Le scandale « Faisán » : des policiers espagnols accusés d’un « mouchardage » au bénéfice de l’ETA
Gaël PILORGET
L’affaire (ou plutôt son actuel traitement judiciaire) fait grand bruit en Espagne dans le contexte pré-électoral des législatives (Elecciones generales) qui devraient opposer dans les prochains mois, d’une part, le PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol, de l’actuel hôte de la Moncloa, le Président – du gouvernement – Rodríguez Zapatero) et son candidat Alfredo Pérez Rubalcaba et, d’autre part, le PP (Parti populaire) de Mariano Rajoy. Les deux candidats étant, il faut le souligner, deux ex-ministres de l’Intérieur ; le premier de Rodríguez Zapatero (2006-2011), le second de José María Aznar (2001-2002).
Le scandale doit son nom au bar Faisán d’Irún (ville de Guipúzcoa située tout près de la frontière avec la France) ; un bar qui était la plaque tournante d’un réseau d’extorsion de fonds de l’ETA fondé sur « l’impôt révolutionnaire », prélevé de force auprès des entrepreneurs basques que ledit réseau a « démarché » par courrier entre mars 2005 et février 2006. Notons, pour l’anecdote, qu’un autre lieu de prédilection du réseau était le cimetière d’Hendaye, situé, lui aussi, tout près de la frontière. Le cimetière servait de lieu de rencontre entre les responsables de la « collecte » de l’impôt révolutionnaire et les responsables de l’appareil (notamment militaire) de l’ETA, qui s’étaient réfugiés en France. L’enquête judiciaire a été d’abord menée par le célèbre juge Garzón, connu, entre autres, pour avoir lancé un mandat d’arrêt international contre Pinochet, avoir mis en lumière tout autant le scandale des GAL que la nébuleuse des structures satellites de l’ETA, et avoir brisé le tabou des « disparitions » de républicains lors de – et à l’issue – de la Guerre civile.
Si l’enquête a pris une dimension bien plus large, c’est que le propriétaire du bar et dirigeant du réseau d’extorsion, Joseba Elosúa (alias « général Bragas »), a reçu le 4 mai 2006 un appel le prévenant qu’un coup de filet allait être opéré contre le réseau. Elosúa aurait reçu la visite d’un homme qui lui aurait tendu un téléphone portable, au moyen duquel une voix inconnue l’aurait prévenu du danger que lui et son réseau encouraient. Le bar était surveillé par la police au moyen de caméras vidéo ; au moment du « mouchardage » (chivatazo), l’enregistrement a été étrangement interrompu ; la Guardia Civil (corps équivalent à notre Gendarmerie) a remis au juge Pablo Ruz, en février 2011, un rapport excluant toute coupure accidentelle de l’enregistrement. Des policiers auraient donc volontairement coupé l’enregistrement.
Le 20 juin 2006, les polices espagnole et française, sous le mandat conjoint du juge espagnol Fernando Grande-Marlaska et de la juge française Laurence Le Vert, portent, dans le cadre de l’opération Urogallo, un coup très dur au réseau d’extorsion de l’ETA en arrêtant 12 personnes impliquées dans « l’encaissement » et la gestion de l’impôt révolutionnaire. C’était cette opération qui devait être menée plusieurs semaines auparavant et qu’avait fait échouer le fameux « mouchardage ».
