflé à deux reprises puis lui a signifié son congé. L'objectif de Chea Sokhon était purement et simplement d'assassiner les deux enfants de son ancien employeur, en représailles.
Pour cela, il a recruté plusieurs amis dont Thim Chem (20 ans), Vanti Sopheak (22 ans) et Sin Tha (22 ans), qui devait l'aider à enlever les fillettes à l'école internationale. Puis, il a acquis pour 150 dollars au marché noir un pistolet automatique modèle 54 (version chinoise du Tokarev TT-33 russe). Les autres membres du groupe n'étaient armés que de couteaux. Arrivés à l'école, les kidnappeurs n'ont pas réussi à trouver les deux fillettes coréennes. Les forces de sécurité alertées par les responsables de l'établissement sont arrivées très rapidement et ont cerné les bâtiments. Les malfaiteurs s'en sont alors pris à une autre classe à leur professeur. Ils ont tout de suite réclamé six armes, des grenades, une rançon de 1 000 dollars (somme qui sera portée lors des négociations à 30 000 dollars) et un van de douze places pour s'enfuir en Thaïlande. Afin de montrer leur détermination et excédés par les pleurs des enfants, ils assassinent d'une balle dans la tête Maxim Michalik, un petit Canadien âgé de deux ans, parce qu'il était « le plus bruyant ». C'est vraisemblablement Chea Sokhon qui a tiré, car c'est lui qui détenait la seule arme de poing.
La police a cependant continué à refuser de leur livrer des armes, mais a fourni le véhicule demandé. Huit heures après le début de l'opération, au moment ou les criminels tentaient de quitter l'école en compagnie de quelques enfants leur servant de bouclier humain, les forces de sécurité ont ouvert le feu et crevé les pneus du véhicule. L'unique arme des malfaiteurs s'est alors enrayée. La foule massée autour de l'école a aussitôt tenté de lyncher les membres du commando. Néanmoins, la police a réussi à les interpeller, leur évitant un sort fatal. Après un bref séjour à l'hôpital, les kidnappeurs ont été interrogés par la police. A la suite de leurs déclarations, trois autres hommes ont été appréhendés : Ul Somnang (29 ans), vigile dans un magasin de souvenirs, Sam Mao, garde de sécurité à l'école internationale, et Choeut Ny, le fournisseur de l'arme. Au moment de leur interpellation, les deux derniers personns se trouvaient à proximité de la ville de Poipet, proche de la Thaïlande. Un huitième Cambodgien est actuellement recherché dans le cadre de l'enquête. Les autorités sont persuadées que des complices ont réussi à s'échapper à l'occasion du désordre indescriptible qui a régné lors de la fin de la prise d'otages. En effet, pourquoi les kidnappeurs auraient-ils demandé six armes alors qu'ils n'étaient officiellement que quatre ?
Comme lors de la prise d'otages de Beslan, les forces de sécurité, bien qu'arrivées très rapidement sur les lieux (15 minutes après le déclenchement de l'alerte) ont manqué de professionnalisme. Les civils n'ont pas été maintenus à distance ; un père a même pu récupérer son enfant directement dans le minibus. Les kidnappeurs ont échappé de peu au lynchage par la foule et certains des preneurs d'otages ont profité de la situation chaotique pour s'échapper.