L’ETA était au courant…
Selon un compte rendu interne à l’ETA d’une réunion secrète, le 22 juin 2006, avec deux émissaires du gouvernement (document saisi à Bordeaux le 21 mai 2008, lors de l’arrestation de Francisco Javier López Peña, le chef militaire de l’ETA, alias « Thierry », « Zulos », « Bartolo », « Pierre » ou « Marcel »), le « mouchardage » aurait été une décision politique du gouvernement, afin d’éviter toute arrestation en cette période de trêve. Les documents saisis évoquent une structure de l’ETA, dénommée Gezi, qui percevait les chèques des entrepreneurs basques et en rendait compte à Juan Antonio Olarra Guridi, le chef de l’appareil militaire. On apprend également que le réseau d’extorsion fonctionne depuis 20 ans et qu’il a pour épicentre le bar Faisán. Le compte-rendu affirme que les deux représentants du gouvernement espagnol ont fait savoir à l’ETA qu’aux yeux de l’exécutif, les arrestations d’Elosúa et de ses complices ont été « un accident grave » dont ils « accusent » les juges anti-terroristes. Un des « porte-parole » du gouvernement affirme que celui-ci a tout tenté, mais qu’il n’a pas pu arrêter l’opération. Des « instructions » avaient pourtant été données verbalement à la Police nationale, à la Guardia Civil, à la Ertzaintza (la police basque) et à la police française pour qu’elles ne procèdent pas à des arrestations. Un des émissaires du gouvernement informe l’ETA que le juge Marlaska est en train d’enquêter sur de possibles pressions policières qui auraient empêché les arrestations. Le représentant gouvernemental soutient également que les juges se sont laissés instrumentaliser par le PP, dont le « porte-parole » de la Moncloa souligne la pression politique, ainsi que celle des médias et des associations de victimes du terrorisme. Il confirme toutefois à « Thierry » que le processus entamé entre le gouvernement et l’ETA va se poursuivre, conformément à la « feuille de route » convenue, et ce en adaptant le discours officiel aux évolutions du contexte.
Trois policiers mis en examen
Le juge Pablo Ruz, qui reprend l’affaire à la suite de Garzón, met en examen le 13 juillet 2011 deux responsables de la police et un officier : l’ex-directeur général de la police, Víctor García Hidalgo ; le chef supérieur de la police du Pays basque, Enrique Pamiés, et l’inspecteur de la Brigade d’information de Vitoria (Alava), José María Ballesteros. Le juge les accuse d’être à l’origine du « mouchardage » et d’avoir collaboré avec l’ETA. Pablo Ruz se fonde sur les appels qu’ont échangé les trois policiers, avant et après le chivatazo ; Pamiés a été informé de l’opération Urogallo l’après-midi ou le soir du 3 mai, et s’est alors beaucoup entretenu par téléphone avec García-Hidalgo et Ballesteros, alors qu’auparavant et ensuite, les contacts entre les trois hommes sont des plus épisodiques.
Le juge ne croit pas à l’alibi de Ballesteros qui affirme que ces nombreux appels étaient justifiés par un rendez-vous secret à laquelle devait se rendre Pamiés, de l’autre côté de la frontière, pour y rencontrer un informateur, « El Romano » (dont Pamiés a refusé de donner le nom au juge, même pour valider son alibi). D’autre part, Ballesteros dément s’être rendu au bar Faisán, mais les images des caméras de surveillance de la police démontrent qu’il ment sur ce point.
Le juge Ruz ajoute, pour mieux renforcer son accusation de collaboration avec un groupe armé, que les policiers, en plus d’alerter Elosúa du danger qu’il courait, lui auraient prodigué des conseils pour éviter le dispositif policier et donc l’arrestation, et lui auraient ainsi permis de poursuivre ses activités délictueuses.
L’enquête
Selon l’enquête interne du commissaire Carlos Germán, menée à la demande du juge Grande-Marlaska, Ballesteros serait l’homme qui serait entré dans le bar et aurait donné le portable à Elosúa ; ce serait Pamiés qui se serait adressé à Elosúa, après avoir reçu lui-même des directives de García-Hidalgo. Il est à noter, pour mieux s’en étonner, que Germán a été le responsable de l’opération menée contre le réseau d’extorsion. Son supérieur hiérarchique, José C., a déclaré devant le juge Ruz que son subordonné lui a demandé d’effacer la bande d’enregistrement d’une balise placée dans le véhicule d’Elosúa, sur laquelle le patron du bar raconte à son beau-frère comment s’est produit le « mouchardage ». José C. n’hésite pas, lui, à désigner Germán comme celui qui aurait informé les etarras du péril encouru.
Et il y a un autre élément : dans un rapport rédigé par José Cavero, à l’époque commissaire à l’UCI (Unité centrale d’information), il apparaît que Germán, le principal responsable de l’opération contre le réseau de l’ETA, s’était montré hostile à ladite opération en considérant qu’elle pouvait porter préjudice à un processus de paix déjà bien troublé.
Pourtant, les analyses des portables des trois accusés démontrent qu’ils ont échangé des appels juste avant et après le chivatazo. Ballesteros a appelé Pamiés depuis le bar, lequel, à son tour, a appelé plusieurs fois García-Hidalgo. A la suite de ces révélations, Rubalcaba, ministre de l’Intérieur depuis le 11 avril 2006, destitue García-Hidalgo le 8 septembre, 4 jours après sa mise en examen. Toutefois, suite à l’enquête menée par le ministère public en la personne de Carlos Miguel Bautista, lequel a auditionné dans cette affaire plus de 60 personnes, parmi lesquelles les 3 accusés, il n’existe pas de preuves tangibles sur l’origine du « mouchardage » : les conversations téléphoniques n’ont pas permis d’élucider l’affaire, les inculpés n’ont fait aucun aveu, et Elosúa ne les a pas reconnus. Le ministère public affirme donc par la voix de Bautista que les inculpés l’ont été sans preuve.
Les trois responsables policiers ont, de plus, affirmé avec force qu’ils ne partageaient pas les objectifs du groupe armé. Selon ce qu’a déclaré l’avocat Fuster-Fabra, son client Enrique Pamiés a lu devant le juge quelques feuillets qu’il avait rédigés et dans lesquels il explique ce que signifie pour lui – qui a arrêté près de 500 terroristes, mis fin aux activités de près de 50 commandos, et qui est actuellement le policier le plus craint de l’ETA – le fait qu’on le mette en examen pour collaboration avec l’organisation terroriste. Pamiés évoque également la pression psychologique dont il a souffert pendant les années les plus noires du terrorisme basque. Pour son avocat, la version présentée par le chef supérieur de la police de Bilbao contredit totalement le contenu de l’acte d’accusation du juge Ruz, que Fuster-Fabra accuse d’avoir adhéré à une vérité officielle et de rechercher, en Pamiés et Ballesteros, des « coupables idéaux ». Les avocats des policiers considèrent qu’il y a d’autres pistes à suivre et qu’à travers l’inculpation de leurs clients, on cherche à éluder ces pistes, ce qui permet tous types d’élucubrations, comme la piste « Mariscal ».
Cette piste mène au responsable de la sécurité du Parti socialiste, l’ancien commissaire Fernando Mariscal, qui a appelé au moment du chivatazo son ami Manuel Risco, chef de la Brigade opérationnelle de Saint-Sébastien, soi-disant, comme le PSOE le prétend toujours, pour lui souhaiter « un bon anniversaire ». Mais il y a une contradiction quant au lieu dans lequel dit s’être trouvé Risco ; les données extraites de son portable indiquent qu’il se trouvait aux abords du bar Faisán, alors que des fonctionnaires du ministère de l’Intérieur assurent qu’il était au commissariat de Saint-Sébastien, la capitale de Guipúzcoa.
Le syndicat de fonctionnaires « Mains propres », proche de l’extrême droite, porte lui une accusation que réfute le juge Garzón : Mariscal aurait appelé Risco pour lui demander de prévenir Elosúa de ce que le juge Grande-Marlaska allait ordonner son arrestation. Risco se serait dirigé vers le domicile de l’etarra, et ne l’y trouvant pas, se serait rendu au bar Faisán, où il aurait tendu à Elosúa un téléphone portable où l’aurait ensuite appelé Mariscal pour l’avertir de l’opération policière. Une autre version, identique quant au déroulement des faits, accuse, elle, Ballesteros d’avoir agi ainsi, et non Risco.
Les réactions des syndicats de police
Selon le porte-parole de l’UFP (Unión Federal de Policía), il convient, dans cette trouble affaire, de nommer de nouveaux enquêteurs et de déterminer qui a éteint les caméras de surveillance du bar. La CEP (Confédération espagnole de la police) demande à ce que Camacho et Rubalcaba assument leur responsabilité politique dans ce scandale. Lorenzo Nebreda, porte-parole de la CEP, assure en effet qu’au sein de la police, aucune décision relative à l’anti-terrorisme ne peut être prise sans que le secrétaire d’Etat et le ministre de l’Intérieur n’en soient informés.
Le Syndicat unifié de la police (SUP) qualifie, lui, la mise en examen des 3 policiers d’ « infamie judiciaire, médiatique et politique » et évoque une instruction judiciaire « téléguidée ». Le SUP rappelle la longue liste des états de services de Pamiés et Ballesteros dans la lutte anti-terroriste, et rejette en conséquence l’idée qu’on puisse leur imputer le « mouchardage ».
Des policiers infiltrés au sein du réseau?
C’est ce que prétend le président du PSE (Partido Socialista de Euskadi, le PS basque), Jesús Eguiguren. C’est ce qui explique, selon lui, que la police n’ait pas voulu procéder de suite aux arrestations : il se serait agi de protéger un ou des policiers infiltrés. Un membre de l’ETA aurait avoué à Eguiguren que l’organisation, et en premier lieu Josu Ternera (un des dirigeants historiques de l’ETA), se doutait de quelque chose et était très consciente de ce que, malgré la trêve, la police continuerait à traquer les etarras. Rappelons qu’Eguiguren a servi de médiateur dans les négociations avec l’ETA et participé à des « contacts » après l’attentat du terminal T-4 de Barajas (30 décembre 2006) ; ces contacts ont été envisagés suite à une information émanant notamment de Gerry Adams (figure du nationalisme nord-irlandais et dirigeant présumé de l’IRA), selon laquelle l’ETA avait quelque chose d’important à communiquer au gouvernement espagnol, ce qui s’avéra erroné.
Pour en revenir aux « taupes » supposées au sein de l’organisation terroriste, le syndicat SUP semble bien confirmer la présence d’au moins un policier infiltré, évoquant, à propos de cette affaire, les diverses actions menées par celui-ci au sein de l’ETA : agitation urbaine (kale borroka, souvent menée par des jeunes) à coups de cocktails Molotov, de voitures et de distributeurs de billets incendiés, mais aussi appel à la lutte armée dans les assemblées abertzale (gauche nationaliste), etc. Le SUP affirme que l’identification du policier infiltré ne peut se faire car sa vie courrait un grave danger. Le SUP rappelle le précédent d’une policière infiltrée, il y a quelques années, au sein de l’ETA : elle avait été identifiée par un journal pro-etarra qui avait publié l’adresse et des photos du domicile de ses parents.
Le retentissement politique de l’affaire
Le « mouchardage » s’étant produit durant le mois de mai 2006, quelques mois après le début de la trêve décrétée par l’ETA (mars 2006), le PP a, en novembre 2009, interpelé au Congrès le gouvernement, lui demandant si le chivatazo n’aurait pas répondu à des instructions politiques. Le PP s’est même risqué à accuser le ministère de l’Intérieur de l’avoir commandité ; une accusation qui visait directement le ministre d’alors, Rubalcaba, aujourd’hui candidat à la Présidence du gouvernement.
Le porte-parole du PSOE à la commission de l’Intérieur, Antonio Hernando, a critiqué le PP pour avoir demandé à Rubalcaba de retirer sa candidature. Hernando a rappelé à ce propos que le nom de Rubalcaba n’est même pas mentionné dans l’acte d’accusation du juge Ruz. Selon Hernando, le PP craint réellement la candidature de l’ex-ministre de l’Intérieur et veut par là masquer ses réussites dans la lutte contre le terrorisme.
Rubalcaba, quand à lui, cherche à minimiser l’impact de la mise en examen des trois policiers en affirmant que ce seront les tribunaux qui détermineront la responsabilité des inculpés. Rubalcaba accuse le PP de vouloir « semer des doutes et des ombres » sur la politique anti-terroriste du gouvernement. L’ex-ministre a rappelé que l’opération contre le réseau d’extorsion a finalement été menée à bien un mois et demi après le « mouchardage » et qu’elle a permis d’arrêter tous les membres du réseau. Un argument que Rubalcaba a plusieurs fois utilisé pour répondre au Congrès aux questions répétées du PP.
Le « mouchardage » du 4 mai 2006 s’est en effet produit 15 jours après que Rubalcaba a été nommé ministre de l’Intérieur par Rodríguez Zapatero, avec pour mission de gérer le processus de paix ouvert avec l’ETA. Le jour même du chivatazo, le président d’alors du PNV (Partido Nacionalista Vasco, de centre-droit), Josu Jon Imaz, s’entretient à la Moncloa, la résidence du Président du gouvernement, avec Rodríguez Zapatero, pour lui confirmer le soutien de son parti à une reprise de contacts avec l’ETA. Mais l’organisation terroriste va rompre la trêve décrétée plusieurs mois auparavant, et avec elle le processus de paix, en faisant exploser une fourgonnette piégée dans le parking du terminal 4 de l’aéroport de Barajas (près de Madrid) en décembre 2006.
Rubalcaba dénonce, dans l’instruction menée par le juge Ruz, des « failles juridiques ». Le candidat socialiste a rappelé, que contrairement à ce que demandait le PP, le juge a refusé que Camacho vienne témoigner. C’est, selon Rubalcaba, une preuve certaine que le Ministère de l’Intérieur n’a rien à voir dans cette affaire. Le problème « n’est pas Camacho, mais Alfredo » affirme Alfredo Pérez Rubalcaba, comme pour mieux signifier que le PP détourne cette affaire à des fins purement électoralistes… Le vice-président à la Communication du PP, Esteban González Pons, estime, lui, que l’affaire est aussi grave que celle des GAL et que le PP doit demander des comptes au gouvernement.
Evolution du cadre judiciaire
Le 26 juillet 2011, la presse espagnole annonce que l’« affaire Faisán » sera finalement jugée en séance plénière par la Cour pénale de la Audiencia Nacional (AN), comme l’avait demandé son président, Javier Gómez Bermúdez. Une telle décision rassure le gouvernement. Des sources judiciaires ont justifié que l’affaire soit traitée par la Cour pénale de l’AN en raison de sa complexité et de son importance juridique. La décision de Gómez Bermúdez suppose que ce seront l’ensemble des 18 magistrats de la Cour qui seront chargés d’étudier, après l’été, les recours présentés par les trois inculpés contre leur mise en examen.
Le ministère public a profité de ces recours pour demander à ce que cette affaire soit jugée sur les lieux du délit imputé aux 3 policiers, c’est-à-dire Irún, en arguant du fait que les inculpés n’ont pas, quoi qu’il en soit, cherché à collaborer avec l’ETA, contrairement à ce qu’affirme le juge Ruz. Pour le juge cependant, il y a bien eu, dans le cadre de ce « mouchardage », pleine connaissance et volonté des auteurs de permettre que la somme d’argent récoltée par l’appareil d’extorsion (quelque 54 000 euros) ne soit pas interceptée par les forces de police chargées de la surveillance du réseau terroriste. Ruz ajoute que les indices accumulés dans l’instruction laissent supposer que cette quantité d’argent a été mise à disposition de l’organisation terroriste, ou d’un de ses membres présumés, pour l’accomplissement et l’exécution des activités et finalités poursuivies par cette organisation. La thèse opposée est défendue par le ministère public, qui se trouve là en accord avec des magistrats de la Cour pénale de l’AN, qui considèrent que le délit de collaboration avec une bande armée est lié inévitablement à une adhésion idéologique à l’organisation terroriste ; ce qui ne saurait être le cas dans cette affaire. Si la Cour pénale de l’AN valide, en séance plénière, la demande du ministère public, les inculpés ne pourront être accusés que d’atteinte au secret ; auquel cas ils n’encourraient pas de peine de prison, ce que cherche à éviter à tout prix le gouvernement.
Par contre, si l’affaire est traitée par la Audiencia Nacional, le gouvernement peut craindre qu’on ne cite comme témoins le secrétaire d’Etat à la Sécurité d’alors, l’actuel ministre de l’Intérieur, Antonio Camacho, et l’actuel candidat à la Moncloa, jadis ministre de l’Intérieur, Pérez Rubalcaba. Le PSOE n’a pour l’heure qu’une priorité dans le dossier Faisán : voir enfin s’éloigner le risque majeur que cette affaire ne connaisse, à l’automne 2011, un scandaleux et retentissant apogée en pleine campagne des législatives.